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Bible Commentaries
Jean 11

La Bible Annotée de NeuchâtelLa Bible Annotée de Neuchâtel

versets 1-57

Verset 1

La résurrection de Lazare et la fin du ministère de Jésus (chapitres 11 et 12)

Versets 1 à 44 — La résurrection de Lazare

L’évangéliste décrit ainsi (versets 1 et 2) en quelques mots très simples, le lieu de l’événement dont il va faire le récit si plein de vérité, d’intimité et de grandeur.

Il nomme d’abord le malade qui sera l’objet du plus éclatant miracle du Sauveur, Lazare, abrégé de Éléazare qui signifie Dieu est le secours.

Il rappelle ensuite que ce malade était de Béthanie (voir sur ce nom Matthieu 21.17, note), village bien connu comme demeure de Marie et de Marthe. Notre évangéliste n’en a point encore parlé. Il suppose ses lecteurs instruits par la tradition apostolique.

Les deux sœurs, Marthe et Marie, étaient connues en particulier par le gracieux récit de Luc 10.38-42. C’est ainsi que l’Évangile de Jean et les synoptiques se complètent et se supposent mutuellement.

De ce que Marie est nommée la première, on a quelquefois conclu qu’elle était aînée, mais c’est à tort. On voit par les versets 5, 19 et 20 et surtout par le récit de Luc déjà cité, que Marthe avait dans la maison le rôle de la sœur aînée, si Marie occupe ici la première place, c’est qu’elle était la plus connue par le témoignage de vénération et d’amour qu’elle avait donné au Sauveur et que Jean va rappeler (verset 2).

Verset 2

Encore ici, Jean se réfère au récit des premiers évangélistes (Matthieu 26.6-16 ; Marc 14.3-9) au sujet d’un trait que lui-même va rapporter ci-après (Jean 12.1-8).

Verset 3

Ce message des deux sœurs que Jean a conservé dans les termes mêmes qu’elles avaient employés, est plein, à la fois, de confiance et de délicatesse.

Elles ne demandent rien, elles se bornent à faire connaître à Jésus la maladie de leur frère, qui les remplit d’inquiétude, bien convaincues que ce mot de tendre affection : celui que tu aimes, suffira pour amener le Sauveur à leur secours. En effet, Jésus, en parlant de Lazare, ratifiera cette expression de son attachement pour lui (verset 11).

Verset 4

Point à la mort ? Jésus se serait il trompé ? Il faudrait, pour le penser, connaître bien peu sa manière énigmatique et profonde de parler (comparer Matthieu 9.24).

Dès ce moment, il savait ce qui allait se passer à Béthanie (versets 11 et 14).

Ce qu’il veut dire, c’est que la mort ne sera pas le résultat définitif de cette maladie. Elle en aura un tout autre, la gloire de Dieu c’est-à-dire la manifestation de sa puissance et de son amour, par le triomphe de la vie sur la mort (Romains 6.4).

Et cette gloire resplendira sur le Fils de Dieu par qui le Père révèle toutes ses perfections et opère toutes ses œuvres (comparer Jean 9.3 ; Jean 10.30-38).

Jésus reviendra (verset 40) sur cette pensée de la gloire de Dieu, qui est le but suprême de tout ce récit et de toute l’œuvre du Sauveur (Jean 17.4).

Cette grande parole pouvait soutenir les deux sœurs affligées jusqu’à l’arrivée du Sauveur. Elles devaient, quand elles verraient mourir leur frère, rattacher à cette parole l’espérance qui se manifesta réellement dans le cœur de Marthe (verset 22). En même temps cette déclaration pouvait préparer les disciples de Jésus et tous ceux qui l’écoutaient, au miracle qui allait s’accomplir. C’est ce qui ressort de ce terme général : il dit, il dit à tous et non il répondit au messager de Marthe et de Marie.

Verset 5

« Heureuse famille ! » s’écrie Bengel.

Jésus avait pour chacun de ses membres cet attachement particulier, dont Jean connaissait lui-même tout le bonheur (Jean 13.23).

Mais quelle est l’intention de l’évangéliste, en plaçant ici cette parenthèse ?

On a résolu cette question de diverses manières : soit en rattachant la parenthèse au verset 3, comme confirmation de la parole des deux sœurs, celui que tu aimes (Bengel, de Wette), soit en y voyant le motif de la promesse du verset 4 (Meyer) ; soit en pensant que l’évangéliste, dans un sentiment très délicat, ne veut pas qu’on puisse interpréter comme de l’indifférence de la part de son Maître ce qu’il va raconter au verset 6.

« Sa manière d’agir s’explique au contraire par son amour pour tous les membres de cette famille » (Luthardt) ; soit enfin et c’est l’interprétation qui nous paraît la plus juste, en considérant cet amour de Jésus comme la cause de sa courageuse résolution (verset 7) de retourner en Judée (Godet, Weiss) : la remarque du verset 5 prépare la parole que Jésus prononce au verset 7.

Verset 6

Ce mot lors donc reprend la narration interrompue par la remarque du verset 5.

Mais pourquoi Jésus différa-t-il son départ pendant ces deux jours que les sœurs de Lazare durent passer dans l’angoisse ?

