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Tuesday, November 5th, 2024
the Week of Proper 26 / Ordinary 31
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Bible Commentaries
La Bible Annotée de Neuchâtel La Bible Annotée de Neuchâtel
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Informations bibliographiques
bibliography-text="Commentaire sur John 14". "La Bible Annot�e de Neuch�tel". https://www.studylight.org/commentaries/fre/neu/john-14.html.
bibliography-text="Commentaire sur John 14". "La Bible Annot�e de Neuch�tel". https://www.studylight.org/
Whole Bible (6)New Testament (1)
versets 1-31
Verset 1
Autre consolation : la maison du Père (1-11)
Interrompu par Pierre dans son discours d’adieux (Jean 13.36), Jésus le reprend ici avec la même tendresse pour ses disciples. Il leur a dit clairement qu’il va les quitter (Jean 13.33), ce qui déjà les a remplis de tristesse ; la prédiction du reniement de Pierre (Jean 13.38), qui suivait de près la déclaration que l’un d’eux le livrerait (Jean 13.21), les avait consternés ; tout devant eux est donc obscurité, sujet d’inquiétude et d’angoisse, leur cœur se trouble.
Jésus lit sur leurs visages ce trouble et il y compatit d’autant plus vivement que lui-même l’a éprouvé (Jean 12.27). Pour les consoler, il les exhorte à la confiance et développe la magnifique perspective qu’il venait d’entrouvrir devant eux dans cette réponse à Pierre : « Là où je vais… tu me suivras plus tard » (Jean 13.36).
Pour saisir la force des paroles que Jésus oppose au trouble de ses disciples il importe de se souvenir que la foi est une pleine confiance du cœur.
On pourrait donc traduire ainsi : Confiez-vous en Dieu, confiez-vous aussi en moi.
En Dieu, le Dieu de vos pères qui, accomplissant ses promesses, a fondé son royaume dans ce monde en lui donnant un Sauveur ; en moi, sur qui repose tout l’avenir de ce royaume. Cette double confiance dissipera certainement le trouble de votre cœur.
Comme le verbe grec n’a qu’une forme pour l’indicatif et pour l’impératif, on peut traduire ces mots de diverses manières.
Ce qui devait frapper vivement les disciples, c’est que Jésus leur demande d’avoir en lui la même confiance religieuse qu’ils avaient en Dieu.
Verset 2
Après avoir exhorté ses disciples à la confiance, Jésus veut leur faire sentir qu’ils ne doivent pas s’affliger de son départ, puisque dans la maison de son Père où il va, il y a une place assurée pour eux : plusieurs demeures, non les tentes passagères du désert, mais des demeures permanentes, où l’on respire la paix et l’amour la communion du Père.
Impossible d’exprimer avec plus de simplicité, d’assurance et de bonheur l’idée de ce royaume éternel de Dieu, où habitent des milliers d’anges créés pour sa gloire et d’autres milliers de pécheurs sauvés, parvenus à la perfection. Et là, cependant, « il y a encore de la place » (Luc 14.22).
C’était là pour les disciples une pensée pleine de consolation. Cette expression : plusieurs demeures ne désigne pas des positions diverses, des degrés différents de bonheur, comme le pensent plusieurs interprètes, mais l’immensité de la miséricorde divine, grâce à laquelle il y a place pour tous dans la maison du Père.
Si cela n’était pas, c’est-à-dire, s’il n’y avait pas plusieurs demeures dans la maison de mon Père, je vous l’aurais dit, car je vous révèle en toutes choses la vérité et rien que la vérité ; mais cela est, car (Codex Sinaiticus, B, A, C, versions) je vais vous préparer une place.
En effet, il n’y a pas de démonstration plus éclatante et plus douce des réalités du ciel, que le retour et la présence du Sauveur dans la maison du Père. C’est une preuve de fait irrécusable pour tous ceux oui croient en lui.
Mais que faut-il entendre par cette expression : vous préparer une place ? Tout d’abord, c’est le Sauveur qui, en retournant, après avoir achevé son œuvre, dans la maison du Père, en ouvre l’accès à ses rachetés. « Il y est entré pour nous comme précurseur, ayant été fait souverain sacrificateur éternellement » (Hébreux 6.20). Il est donc le garant de notre admission auprès de Dieu. Et, en outre, c’est par l’exercice de sa souveraine sacrificature, par son intercession auprès de Dieu, qu’il assure aux siens les droits qu’il leur a acquis.
Le texte reçu, omettant la particule car ou parce que, porte : « Si cela n’était pas, je vous l’aurais dit. Je vais vous préparer une place ». La pensée reste la même.
Mais, depuis les Pères de l’Église jusqu’à Luther, plusieurs interprètes, comprenant mal cette particule, traduisent ainsi : « Si cela n’était pas, je vous aurais dit que je vais vous préparer une place ». C’est introduire dans le texte une contradiction et un non-sens.
D’autres (Weizsäcker, Lange) font de la phrase une question : « Si cela n’était pas, vous aurais-je dit que je vais vous préparer une place ? » Mais il ne leur avait encore rien dit de pareil !
Verset 3
Après avoir affirmé l’existence de la maison du père où leur place sera préparée, Jésus ajoute, pour ses disciples, la précieuse promesse de revenir et de les prendre à lui, afin que là où il est, ils y soient aussi à toujours. Pour eux, qui aimaient leur Maître et qui étaient troublés à la pensée de son départ, c’était la suprême consolation (comparer Jean 12.26 ; Jean 17.24).
Mais que signifie ce mot : Je reviendrai (grec je viens de nouveau) ? Quand ? Comment ?