Question difficile, que l’exégèse rationaliste s’est hâtée d’exploiter contre la vérité historique de notre récit, en attribuant ce délai à un calcul de Jésus qui voulait laisser mourir Lazare, afin d’avoir l’occasion de le ressusciter. Le verset 15 interdit cette supposition.

Dire, avec Calvin et Olshausen que ce devait être là, pour les deux sœurs, l’épreuve de leur foi ; ou, avec Lücke et Tholuck, que Jésus était retenu dans la Pérée par les travaux de sa mission (Jean 10.41-42), ne suffit pas à expliquer ce procédé de la part de Celui que nous allons voir ému de compassion pour ses amis affligés ; et d’ailleurs le texte n’indique rien de pareil.

La seule explication que celui-ci nous présente se trouve dans la parole du verset 15, ou Jésus se réjouit, comme d’une dispensation providentielle, de ce qu’il n’était pas à Béthanie au moment où Lazare mourut. Il suivit donc, en ceci, comme dans toute sa vie, la direction intérieure de son Père, dont il faisait toujours la volonté (Jean 8.28-29).

Verset 7

Jésus n’ignorait pas ce qui s’était passé à Béthanie (verset 11), le moment de Dieu était donc venu ; mais en parlant de retourner (grec aller de nouveau) en Judée et de s’exposer ainsi aux plus imminents dangers, il provoqua dans le cœur de ses disciples des objections et des craintes qu’il s’efforça de dissiper (verset 8 et suivants).

Verset 8

Il s’était passé peu de temps entre le moment actuel et la scène décrite au Jean 10.31 (comparez Jean 8.59) ; les disciples étaient encore remplis de crainte, non seulement pour eux-mêmes, mais pour le Maître qu’ils aimaient. Ils auraient donc voulu le retenir dans la Pérée, au-delà du Jourdain, où il était en sûreté.

Verset 9

Cette parole destinée à rassurer les disciples renferme une image dont il est fait une double application.

D’abord, les douze heures du jour représentent le temps assigné à notre vie, pendant lequel nous devons accomplir la tâche qui nous est donnée, car « la nuit vient en laquelle nul ne peut travailler » (Jean 9.4).

Celui qui marche ainsi de jour, ne court aucun danger de se heurter, de broncher, parce qu’il, est éclairé par la lumière de ce monde, c’est-à-dire, la lumière du soleil, qui mesure les douze heures. Mais au-delà de ce temps déterminé, il n’y a plus que ténèbres et dangers.

Quelques interprètes (Meyer) ne veulent voir dans cette image que l’idée du temps assigné à chacun ; et Jésus, se l’appliquant à lui-même, en ce moment, aurait voulu dire simplement :

Le temps que Dieu a assigné à mon activité n’est pas encore passé, tant qu’il dure, nul ne peut me nuire ; mais quand il sera écoulé, je tomberai entre les mains de mes ennemis.

Serait ce là toute la pensée du Sauveur ? Se servirait il de ce terme : se heurter ou broncher, pour indiquer la mort qui l’attend ? Et que signifierait cette expression : la lumière n’est point en lui ?

Non, évidemment Jésus emploie l’image, en outre, au sens moral d’obéissance à la vocation reçue, d’accomplissement de la volonté de Dieu. Celui qui pratique cette obéissance, qui agit selon la volonté de Dieu, qui marche à la lumière de son Esprit, est en sûreté, même au milieu des dangers, mais, hors de là, il n’y a pour l’homme qu’occasions de chutes, au sein des ténèbres parce qu’aucune lumière ne l’éclaire intérieurement ni ne luit sur sa route : la lumière n’est point en lui ni autour de lui. Les disciples feront plus tard, mieux encore que dans le moment actuel l’expérience de cette profonde vérité.

Telle est l’interprétation entrevue déjà par les Pères, soutenue par Calvin et par plusieurs commentateurs modernes.

Verset 11

Grec : Lazare s’est endormi et dort (verbe au parfait).

Douce image qui signifie que, pour les hommes pieux, la mort est un repos après le travail du jour, un sommeil qui sera suivi du réveil (Matthieu 9.24 ; Actes 7.60 ; 1 Corinthiens 15.20 ; 1 Thessaloniciens 4.13).

« Langage céleste ! » s’écrie Bengel ; et cet auteur ajoute au sujet de ce mot, notre ami : « Avec quelle tendresse tout humaine Jésus associe ses disciples à son amitié pour Lazare ! »

Jésus emploie aussi ce terme en réponse à la déclaration des deux sœurs : (verset 3) « celui que tu aimes est malade. »

Verset 12

Sauvé du danger, de la mort.

Les disciples qui, selon leur habitude, ont compris la parole du Maître dans son sens littéral, pensent que ce sommeil est le signe d’une crise favorable, ainsi qu’on l’observe très souvent dans les maladies et ils s’emparent de cette idée, comme d’un argument nouveau, pour empêcher leur Maître d’aller en Judée.

On a trouvé un tel malentendu impossible. Il est sûr que les disciples ne pouvaient penser sérieusement que Jésus allait faire ce voyage pour réveiller Lazare d’un sommeil naturel : mais dans l’ardent désir de retenir leur Maître et convaincus, d’après le verset 4, que Lazare ne mourrait pas, ils s’arrêtent uniquement à l’idée de son sommeil et n’attachent aucune importance à ce mot mystérieux : je vais l’éveiller.

Verset 13

Grec : du dormir du sommeil, c’est-à-dire d’un sommeil naturel.

Verset 14

Lazare est mort ! Ce fut avec émotion que Jésus prononça ces paroles et les disciples eux-mêmes durent y trouver la raison puissante que leur Maître avait d’aller au secours de la famille en deuil.

On voit encore ici, comme aux versets 4 et 11 que Jésus savait, par une science divine, tout ce qui se passait à Béthanie, car c’est à tort, selon nous, que quelques interprètes pensent qu’il venait de recevoir un second message, lui apprenant la mort de son ami.

Verset 15

Si Jésus avait été à Béthanie, il aurait guéri Lazare et le plus grand de ses miracles n’aurait pas eu lieu.

Il est digne de l’honneur divin que nous ne lisions pas que jamais personne soit mort en présence du Prince de la vie. Si donc nous croyons que, Jésus présent, Lazare ne serait pas mort, la parole des deux sœurs (versets 21 et 32) se revêt d’un sens d’autant plus sublime, c’est ce qui explique la joie du Seigneur d’avoir été absent.— Bengel

Si le Sauveur se réjouit, même dans sa tristesse actuelle, c’est, dit-il à ses disciples, à cause de vous, afin que vous croyiez, afin que votre foi soit affermie et développée par le grand miracle dont vous serez témoins.

Ce dernier terme en effet ne signifie pas que jusque-là les disciples n’eussent pas cru en lui mais indique un nouveau degré de leur foi (comparer Jean 2.11 ; Jean 16.31 ; Jean 20.31).

À chaque développement nouveau de la foi, où nous ne parvenons que par de rudes combats, il nous semble que jusque-là nous n’avions point encore cru.

Verset 16

Le nom hébreu de Thomas signifie Jumeau, en grec Didyme et c’est par son nom ainsi traduit que Thomas était connu des chrétiens de l’Asie Mineure pour qui Jean écrivait.

Thomas, voyant (donc) que son Maître ne se laissait retenir par aucun argument et bien convaincu qu’en se rendant, en Judée il allait au devant de la mort, prend brusquement une résolution désespérée dans laquelle, comme l’observe M. Godet, il y avait « plus d’amour pour la personne de Jésus que de foi en la sagesse de ses démarches ».

C’est bien le même homme que nous retrouvons ailleurs, dans notre évangile, mais sombre, enclin au doute, s’attachant au présent, au visible, incapable de saisir par la foi l’avenir, l’invisible (Jean 14.5 ; Jean 20.25).

Cette conséquence, nullement calculée, dans le rôle des personnages secondaires, est, comme l’a admirablement développé Luthardt l’un des traits les plus frappants du récit de Jean et l’une des meilleures preuves de la vérité historique de cet écrit.— Godet

Verset 17

Arrivé près de Béthanie, où il n’entra pas tout de suite (verset 30).

Tischendorf retranche déjà, sur la foi de A, D, plusieurs versions. Les autres critiques le maintiennent.

Pour se rendre compte de ces quatre jours, on admet généralement que Lazare mourut le jour même où Jésus reçut le message de ses sœurs dans la Pérée, au-delà du Jourdain (Jean 10.40) c’est-à-dire à un distance de dix lieues au moins.

Jésus étant resté, là encore deux jours (verset 6) et ayant ensuite mis une journée pour se rendre à Béthanie n’y arriva qu’à la fin du quatrième jour. Et comme les Juifs déposaient leurs morts dans la grotte sépulcrale le jour même du décès, il y avait bien quatre jours que Lazare y reposait.

Verset 19

Cette remarque de l’évangéliste sur la distance de Jérusalem à Béthanie (15 stades, trois kilomètres environ) n’a d’autre but que d’expliquer comment beaucoup de Juifs avaient pu venir offrir leurs condoléances aux deux sœurs en deuil. Il ressort de ce détail que la famille de Lazare était bien connue à Jérusalem et y jouissait de quelque considération.

Comme l’auteur de cet Évangile connaît bien lieux et distances !

Verset 20

Marthe, active au dehors jusque dans son affliction, apprend la première l’arrivée de Jésus ; et sans même en avertir sa sœur, elle s’élance au-devant de lui.

Marie, plongée dans sa douleur, reste assise à la maison.

Ce sont précisément là les caractères divers que Luc (Luc 10.38-42) prête aux deux sœurs.

Verset 21

Comparer verset 32, note.

Quelle confiance en la puissance de Jésus exprime cette première parole de Marthe ! Ce n’est pas un reproche, pas même une plainte, mais un profond regret ; car elle est bien persuadée qu’en présence du Sauveur la mort n’aurait eu aucun empire sur son frère (verset 15, note). Mais elle s’élève plus haut encore.

Verset 22

Non seulement la foi de Marthe est assez forte pour être assurée que Jésus présent aurait guéri son frère, mais (ce mais, qui se lit dans le texte reçu, manque dans Codex Sinaiticus, B, C) maintenant même qu’il est mort et que, humainement parlant, tout est bien fini, elle sait que la prière de son Sauveur sera toute-puissante auprès de Dieu.