Ici les interprètes se divisent à l’infini. Ebrard entend par ce retour la résurrection de Jésus-Christ, d’autres (Lücke, Olshausen, Neander, Godet), l’effusion du Saint-Esprit sur les apôtres (comparez verset 18) ; d’autres encore pensent que cette promesse s’accomplit à la mort de chaque fidèle (Tholuck, Lande, Reuss, Gess). D’autres enfin (Meyer, Gneiss, Luthardt) soutiennent que ce mot ne peut s’entendre que du retour glorieux et final du Sauveur, qui alors réunira tous ses rachetés auprès de lui.
Mais le présent je reviens (grec) implique un fait prochain et Jésus n’a jamais enseigné l’imminence de son retour glorieux ; d’ailleurs ce sens ne saurait se défendre au verset 18.
Ne pourrait-on pas réunir et concilier toutes ces opinions diverses ? N’y est-on pas invité par ce verbe au présent, je reviens ?
Si les disciples avaient pu comprendre alors cette grande parole, comme ils la comprirent plus tard, il est sûr qu’ils y auraient puisé une consolation puissante.
Verset 4
Jésus avait dit clairement à ses disciples où il allait (Jean 14.2 ; Jean 6.62 ; Jean 7.33) ; et il s’était constamment présenté à eux comme le chemin, le seul médiateur entre Dieu et leur âme.
Ils pouvaient donc savoir et le but et le chemin.
Mais la question de Pierre (Jean 13.36) et l’objection de Thomas (verset 5) montrent que cette connaissance était encore bien obscure. Aussi Jésus veut-il, par cette dernière parole provoquer en eux la réflexion sur les grandes pensées qu’il vient d’exprimer (versets 2 et 3).
D’après une variante de Codex Sinaiticus, B, C admise par beaucoup de critiques et d’exégètes, il faudrait traduire ainsi ce verset : Et là où je vais, vous en savez le chemin. Mais le texte reçu qui se fonde sur A, D, la plupart des versions est plus approprié à la pensée de Jésus.
Verset 5
Grec : Comment savons-nous le chemin ?
Le texte reçu porte : et comment pouvons-nous savoir le chemin ?
Thomas est l’homme positif qui n’admet rien que sur des preuves évidentes et est par là même enclin au doute, au découragement (Jean 11.16 ; Jean 20.25).
Il interrompt Jésus par cette brusque déclaration qu’il ne connaît ni le lieu où il va ni par conséquent le chemin. Après les dernières paroles de Jésus (versets 2 et 3), il en savait, plus qu’il ne veut dire, mais il ne le croyait pas.
Verset 6
La raison humaine cherche toujours au loin ce que la parole de Dieu lui présente tout près. Ainsi Marthe reléguait dans un lointain avenir l’espérance de la résurrection de son frère et Jésus lui dit : « C’est moi qui suis la résurrection et la vie » (Jean 11.25).
De même ici, Thomas prétend ignorer le chemin et il l’a devant les yeux et Jésus doit lui répondre : c’est moi qui suis le chemin.
Il ne dit pas qu’il montre le chemin qui conduit au Père, ce qui, comme l’observe de Wette, établirait un rapport tout extérieur entre lui et son disciple. Il dit : Je suis le chemin, il est lui-même le médiateur vivant qui s’unit au croyant et ainsi le conduit au but, c’est-à-dire à la communion avec Dieu (comparer Éphésiens 3.12 ; Hébreux 10.20).
Il l’est en tant qu’il est la vérité, c’est-à-dire la révélation complète de Dieu même, la vérité que l’homme doit s’approprier personnellement pour être sauvé. Il est par là même la vie, parce qu’il est pour le croyant la source unique de la vie de l’âme, de la vie éternelle (Jean 6.50 ; Jean 11.25) ; tellement que quiconque ne puise pas cette vie en lui demeure dans la mort.
De ces prémisses résulte cette sentence absolue qui se comprend d’elle-même après de telles paroles : nul ne vient au Père que par moi.
La plupart des interprètes modernes s’accordent à ne point considérer ces trois termes : chemin, vérité, vie comme coordonnés, en sorte qu’ils indiqueraient le commencement, le milieu et la fin de la foi (Luther, Calvin). En effet, le Sauveur est, d’une manière constante, pour le croyant, le chemin, c’est-à-dire le moyen d’arriver au Père, en étant pour lui la vérité et la vie. Il l’est, sans doute, plus ou moins complètement, selon le degré de notre communion avec lui.
Verset 7
Ce verset est à la fois l’application et le commentaire de celui qui précède. Quiconque connaît Jésus tel qu’il vient de se révéler à ses disciples, connaît aussi son Père, dont il est la manifestation visible (Jean 8.19).
Bien plus, il va jusqu’à affirmer que dès à présent, après l’instruction profonde qu’il vient de leur donner, ils connaissent le Père et qu’ils l’ont vu en lui.
Les disciples n’avaient sans doute que les premiers rudiments de cette connaissance ; mais il y a une grande sagesse pédagogique à les encourager ainsi, en leur supposant plus de lumières qu’ils n’en ont ; et, du reste, la Parole divine que Jésus répandait alors dans leur âme y restera comme le principe vivifiant de la connaissance qui leur manque encore. C’est exactement ainsi qu’il leur parle au Jean 15.3.
L’interprétation que nous venons d’exposer est celle qu’admettent Tholuck, Meyer, MM. Luthardt et Godet. D’autres exégètes (Chrysostome, Lücke) estimant que Jésus ne pouvait, dès cette époque, parler ainsi à ses disciples, pensent que c’était là une sorte d’indication anticipée de ce qui leur sera accordé par l’Esprit à la Pentecôte.
Mais ce sens ne peut s’accorder avec les plus-que-parfaits et le dès à présent. L’objection qui arrête ces interprètes a probablement donné naissance à la leçon de Codex Sinaiticus, D : Si vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père.
B, C omettent le et devant dès à présent ; M. Weiss adopte cette variante et traduit par l’impératif : Connaissez-le dès à présent, tel qu’il vous est révélé en moi, et vous l’aurez vu.
Verset 8
La parole de Jésus : Vous l’avez vu, comprise par Philippe comme si Dieu pouvait exister pour lui à côté ou en dehors du Sauveur, lui inspire le désir de voir une théophanie ou révélation extraordinaire de Dieu, comme la demandait Moïse (Exode 33.18) ; et il exprime naïvement ce désir à son Maître.
Cela nous suffit, ajoute-t-il nous n’aurons plus aucun doute que le Père ne se révèle pleinement par toi.
Verset 9
C’est avec tristesse que Jésus reproche à son disciple de ne l’avoir pas connu, malgré toutes les expériences que, depuis si longtemps, il avait pu faire auprès de lui.
Il l’appelle affectueusement par son nom : Philippe, afin de l’inviter à réfléchir sur la demande qu’il venait de lui adresser.
Cette interpellation : Philippe, peut aussi être rattachée à la phrase suivante. Ainsi font la plupart de nos versions. Mais il est plus naturel de joindre Philippe à la phrase qui précède. C’est son reproche que Jésus adresse à ce disciple nommément.
Celui qui a vu Jésus a vu le Père, le Dieu qui est sainteté et amour et dont le Sauveur était sur la terre la parfaite manifestation Cette grande révélation est expliquée au verset suivant ; elle est conforme à tous les enseignements du Nouveau Testament (Jean 1.18 ; Jean 12.45 ; Colossiens 1.15 ; Hébreux 1.3).
Verset 10
Philippe demandait à voir, Jésus l’exhorte à croire.
C’est uniquement par la foi qu’il pouvait pénétrer dans ce mystère de l’unité absolue du Père et du Fils qui lui permettrait de voir le Père dans le Fils (verset 9).
En effet, ces paroles de Jésus expriment, tout ensemble, l’intime unité d’essence et le rapport mutuel vivant, actif, qu’il y a entre le Père et le Fils, Jésus va le prouver en déclarant que c’est le Père qui parle et agit en lui.
Les paroles et les œuvres du Sauveur, ces paroles qui sont esprit et vie (Jean 6.63), ces œuvres de puissance divine et d’amour divin, telle est la démonstration irrécusable que le Père était en lui, parlait et agissait par lui.
Au lieu de c’est lui qui fait les œuvres, Codex Sinaiticus, B, D portent : il fait ses œuvres (Jean 5.19-21 ; Jean 10.25 ; Jean 10.37-38 ; Jean 12.49).
Verset 11
Après avoir donné à Philippe cette instruction profonde, Jésus se tourne vers tous ses disciples et il les exhorte à le croire quand il leur déclare qu’il est dans le Père et que le Père est en lui, à le croire sur la seule autorité de sa parole.
Mais il ajoute, sans doute avec tristesse que si leur foi est encore trop obscure et trop faible pour se fonder uniquement sur sa parole, ils doivent au moins le croire à cause de ses œuvres mêmes, considérées en elles-mêmes. Il entend par là ses miracles (Jean 10.37-38).
La foi, fondée sur ces œuvres, n’est pas encore la vraie foi (Jean 2.23 ; Jean 3.2), mais elle peut conduire à la foi immédiate.
Au lieu de traduire : Croyez-moi que je suis,… c’est-à-dire : quand je vous dis que je suis,… on peut traduire aussi : Croyez-moi, parce que je suis dans le Père et que non seulement mes paroles, mais toute ma manière d’être, ma sainteté parfaite et mes œuvres (verset 10) attestent que le Père est en moi ; sinon, si vous n’avez pas assez de discernement spirituel pour le reconnaître en moi, croyez du moins à cause des œuvres mêmes.
Verset 12
Nouvelles sources de consolation : les œuvres et la prière, l’Esprit Saint, la communion avec Jésus et avec Dieu (12-24)
Jésus revient ici au discours plein de consolation qu’il adresse à ses disciples au sujet de son départ (verset 1 et suivants) et dans lequel il a été interrompu par Thomas (verset 5) et par Philippe (verset 8). Et comme il leur a montré, en répondant à la requête de celui-ci, que le Père se manifestait pleinement en lui dans ses paroles et dans ses œuvres (versets 9-11), il leur fait maintenant une magnifique promesse qui, en se réalisant, leur donnera de sa divinité et de la pleine révélation de Dieu en lui une preuve propre à créer une intime conviction : c’est que celui qui croit en lui fera lui aussi les mêmes œuvres et en fera de plus grandes encore.
Il promet avec une autorité solennelle : En vérité, en vérité, la communication de l’Esprit et des grâces qui en résulteront pour les disciples (versets 12-24). Cette promesse, en même temps, ajoute à la perspective encore éloignée de la réunion dans la maison du Père (versets 1-3), celle d’une prochaine réunion en esprit : les disciples reverront bientôt le Sauveur qui va les quitter pour s’en aller au Père (versets 18 et 19).
Que faut-il entendre par ces œuvres semblables à celles du Sauveur et plus grandes encore, qu’accompliront ceux qui auront cru en lui ?