Tout ce que tu demanderas : Marthe comprend-elle, dans ce tout, même le retour de son frère à la vie ? Elle ne le dit pas. Mais cet espoir se trahit dans ses paroles. Il se fondait sur la déclaration du Sauveur (verset 4), qui avait certainement été rapportée textuellement aux deux sœurs. Cette promesse doit se réaliser d’une manière ou d’une autre.

Marthe le croit fermement, mais sans oser formuler l’objet de son attente elle s’en remet avec une pleine confiance à la sollicitude de son céleste ami et à la toute-puissance de Dieu, dont elle prononce par deux fois le nom auguste.

Verset 23

Il y avait déjà pour Marthe une grande consolation dans cette parole : Ton frère ressuscitera et nous savons bien dans quel sens Jésus la prononçait (verset 11).

Mais, pour Marthe, elle pouvait avoir deux significations très différentes : la délivrance actuelle de son frère, qui lui serait rendu immédiatement, ou sa résurrection au dernier jour.

C’est à dessein que Jésus emploie ce terme à double entente, afin de solliciter cette âme croyante à s’élever au-dessus d’un intérêt actuel et personnel jusqu’à la source de la vie qui s’offrait à elle en Celui qui lui parlait (verset 25).

Verset 24

Des deux espérances que pouvait présenter à Marthe la parole de Jésus, elle s’attache à la plus faible, la plus lointaine, la résurrection au dernier jour.

Il semble donc qu’ici sa foi soit moins courageuse qu’au verset 22. Mais est il bien sûr qu’il ne lui reste que de la tristesse (Luthardt), ou même que la résignation d’un grand mécompte (Meyer) ?

Ne peut-on pas penser, avec de Wette, qu’en prononçant cette parole qui exprimait le moins, l’esprit pénétrant de cette femme angoissée interrogeait les regards de Jésus pour y découvrir le plus ?

Verset 25

Marthe n’ayant pas osé saisir la promesse de Jésus (verset 23) dans toute sa réalité actuelle, cherchait dans un avenir lointain la résurrection et ses consolations (verset 24). Jésus la ramène au présent et à sa personne, en lui disant : C’est moi.

Lui, en effet, est la résurrection, parce qu’il est la vie (Jean 14.6 ; Colossiens 3.4) ; il l’est en lui-même, et, dans ses rachetés, la résurrection ne sera que le dernier épanouissement de la vie impérissable qu’il leur a communiquée (comparer Jean 6.54, note).

Jésus fait immédiatement l’application de cette profonde vérité, en ajoutant que celui qui croit en lui, qui a puisé en lui la vie de la foi, quand même il serait mort comme Lazare, vivra d’une vie éternelle sur laquelle la mort n’a point d’empire.

Après cette grande affirmation, Jésus exprime la même vérité d’une manière négative, pour ceux qui vivent encore sur cette terre : Quiconque vit et croit en moi, alors même qu’il subira la dissolution du corps, ne mourra jamais.

Il y a ici une double négation qui signifie : ne mourra certainement jamais. C’est ainsi que traduit Rilliet.

Tout pour Marthe, dépendait de sa foi au Sauveur, tel qu’il se révélait à elle. De là la question directe et pénétrante qu’il lui adresse : Crois-tu cela ?

Verset 27

Marthe, en présence de Jésus et sous l’impression de sa parole, sent sa foi s’affermir et grandir ; elle répond sans hésiter : Oui, Seigneur !

Et la preuve qu’elle a maintenant compris que le vrai objet de sa foi et de toutes ses espérances se concentre dans la personne du Sauveur, c’est qu’elle le confesse lui (grec) : Moi je crois (verbe au parfait, exprimant un fait accompli et permanent, comme Jean 6.69) que toi tu es le Christ, le Fils de Dieu.

Par le premier de ces titres, Marthe reconnaît en Jésus le Messie, l’Oint de Dieu, le Libérateur promis à son peuple ; par le second, elle confesse en lui un être qui est avec Dieu dans le rapport tout spécial d’un fils à son père et qui, comme tel, est véritablement « la résurrection et la vie » (comparer Jean 6.69).

Le dernier qualificatif appliqué par Marthe à Jésus ne constitue pas un troisième titre, parallèle aux deux autres. Il est donc inexact de le rendre par : Celui qui devait venir (comparer Jean 6.14).

Il y a en grec un participe présent. On doit donc traduire : qui vient dans le monde, qui doit venir, d’après la promesse divine et qui vient en effet.

Cette expression est constamment appliquée au Libérateur promis dans les Écritures et qui, selon la foi des Israélites croyants, vient certainement (Matthieu 11.3, note).

Verset 28

Jésus, après avoir amené Marthe à s’appuyer sur le seul fondement qui pût la soutenir et la consoler, met fin à l’entretien et l’invite à faire venir sa sœur qu’il voulait voir pour la préparer aussi aux grandes scènes qui vont se dérouler. C’est ce qui ressort clairement de ce mot : il t’appelle.