Ce ne sont sûrement pas des œuvres extérieures, des miracles matériels, plus étonnants encore que les siens comme l’ont cru quelques exégètes ; mais bien des miracles spirituels, que les apôtres feront, quand leur parole, animée de l’Esprit de Dieu, régénérera les âmes, fondera l’Église et portera la lumière et la vie au milieu de toutes les nations.
Ces œuvres plus grandes, Jésus lui-même ne pouvait les faire, parce que « l’Esprit n’était pas encore » (Jean 7.39). Mais bientôt elles seront possibles et se produiront réellement, dit Jésus, parce que je vais au Père.
Quand il aura repris possession de sa gloire et que « toute puissance lui sera donnée au ciel et sur la terre » (Matthieu 28.18), il accomplira lui-même dans ses disciples la parole qu’il prononce. Il le fera en répondant à toutes leurs prières (versets 13 et 14) et en répandant sur eux le Saint-Esprit de la Pentecôte (versets 16 et 17).
Verset 13
Cette promesse est encore dans un rapport immédiat avec la parole précédente : « parce que je m’en vais au Père ».
Aussi la plupart des interprètes modernes, peut-être avec raison, font-ils dépendre encore la seconde proposition du parce que ; ils traduisent : « et que tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai ».
Les disciples restent avec Jésus dans un rapport plus intime et plus vivant que jamais. Eux, sur la terre, prient en son nom et lui leur accorde toutes leurs demandes (grec : moi, je le ferai).
Grâce à son action puissante, ils accomplissent ses œuvres et même de plus grandes, afin que le Père soit glorifié dans le Fils (voir Jean 13.32, note).
Mais qu’on le remarque bien, Jésus donne ici à la prière un caractère tout spécial et tout nouveau pour ses disciples, il s’agit de la prière qui s’adresse à Dieu en son nom et il insistera encore sur cette parole (Jean 15.16 ; Jean 16.23).
Quel en est le sens ? En son nom, ne signifie pas seulement : sur son ordre, en son autorité, par ses mérites ; dans le style des Écritures le nom désigne l’être, révélé dans son essence et toutes ses propriétés.
Prier au nom de Jésus, c’est donc, comme le dit Keil, dont M. Godet adopte l’interprétation, prier « en nous replongeant avec foi dans la connaissance que nous avons reçue de lui comme Fils de Dieu abaissé et glorifié », ou, mieux encore (car cette connaissance n’est point purement intellectuelle, mais implique une relation de vie) c’est prier en Jésus lui-même, le seul médiateur qui nous ouvre l’accès au trône de la grâce, c’est prier dans une communion intime avec lui, selon sa volonté, par son Esprit, qui seul nous communique la puissance d’accomplir cet acte religieux.
Quand celui qui prie ainsi se sent devenu un avec le Sauveur, il est certain d’être exaucé (comparer Romains 8.26).
Le vrai commentaire de cette parole nous est donné par Jésus lui-même : « Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez et il vous sera fait ».
Codex Sinaiticus, B et quelques majuscules portent : Si vous me demandez quelque chose en mon nom. Cette leçon ne présente aucun sens acceptable.
Verset 15
Jésus vient de faire à ses disciples une précieuse promesse (versets 13 et 14) ; il va leur en faire une plus précieuse encore (verset 16) ; dans ce moment il leur présente la condition morale qu’ils doivent remplir pour recevoir ce qu’il leur promet, il les invite à demeurer avec lui dans une vraie communion d’amour et d’obéissance, c’est par là que leur cœur sera ouvert à l’action du Saint-Esprit qu’il va leur annoncer.
Aimer Jésus et garder ses commandements doit être, dans le cœur de son disciple, une seule et même chose (verset 21).
Par ses commandements, il ne faut point entendre seulement certains préceptes ou certains devoirs prescrits mais tout ce qu’il a enseigné sa révélation complète. C’est ce qu’il appelle ailleurs garder sa parole (Jean 8.51), la conserver précieusement dans le cœur et la mettre en pratique dans la vie.
B et quelques autres témoins ont le futur : vous garderez.
Verset 16
La liaison de ces deux versets est bien remarquable : « Si vous m’aimez, gardez mes commandements et moi je prierai le Père, qui fera lui-même abonder en vous l’amour et l’obéissance ».
Ce que le Sauveur demandera à Dieu, c’est qu’il donne aux disciples son Saint-Esprit qui deviendra leur vie et celle de l’Église.
C’est ici la première fois que paraît le terme de Paraklètos (comparez Jean 14.26 ; Jean 15.26 ; Jean 16.7), qui ne se trouve que dans les écrits de Jean (comparez 1 Jean 2.1) et que, d’après Origine et Chrysostome, nos réformateurs (Luther, Calvin) ont rendu par Consolateur.
Ce nom serait très beau et bien en harmonie avec le but de ces discours de Jésus. Mais le mot grec n’a pas le sens actif, il est passif et signifie littéralement : appelé auprès de ; c’est exactement le sens du latin advocatus et de notre mot avocat, défenseur d’un accusé devant un tribunal.
Les auteurs classiques lui donnent toujours cette signification et c’est aussi celle qu’admettent la plupart des exégètes modernes.
Si nous n’adoptons pas ce terme : avocat dans la traduction, c’est qu’il éveille l’idée d’un procès, qui est tout à fait étrangère au contexte.
Nous nous en tenons au mot : aide qui conserve le caractère indéterminé de l’expression originale.