Marthe s’acquitta de cette mission avec empressement, mais en secret. Elle voulait que Marie seule fût avertie de l’arrivée du maître et qu’elle pût le voir en particulier, comme elle-même en avait eu le privilège.

Verset 29

Ces verbes au présent rendent vivement l’empressement de Marie. La plupart des critiques adoptent les variantes : Elle se leva (Codex Sinaiticus, B, C, D), et elle venait (Codex Sinaiticus, B, C). Tischendorf maintient, avec raison, le présent pour les deux verbes.

Verset 30

Jésus n’était entré ni dans le village, ni, par conséquent, dans la maison mortuaire, où certainement son cœur l’attirait ; c’est qu’il savait qu’il y avait là beaucoup de monde et qu’il voulait voir sans témoins les sœurs affligées.

Verset 31

Puisque ces hommes étaient venus dans l’intention de consoler Marie, ils ne voulaient pas la laisser aller seule au sépulcre, où ils pensaient qu’elle se rendait pour pleurer.

Ils ignoraient l’impuissance des consolations humaines et ne savaient pas que cette âme en deuil allait trouver le seul vrai consolateur.

Verset 32

Verset 21 note. Les deux sœurs expriment les mêmes douloureux regrets. Il est probable qu’avant l’arrivée de Jésus elles s’étaient communiqué cette pensée : qui les hantait dans leur affliction.

Leur exclamation, qui paraît identique dans la traduction française, présente en grec une double nuance :

  1. Marthe (verset 21) dit, d’après le texte reçu (A, majuscules) : « il ne serait pas, en ce moment, à l’état de mort ; » Marie : (verset 32) « il n’aurait pas accompli l’acte de mourir ».
  2. Le pronom possessif mon frère est placé en tête de toute la phrase dans la parole de Marie ; il ne vient qu’à la fin dans celle de Marthe.

La douleur de Marie est plus personnelle plus égoïste, plus désespérée aussi. La différence entre leurs deux caractères se montre du reste dans leur attitude. Marie, tout entière à sa douleur, ne peut que se laisser tomber aux pieds de Jésus et laisser couler ses larmes sur la mort de son frère (verset 32), sans ajouter, comme l’avait fait Marthe (verset 22), aucune parole d’espérance.

Si l’on compare ce tableau avec celui que nous a retracé ; Luc (Luc 10.38 et suivants) et Jean lui-même (Jean 12.1 et suivants), on est frappé de la vérité intime qui se révèle dans la peinture de ces caractères, ils sont évidemment pris dans la vie.

En présence d’un tel accablement, Jésus ne prononce aucune parole de consolation. Sa profonde sympathie (versets 33-35) et son action divine seront seules assez puissantes pour relever cette âme défaillante.

Verset 33

Le donc présente l’émotion comme l’effet de la douleur de Marie et des pleurs des Juifs.

Le terme de l’original que toutes les versions rendent, ici et au verset 38, par ce mot : il frémit en son esprit, signifie que Jésus éprouva alors, dans la profondeur la plus intime de son être, une violente indignation.

Si l’on examine avec soin les autres passages du Nouveau Testament où ce mot se retrouve (Matthieu 9.30 ; Marc 1.43 ; Marc 14.5), on se convaincra qu’il implique toujours l’idée de vive désapprobation.

Mais qu’est-ce qui cause ce frémissement dans l’âme du Sauveur ? Et s’il va jusqu’à l’indignation, contre qui l’éprouve-t-il ?

D’après Chrysostome et plusieurs Pères, Jésus s’indignerait contre lui-même de ce qu’il ne peut maîtriser son émotion ! Ou de ce qu’il n’a pas pu épargner ce grand deuil à ses amis !

D’après Erasme, Keim, M. Holtzmann et d’autres, ce serait leur manque de foi ou l’incrédulité des Juifs qui encourraient sa réprobation.

D’après Meyer et M. Weiss, Jésus voit pleurer Marie ; il voit pleurer les Juifs qui l’entourent et le contraste entre la douleur de la première et les condoléances hypocrites des seconds excite son indignation.

D’après M. Godet celle-ci serait bien provoquée par les Juifs de l’entourage de Marie, mais en tant que Jésus voit en eux les traîtres (comparez Jean 13.21) qui prendront occasion de la plus belle de ses œuvres (Jean 10.32) pour le dénoncer et précipiter le moment de sa mort (versets 46-53).

Le plus simple et le plus naturel nous paraît être de supposer que ce frémissement d’indignation était excité en Jésus par la vue de la mort et des maux qu’elle cause et par l’approche de l’ennemi qui en est l’artisan cruel (Jean 8.44).

C’est pourquoi ce frémissement se renouvelle au moment ou Jésus se rend au sépulcre (verset 38).

C’est à peu près ainsi que beaucoup d’interprètes, Calvin, Olshausen, Tholuck, Ebrard, Luthardt Hengstenberg, Keil, Astié, s’expliquent cette scène mystérieuse de la vie de Jésus.

Quelques interprètes relèvent le fait que le grec porte non : il fut troublé, mais : il se troubla il s’émut lui-même ; l’évangéliste aurait choisi cette tournure pour écarter l’idée que Jésus aurait subi une secousse irréfléchie.

Verset 34

C’est aux sœurs de Lazare ou à ceux qui les entouraient que Jésus adresse cette question et ce sont eux qui lui répondent.