Cet aide ne sera pas avec les disciples pour un peu de temps seulement, comme l’a été le Sauveur dans sa vie ici-bas, il sera pour toujours, éternellement avec eux.
Verset 17
Les mots : l’Esprit de vérité, indiquent quel est l’aide que Jésus annonce à ses disciples.
Le Saint-Esprit est ainsi désigné (ici et ailleurs, Jean 15.26 ; Jean 16.13), parce que, comme Esprit de Dieu, il est lumière et vie, c’est-à-dire vérité complète. Et cette vérité, il la communique à l’âme au moyen de la Parole divine.
Toute vérité révélée n’est pour nous la vérité que lorsque par l’Esprit de Dieu nous en avons fait une expérience vivante. C’est lui qui, en nous mettant en communion avec Dieu nous le révèle tel qu’il est dans sa sainteté et son amour, c’est lui qui glorifie Christ en nous, c’est-à-dire nous met en possession de lui. C’est lui enfin qui rétablit dans le vrai tout ce qui est faussé en nous, qui, en un mot, éclaire, régénère sanctifie l’âme.
Le monde, éloigné de Dieu et incrédule, ne peut recevoir cet Esprit, dit le Sauveur, parce qu’il ne le voit point, c’est-à-dire ne sait le discerner dans aucune de ses manifestations, il ne le connaît point par une expérience intime, parce qu’il reste étranger et fermé à son influence (1 Corinthiens 2.14).
Bien différents étaient, alors déjà, les disciples, auxquels Jésus pouvait dire : vous le connaissez, parce qu’il demeure avec vous.
En effet, ils avaient, dans une certaine mesure, respiré cet Esprit en vivant avec Jésus, en étant les témoins de ses actes, de sa sainte vie, en écoutant ses paroles, en se soumettant aux directions par lesquelles le Maître s’était efforcé de faire leur éducation. En Jésus et par son intermédiaire, l’Esprit agissait constamment sur eux et ce n’est que par cet Esprit qu’ils avaient cru en lui et confessé son nom (Matthieu 16.17).
À l’inverse des disciples, le monde, c’est-à-dire les Juifs incrédules en méconnaissant toutes ces manifestations de l’Esprit en Jésus, en attribuant ses miracles à Béelzébul (Matthieu 12.24 et suivants), avaient refusé de voir l’Esprit et s’étaient mis dans l’impossibilité de le recevoir.
C’est donc une erreur de ne voir dans ces verbes au présent, comme le font plusieurs interprètes, qu’une anticipation de ce qui ne sera réalisé qu’après la Pentecôte. Il y a sans doute une promesse relative à la Pentecôte, mais elle est seulement dans ce verbe au futur : il sera en vous.
Jusqu’ici, veut dire Jésus, pendant que je vis en votre société, l’aide est avec vous ; alors cet aide sera en vous. Ils posséderont dans leurs cœurs l’Esprit, qui ne sera autre que Jésus lui-même sous une autre forme (verset 18 et suivants).
Cette nuance est méconnue par B, D qui ont ce dernier verbe au présent comme les précédents : il est en vous.
Verset 18
Ceux que Jésus avait appelés avec tendresse petits enfants, il les aime trop pour les abandonner comme des orphelins qui vont perdre en lui plus qu’un père.
La riche promesse qu’il vient de leur faire est le garant qu’il n’en sera point ainsi : Je viendrai à vous, leur dit-il.
C’est donc par son Esprit qu’il viendra à eux et non, comme le pensent divers exégètes, par sa résurrection ou même par son retour au dernier jour. Le contexte s’oppose à ces explications (versets 21 et 23).
Verset 19
Il restait peu, bien peu de temps, puisque Jésus devait mourir le lendemain et disparaître aux yeux du monde, qui ne le verra plus. Malgré cela, les siens le verront.
Et, comme si ce moment était déjà là, il est exprimé en grec par des verbes au présent : Le monde ne me voit plus, mais vous, vous me voyez.
Quand et comment ? Quand Jésus leur apparaîtra ressuscité ? C’est ainsi que quelques interprètes entendent ces paroles.
Mais il s’agit ici d’une vue spirituelle et permanente (verbe au présent, comparez 2 Corinthiens 3.18), qui se réalise par une communion toute nouvelle avec lui. C’est ce que prouvent les derniers mots de ce verset et tout le contexte (versets 20, 21, 23). Il y a une grande force dans la raison que Jésus allègue à l’appui de la promesse de vie qu’il fait à ses disciples : vous vivrez, parce que je vis. Jésus ne dit pas : Je ressusciterai, je vivrai, mais je vis (voir la note précédente).
Celui qui « a la vie en lui-même » sait que la mort qu’il va subir n’aura pas le pouvoir de détruire cette vie. Et la conséquence magnifique qu’il en tire pour les siens est celle-ci : Vous aussi, vous vivrez. Sa vie est leur vie et dans le temps et dans l’éternité. Ainsi parlait l’apôtre Paul, d’après sa propre expérience (Galates 2.20 ; Philippiens 1.21 ; Colossiens 3.3-4).
La relation entre la vie du Christ et celle du croyant est moins nettement exprimée quand on traduit avec MM. Luthardt et Weiss : « Vous me verrez, parce que je vis et que vous vivrez ».
L’antithèse du futur : vous vivrez et du présent : je vis recommande plutôt la construction que nous avons adoptée.
Verset 20
En ce jour-là, date précise qu’il ne faut pas rendre incertaine et vaine par de fausses interprétations, c’est le jour de l’effusion de l’Esprit de lumière et de vie, la Pentecôte.