Verset 35

Jésus pleure avec ceux qui pleurent.

Au verset 33 se trouve un mot qui signifie pleurer des yeux et de la voix avec des sanglots, ici est un terme différent dont le sens est verser des larmes, larmes silencieuses qui coulent sur le visage de Jésus, provoquées par une profonde et douloureuse sympathie pour ses amis (verset 36).

En présence de cette scène, on s’arrête, on contemple avec émotion et l’on se dit : c’est bien là Celui qui a été fait semblable à ses frères en toutes choses, afin qu’il fût un souverain sacrificateur miséricordieux, il peut avoir compassion de nos infirmités, parce qu’il a été tenté comme nous, en toutes choses, sans péché (Hébreux 2.17 ; Hébreux 4.15).

C’est une chose étrange que ce soit l’Évangile dans lequel est affirmée avec le plus d’éclat la divinité de Jésus qui nous fasse aussi le mieux connaître le côté profondément humain de sa vie dit M. Godet et il ajoute que ce trait prouve combien peu un tel Jésus est l’enfant de la spéculation.

Verset 36

Donc, à la vue de ces larmes de Jésus, ces hommes ont tout naturellement la preuve de son profond amour pour Lazare et eux-mêmes en sont émus.

Verset 37

La réflexion de ces quelques-uns est toute naturelle.

La guérison de l’aveugle né, qui est encore toute fraîche dans leur souvenir (Jean 9.1 et suivants), était, à leurs yeux, plus difficile à opérer que celle de Lazare malade.

Mais quel sentiment leur inspire cette question ? Venant immédiatement à la suite des paroles pleines de sympathie qui précèdent, il paraît naturel d’y voir l’expression d’un intérêt bienveillant et du regret sincère que Jésus n’ait pas guéri le frère de Marthe et de Marie.

Un grand nombre d’excellents interprètes voient cependant dans ces paroles un sentiment d’hostilité contre Jésus, une insinuation de son impuissance. Meyer, MM. Weiss et Godet vont jusqu’à prétendre que ces hommes voient dans les larmes de Jésus une preuve de son impuissance et nient la guérison de l’aveugle-né.

Ils expliquent par cette manifestation d’incrédulité et de haine le nouveau frémissement de Jésus verset 38.

Cette interprétation procède de l’idée que les mêmes interprètes se sont faite, en général, au sujet des amis de la famille de Lazare, venus de Jérusalem pour partager le deuil de ses sœurs.

Parce que Jean les appelle des Juifs (versets 19, 31 et 36), terme par lequel il désigne ordinairement les chefs de la théocratie ennemie de son Maître (Jean 1.19, note) et parce que le verset 46 nous montre quelques-uns d’entre eux allant raconter aux pharisiens le miracle de Béthanie, les mêmes interprètes en concluent que ces hommes étaient, pour la plupart, des adversaires du Sauveur.

Est-ce bien là l’impression que veut produire l’évangéliste ? Ne nous dit-il pas deux fois (versets 19 et 31) que ces visiteurs étaient venus pour « consoler » les sœurs en deuil ? Ne nous les montre-t-il pas pleurant avec elles (verset 33) et admirant l’amour de Jésus pour Lazare ? (verset 36).

Enfin et surtout, ne nous apprend-il pas (verset 45) que beaucoup d’entre eux (même terme qu’au verset 19), sous l’impression du miracle, crurent en Jésus ?

C’est donc, ce nous semble, introduire une note fausse dans ce beau récit que de représenter ces amis de la famille de Béthanie comme des adversaires de Celui qu’elle aimait. Et comme, dans notre verset, il n’y a pas un mot qui suppose de la malveillance nous concluons avec Lücke, Tholuck, de Wette et d’autres, qu’on peut voir plutôt dans la réflexion qui nous est rapportée un sympathique intérêt.

Verset 38

Cette violente émotion de l’âme du Sauveur se renouvelle au moment suprême où il vient au sépulcre et par les mêmes causes que nous avons exposées au verset 33.

Les interprètes dont nous n’avons pu admettre les vues pensent, encore ici, que Jésus frémit d’indignation contre les Juifs à cause de leurs paroles (verset 37), ils se fondent sur cette particule donc qui leur paraît relier les deux versets.

Mais Jean reprend simplement par ce mot son récit interrompu ; Jésus a demandé : Où l’avez-vous mis ? On lui a dit : Viens et vois. Il vient donc au sépulcre, de là son émotion.

On voit maintenant encore en Palestine, autour de Jérusalem et ailleurs, de nombreux tombeaux taillés dans le roc et dont une pierre ferme l’entrée (comparer Jean 20.1 ; Matthieu 27.60).

À Béthanie même on montre aux voyageurs un sépulcre de Lazare, mais cette tradition est plus qu’incertaine. On peut traduire : placée dessus ou devant, car, suivant la forme du sépulcre, on y entrait de plain-pied ou l’on y descendait par un escalier.

Verset 39

Il y a quelque chose de solennel dans cet ordre. Sûr de ce qu’il va faire Jésus commande à ses alentours comme il va commander à la mort.

De ce qu’il est là depuis quatre jours, Marthe conclut que la corruption du corps doit avoir commencé et par le sentiment naturel et instinctif d’horreur qu’inspire un tel spectacle, elle voudrait en épargner la vue à Jésus et à elle-même.

C’est ce que l’évangéliste fait délicatement sentir par ce mot touchant : La sœur du mort.

D’ordinaire on considère la parole de Marthe comme une preuve que la confiance dont elle était animée à l’arrivée du Sauveur (verset 22) et même la foi qu’elle avait professée peu après (verset 27), défaillirent en présence du tombeau.

Il est probable qu’elle ne croyait pas à la résurrection immédiate de son frère. Jésus du reste s’était présenté à elle comme la résurrection et la vie (verset 25), mais il ne lui avait pas dit expressément qu’il allait rappeler son frère d’entre les morts ; elle pouvait donc en douter à ce moment, sans que sa foi au Sauveur, qui élevait son âme au-dessus de la vie et de la mort, eût subi aucune atteinte.

Verset 40

Jésus rappelle ainsi à Marthe sa grande affirmation (versets 25 et 26) ; mais il se sert pour cela des termes qu’il avait employés dans son premier message aux deux sœurs : (verset 4) la gloire de Dieu, sa puissance et sa miséricorde allaient se manifester avec éclat par le triomphe de la vie sur la mort.

Mais pour la voir, cette gloire, pour en être pénétrée, consolée, fortifiée, il fallait que Marthe crût ; la foi seule saisit l’invisible.

Sans la foi, alors même que Marthe aurait revu son frère vivant, elle n’aurait pas vu la gloire de Dieu.

Verset 41

Le texte reçu ajoute : du lieu ou le mort était couché, ces mots, omis par Codex Sinaiticus, B, C, D, sont inutiles.

Jésus leva les yeux en haut, au-dessus de la mort, vers la source de la vie, au-dessus de la terre, vers le ciel qui, pour lui, n’était pas un ciel vide (Jean 17.1).

Cette action de grâce prononcée à l’avance et surtout ces mots : tu m’as exaucé, supposent-ils que Jésus avait, avant ce moment, élevé son cœur à Dieu, par une prière silencieuse ? Ou expriment-ils seulement la certitude actuelle que Dieu allait déployer par lui sa toute-puissance ?

On a soutenu l’une et l’autre de ces interprétations et l’une et l’autre peuvent être vraies. Quoi qu’il en soit il ne faut pas oublier que, dès la première annonce de la maladie de Lazare, Jésus savait qu’elle aurait une issue qui serait à la gloire de Dieu (verset 4).

Verset 42

Pourquoi Jésus a-t-il prononcé à haute voix et devant tous son action de grâce ?

Non pas parce qu’il aurait considéré le miracle que Dieu lui donnait d’accomplir comme une chose nouvelle, inattendue ou extraordinaire dans sa vie. Dieu qui l’exauçait toujours, parce qu’il vivait avec lui dans une communion intime, avait souvent opéré par lui des actes de sa puissance, en répondant à ses prières. Sa mission habituelle était de manifester les perfections de Dieu dans notre humanité déchue.

Mais cette grande vérité, il fallait que la foule qui l’entourait la comprit et en fût pénétrée ; sans cela le plus grand des miracles de Jésus n’aurait été, à ses yeux, qu’un prodige propre à exciter son étonnement et n’aurait point créé en elle la vraie foi. Or, le désir ardent de Jésus, c’est qu’elle soit amenée par ce miracle à le reconnaître comme l’envoyé de Dieu, le Sauveur.

L’effet de la guérison de l’aveugle-né avait été annulé par cette affirmation des adversaires : une œuvre accomplie en violation du sabbat ne peut être de Dieu.

C’est pourquoi, avant de ressusciter Lazare, Jésus prend Dieu à témoin, le met en demeure de lui accorder ou de lui refuser sa demande, l’institue garant de l’œuvre qu’il va accomplir (Luc 5.22-24 ; comparez 1 Rois 18.36). Il écarte ainsi par avance tous les obstacles qui pourraient arrêter le développement de la foi chez ceux qui l’entourent.

Ce but si élevé et si saint de sauver les âmes aurait dû prévenir, ce semble, l’objection de certains exégètes qui trouvent étrange que Jésus adresse à Dieu des paroles qui ont l’air d’une réflexion plutôt que d’une prière. Ce n’est pas une prière en effet, mais un témoignage rendu à la vérité et distinct de l’action de grâce prononcée d’abord (verset 41), en présence de ce tombeau, où la vie allait triompher de la mort.

Verset 43

Grec : Lazare, ici, dehors ! Il n’y a point de verbe dans cette phrase, c’est une exclamation puissante, ayant le sens d’un ordre, d’un appel adressé au mort et qui le fait renaître à la vie.

Telle fut l’œuvre de la Parole de « Celui qui fait revivre les morts et appelle les choses qui ne sont point comme si elles étaient » (Romains 4.17).

C’est cette même Parole qui retentit à l’origine des choses : Que la lumière soit ! (Genèse 1.3-4).

Verset 44

Les anciens ensevelissaient leurs morts en enveloppant de bandes de toile le corps et chaque membre à part. Lazare rendu à la vie, put sans difficulté marcher et sortir.