En ce jour, les disciples connaîtront, par cet Esprit et par leur expérience personnelle, d’abord, l’unité de Christ avec son Père, qu’il leur a si souvent affirmée (Jean 14.10 ; Jean 14.28) ; ensuite, ils feront l’expérience toujours plus intime de leur communion avec le Sauveur en qui ils vivent et qui vit en eux.
Cette relation nouvelle dans laquelle ils seront avec Jésus leur fera comprendre la relation de Jésus avec le Père, ils comprendront, ce qu’ils n’avaient pu saisir encore (versets 9-11), que le Père est dans le Fils.
Dans ce double rapport si intime et si profond que Jésus exprime avec tant de simplicité : moi en mon Père, vous en moi et moi en vous, les disciples ont toute la révélation de l’immense amour de Dieu manifesté en Jésus (verset 21).
Verset 21
Ce verset développe le précédent et en précise le sens.
Qui sont ceux à qui Jésus a dit : Vous connaîtrez ? Il répond : Celui qui a dans son cœur mes commandements et qui les garde avec fidélité dans sa vie (verset 15, note) ; car c’est lui seul qui m’aime.
Son cœur est alors ouvert à tous les trésors de l’amour divin : il sera aimé du Père, qui le contemple en son Fils, objet suprême de son amour ; Jésus aussi l’aimera et lui en donnera des preuves toujours plus intimes en se manifestant à lui dans sa vie intérieure ; le verbe grec signifie se manifester au dedans.
Ces magnifiques promesses s’accompliront par l’Esprit de vérité (verset 17), dont Jésus décrit l’action dans la suite du discours (comparer verset 26).
Verset 22
Ce Judas, nommé aussi Lebbée et Thaddée (Matthieu 10.3), était fils d’un homme appelé Jacques (Luc 6.16 ; comparez Actes 1.13).
La remarque par laquelle l’évangéliste le distingue de Judas Iscariot, superflue après Jean 13.30, trahit l’horreur que lui inspirait son homonyme.
La question de ce disciple montre qu’il attendait encore un Messie qui serait le roi terrestre d’Israël, le juge des nations. Or, il ne pouvait comprendre que, comme tel, Jésus ne dût se manifester qu’au petit nombre de ceux qui l’aimaient et non à tout le monde.
Le et par lequel s’ouvre la question a été omis dans B, A, D, Itala. Il marque bien l’étonnement de Judas.
Verset 23
Jésus ne répond pas directement à la question et pourtant il la résout de la manière la plus profonde. Pour la troisième fois (versets 15 et 21), il dévoile, dans le cœur même de ceux qui l’aiment, les causes morales pour lesquelles il se manifeste à eux. C’était déjà dire clairement pourquoi il ne pouvait pas se révéler au monde qui le haïssait ; puis il annonce plus explicitement, au verset 24, la raison de sa manière d’agir.
Mais ici, aux grandes promesses qu’il venait de faire aux siens (versets 20 et 21), Jésus ajoute la déclaration expresse que la communion de l’âme avec Dieu résulte de son union avec lui, Jésus : Nous viendrons à lui et nous ferons notre demeure chez lui.
Dieu avait établi sa demeure visible au milieu d’Israël (Lévitique 26.11-12 ; Ézéchiel 37.26-28), il avait habité au milieu de son peuple par la Parole faite chair (Jean 1.14), maintenant il promet de faire de chaque fidèle sa demeure (même mot qu’au verset 2), son tabernacle, son temple (1 Corinthiens 3.16 ; 1 Corinthiens 6.19).
Verset 24
Les paroles de Jésus sont les paroles de Dieu même. Or, comment le Sauveur pourrait-il se manifester à celui qui ne l’aime pas et qui rejette ses paroles ?
Cette conclusion devait être évidente pour le disciple qui avait posé la question.
Verset 25
Il y a évidemment ici une pause dans le discours, comme l’indiquent ces mots qui ont l’air d’un résumé : Je vous ai dit ces choses (Verbe au parfait).
Jésus jette ainsi un regard en arrière sur les grandes consolations qu’offre aux siens l’espoir de la réunion future dans la maison du Père (verset 1 et suivants) et la perspective de son retour prochain par le Saint-Esprit (verset 12 et suivants).
En même temps, ces mots : pendant que je demeure avec vous, font pressentir son départ si prochain. Mais, se hâte-t-il d’ajouter, voici un puissant secours qui pourvoira à tout dans votre vie intérieure et dans vos travaux (verset 26).
Verset 26
L’aide (verset 16, note) venait d’être désigné comme l’Esprit de vérité (verset 17) ; ici Jésus le nomme l’Esprit-Saint.
C’est que la vérité divine n’est jamais, dans les Écritures, une froide doctrine destinée à éclairer l’intelligence seule, elle est une vie qui pénètre la conscience et le cœur et les sanctifie. En effet, l’Esprit qui crée cette vie en nous est saint, comme Dieu est saint.
Cet Esprit, mon Père l’enverra en mon nom, dit Jésus.
Qu’est-ce à dire ? Explications diverses : Parce qu’il prendra ma place auprès de vous, parce que les disciples demandent l’Esprit au nom de Jésus (verset 13), parce que Jésus le demande pour eux (verset 16), parce qu’il glorifiera le nom de Jésus qui est la source unique du salut ; parce que le Père envoie l’Esprit à ceux qui aiment Jésus et que Jésus aime (verset 23).
Ne peut-on pas réunir les éléments de vérité qu’il y a dans ces interprétations, en disant que le nom de Jésus est celui du Médiateur par lequel seul les croyants reçoivent toutes les grâces de Dieu et spécialement le don du Saint-Esprit ?
Cet Esprit vous enseignera toutes choses, c’est-à-dire, toutes les vérités relatives au salut (Jean 16.13), et, pour cela, il vous fera ressouvenir, il rendra lumineuses et vivantes en vous toutes les choses, toutes les paroles que je vous ai dites.
L’Esprit fait ressouvenir non seulement par la mémoire, mais par le cœur. De cette double déclaration de Jésus il résulte que l’Esprit n’enseigne point des choses étrangères à la parole du Sauveur, il enseigne, au contraire par cette Parole.
Il n’y a donc rien dans ce passage qui soit favorable à la doctrine catholique de la tradition ecclésiastique, élevée à côté ou au-dessus de la Parole, ni aux illusions du mysticisme qui rêve une illumination de l’Esprit supérieure à la Parole révélée. Jésus fonde, par cette promesse, la souveraine autorité de l’enseignement apostolique qu’il égale au sien (Jean 17.8-20).
Verset 27
Le Sauveur, pressentant toutes les difficultés et toutes les craintes qui pourront encore assaillir le cœur de ses disciples, leur fait part d’une grâce suprême, d’un bien sans lequel il n’y a point pour l’homme de bonheur, avec lequel il ne saurait jamais être malheureux : la paix.
Jésus fait allusion dans ces paroles à la formule de salutation par laquelle les Israélites s’abordaient ou se quittaient (comme Jean 20.26).
La plupart des commentateurs allemands prennent le mot de paix dans le sens de l’hébreu schalôm, bien-être, prospérité, salut et pensent que Jésus présente aux siens tous les fruits objectifs de son œuvre, en un mot, le salut éternel. Mais non, ce qu’il leur donne, c’est la paix intérieure d’une âme remplie d’une douce confiance en son Dieu Sauveur.
Ce sens est rendu évident, comme l’observe M. Godet, par les dernières paroles du verset : c’est le cœur des disciples qui doit être préservé du trouble, des tristesses et des craintes que leur inspirait la pensée de rester dans ce monde, seuls, sans leur céleste ami.
Il leur laisse donc la paix, comme le plus précieux des legs à son départ. Il fait plus : il leur donne actuellement et réellement sa paix, la paix inaltérable et profonde dont il jouissait lui-même et qu’il puisait constamment dans la communion de son Père. C’est ainsi qu’il leur fera part encore de sa joie (Jean 15.11 ; Jean 17.13), car tout ce qui est à lui appartient à ses rachetés.
À la rigueur, on pourrait, avec la plupart de nos versions, traduire ainsi ces mots : Je ne vous la donne pas comme le monde la donne, mais comme ce pronom n’est pas dans l’original et comme cette pensée supposerait que le monde peut, dans un sens quelconque, donner la paix, nous préférons laisser dans toute sa généralité ce contraste que Jésus établit entre sa manière de donner et celle du monde.
Le monde en est réduit à de vains souhaits, à de trompeuses promesses, souvent intéressées. Jésus donne réellement, abondamment et par l’amour le plus pur. Ces paroles devaient donc inspirer aux disciples la plus entière confiance en lui.
Jésus, à la fin du discours, revient ainsi à son point de départ (verset 1) ; mais c’est après avoir donné aux siens tous les secours les plus puissants pour dissiper le trouble et les craintes qui pouvaient encore assaillir leur cœur.
Verset 28
Les pauvres disciples n’avaient que trop bien entendu cette parole : je m’en vais (versets 2 et 12), mais ils avaient moins bien saisi celle-ci : je reviens à vous (versets 3 et 18) ; de là leur tristesse et leur trouble.
C’est pourquoi Jésus, plongeant un regard dans leur cœur, voudrait leur faire sentir que leur amour pour lui devrait leur faire de son élévation auprès du Père un motif de joie. Ils prendraient part à la joie qu’il éprouve lui-même de quitter ce monde de péché et de souffrance pour retourner auprès du Père et partager sa félicité et sa gloire.
C’est ici peut-être le seul passage des évangiles où Jésus pense à lui-même et tire de son propre repos le motif d’une exhortation.
Mais :
C’est ainsi également que Tholuck, R. Stier, MM. Luthardt, Weiss et d’autres exégètes comprennent cette belle pensée. Ceux qui (de Wette, Meyer) pensent que Jésus invite ses disciples à considérer l’intérêt qu’ils ont à son élévation, qui lui permettra de leur assurer une protection plus puissante (comparez Jean 16.7), ne tiennent pas compte de cette parole : si vous m’aimiez.
Parce que : il faut remarquer avant tout cette particule importante, car elle nous montre que Jésus, dans cette parole : le Père est plus grand que moi, donne simplement la raison pour laquelle ses disciples doivent se réjouir de son retour auprès de son Père.
En isolant cette déclaration de son contexte, on l’a sollicitée en sens divers pour éclairer par son moyen le mystère des relations du Fils avec son Père. Mais quel sujet de joie les disciples auraient-ils bien trouvé dans une théorie abstraite à laquelle ils n’auraient rien compris ? Jésus s’exprime ainsi, en ayant conscience qu’il est le Fils de Dieu, celui qui « a reçu du Père d’avoir la vie en lui-même » (Jean 5.26) et en même temps qu’il est « la Parole faite chair ».
Celui qui, « existant en forme de Dieu, s’est dépouillé lui-même en prenant une forme de serviteur fait à la ressemblance des hommes » et qui allait « s’abaisser encore en devenant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix » (Philippiens 2.6-8). Dans cette position qui était alors la sienne, il éprouvait en son âme sainte, comme l’observe Bengel, un sentiment profond de son humiliation qu’il ne pouvait s’empêcher d’exprimer parfois (Marc 10.18 ; Marc 13.32, voir la note) et qui le faisait soupirer après le terme de l’épreuve (Luc 12.50).
Comment donc n’aurait-il pas éprouvé une joie profonde et sainte à l’aspect si prochain de son élévation auprès du Père ? C’était pour lui rentrer en possession de la gloire éternelle, objet de sa dernière prière (Jean 17.5) ; c’était sa réintégration dans toutes les prérogatives divines dont il allait jouir dans une pleine communion d’essence et d’amour avec Dieu, son Père. Cette joie il invite ses disciples à la partager avec lui.
Obéissant à son invitation, l’apôtre Paul, après avoir décrit, dans les paroles que nous venons de rappeler, le profond abaissement du Sauveur, célèbre son élévation avec amour (Philippiens 2.9-11) et la joie qu’il exprime dans ce chant de triomphe est celle de l’Église tout entière (Éphésiens 1.20-23).
C’est à ce point de vue que Luther, Calvin, MM. Luthardt et Godet envisagent ce passage. « Christ, dit Calvin, ne compare point ici la divinité du Père avec la sienne, ni sa nature humaine avec l’essence divine du Père ; mais plutôt son état présent avec la gloire céleste dans laquelle il allait être reçu bientôt. C’est comme s’il disait : Vous désirez de me retenir dans le monde ; mais il vaut mieux que je monte au ciel ».
Quant à la divinité de Jésus-Christ, cette parole la proclame hautement ; car si un homme, un ange du ciel disait : Dieu est plus grand que moi, il émettrait une affirmation que son évidence même rendrait oiseuse. Il ne faut pas, quand Jésus nous parle de sa joie, que l’exégèse transforme cette joie en dogmatique.
Verset 29
Que vous croyiez que je m’en suis réellement allé à mon Père et que vous compreniez la nature spirituelle de mon règne.
Ces promesses si positives de Jésus, bientôt rendues vivantes dans leur cœur par le Saint-Esprit, leur seront expliquées par les grands événements de sa mort, de sa résurrection et de son retour dans la gloire. Alors ils croiront.
Verset 30
Le prince du monde (Jean 12.31, note) vient, s’approche.
Jésus le voit venir dans les misérables instruments dont il va se servir pour accomplir son œuvre de ténèbres (Jean 13.2-27). Mais il ajoute aussitôt : Tout prince du monde qu’il est, il n’a rien en moi, ni droit, ni pouvoir.
La mort même à laquelle Jésus va se soumettre sera parfaitement libre et volontaire (Jean 10.18) ; ce sera le sacrifice de son dévouement et de son amour. Pour parler ainsi, il fallait que Jésus eût la conscience de sa parfaite sainteté.
Verset 31
La mort libre et volontaire du Sauveur fera connaître au monde que le Fils aime le Père et agit selon son commandement.
Et c’est afin de fournir au monde cette démonstration éclatante que Jésus dit aux disciples : Levez-vous, partons d’ici, allons courageusement dans ce jardin de Gethsémané, notre lieu de réunion habituel (Jean 18.2), où je me livrerai à la troupe conduite par le traître !
Les deux derniers versets sont susceptibles de deux interprétations qui, pour le sens, reviennent au même. « Le prince de ce monde vient, et, à la vérité, il n’a rien en moi qui légitime le pouvoir qu’il va prendre sur moi, mais, pour que le monde connaisse mon amour pour le Père, je me livre à lui librement ». Ou bien : « Il vient, mais il n’a point de pouvoir sur moi ; néanmoins, pour que le monde connaisse… »
On peut aussi construire le verset 31 en mettant un point après : ainsi j’agis. Il faut alors sous-entendre un verbe : Mais cela arrive ainsi afin que le monde connaisse que j’aime le Père, et que, comme le Père m’a commandé ainsi j’agis.
Levez-vous, partons d’ici. La plupart des éditeurs du texte et des traducteurs préfèrent cette ponctuation. Mais celle que nous avons adoptée, avec Rilliet, Astié, M. Godet, est plus naturelle et donne une tournure plus vive à la parole de Jésus.
²Malgré l’ordre donné à ses disciples, Jésus continue ses discours (Jean 15.1) sans que rien indique un changement de scène. De là, parmi les interprètes, deux manières d’expliquer la situation.
Telle est aussi l’opinion de Lücke, Tholuck, Olshausen, Keil, MM. Luthardt, Weiss. D’autre part, Luther, Lange, Ebrard, Hengstenberg, Gess, M. Godet pensent que Jésus et ses disciples quittèrent, à ce moment, la salle où ils étaient assemblés et se rendirent dans quelque solitude de la vallée du Cédron, près de Gethsémané, où Jésus aurait prononcé les discours qui suivent, ainsi que sa dernière prière.
Cette opinion s’accorde difficilement avec Jean 18.1. On peut objecter aussi que si Jésus avait prononcé la prière sacerdotale (Jean 17) sur le chemin de Gethsémané et au moment d’arriver en ce lieu, il aurait passé presque instantanément de la paix profonde qui s’exprime dans cette prière aux terribles angoisses qu’il éprouva dans le jardin des Oliviers (Matthieu 26.37 ; Marc 14.33).
Cela n’est pas vraisemblable au point de vue psychologique. Cette supposition accroît la difficulté qu’il y a à concilier la relation de Jean avec ses récits des synoptiques.