Il ne faut donc pas voir, avec quelques Pères, un nouveau miracle dans ce fait. Mais il n’eut toute la liberté de ses mouvements qu’après l’exécution de cet ordre : Déliez-le et le laissez aller.

Et c’est alors que parut évidente aux yeux de tous la grande parole de Jésus à Marthe : « Je suis la résurrection et la vie ! »

Le récit de la résurrection de Lazare porte tous les caractères de la vérité historique, non seulement dans l’enchaînement des faits extérieurs, mais jusque dans les nuances psychologiques les plus délicates qui sont observées dans les sentiments manifestés par les personnages de ce drame émouvant.

Malgré cela, on devait s’attendre à ce que les théologiens rationalistes, dont la philosophie a décidé que tout miracle est impossible, ne trouvassent, dans ce chapitre, qu’un sujet nouveau d’exercer leur critique négative.

Pour plusieurs, Lazare n’était mort qu’en apparence et fut ranimé par la fraîcheur du tombeau ou par les parfums aromatiques dont il était entouré.

On ne manquera pas d’appliquer la même explication fantaisiste à la résurrection de Jésus-Christ lui-même.

Elle a paru trop grossière aux historiens modernes qui, depuis Strauss et selon son système, trouvent dans cette histoire un mythe, un récit fictif destiné à illustrer cette thèse métaphysique : « Je suis la résurrection et la vie » (Baur), ou suivant les plus récents (Keim, Schenkel, Holtzmann), la parabole du mauvais riche et de Lazare, racontée par Jésus aurait été transformée par la tradition et aurait donné naissance à notre histoire !

Pour l’exégète qui admet la réalité du miracle se présente une question : c’est celle du silence des évangiles synoptiques. Comment se fait-il qu’ils n’aient pas rapporté ce miracle, qui, selon notre évangile, eut une si grande influence sur la catastrophe par laquelle allait se terminer la vie de Jésus ?

On a répondu que les premiers évangélistes se sont tus par un ménagement délicat pour la famille de Lazare, qui pouvait vivre encore et qui était devenue l’objet de la haine et des desseins meurtriers des ennemis (Jean 12.10).

On a répondu encore (Meyer, Luthardt) que les trois premiers évangiles sont ici en parfait accord avec leur plan général, suivant lequel ils ont voulu ne raconter que le ministère de Jésus en Galilée et sa fin tragique à Jérusalem.

On a répondu enfin que, à son origine, la tradition apostolique, toute remplie de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ, n’avait recueilli, de tout ce qui s’était passé à Jérusalem, que ce grand fait du salut, en laissant dans l’ombre tout le reste (voir le Commentaire de M. Godet).

Verset 45

Conséquences de la résurrection de Lazare (45-57)

Donc, à la suite de ce triomphe de la vie sur la mort dont ils venaient d’être témoins, beaucoup, un grand nombre, crurent en lui.

Il pouvait y avoir des degrés très divers dans cette foi opérée par la vue du miracle (comparer Jean 2.11-23, note).

D’après ce que nous avons vu des dispositions de ces amis de Lazare (verset 37, note), il est possible que plusieurs fussent d’avance préparés à la foi en Jésus. Chez d’autres, cette foi ne fut peut-être que l’impression vive, mais passagère, du miracle. D’autres, enfin, ne reçurent pas même cette impression (verset 46).

Verset 46

Au grand nombre de ceux qui crurent, l’évangéliste en oppose (mais) quelques-uns qui, témoins de la puissance divine et de l’amour de Jésus, allèrent vers les pharisiens et leur dirent ce que Jésus avait fait.

Dans quelle intention ? Les termes mêmes qu’emploie l’évangéliste et la suite du récit ne le prouvent que trop. Ils allèrent dénoncer à ces pharisiens, ennemis du Sauveur et qui exerçaient la plus grande influence sur le sanhédrin, ce qui venait de se passer à Béthanie.

Verset 47

Donc, comme conséquence de la dénonciation qui précède.

Ces mêmes pharisiens, avec les principaux sacrificateurs convoquent une séance du sanhédrin (grec un sanhédrin ; c’est ici la seule fois que Jean emploie ce mot), pour délibérer sur l’événement qu’on vient de leur dénoncer et qui était de nature à grandir démesurément l’influence redoutée de Jésus sur le peuple.

Il faut remarquer ce verbe au présent : que faisons-nous ? Il est urgent de faire quelque chose et de le faire tout de suite.

Ce qui les remplit d’inquiétude c’est que cet homme (terme de mépris) fait beaucoup de miracles.

Ce n’est donc pas seulement la résurrection de Lazare qui les trouble, celle-ci n’a fait que mettre le comble à ces manifestations de la puissance divine qui agissait par Jésus et que les chefs du peuple ne peuvent tolérer. Ils croient ces miracles, ils les constatent officiellement et ils veulent condamner celui qui les opère !

Verset 48

Cette crainte des Romains était-elle sincère ?

Plusieurs interprètes le pensent avec les idées charnelles que les Juifs se faisaient du Messie, ils pouvaient redouter que Jésus ne suscitât parmi le peuple quelque émeute, qui aurait provoqué une répression sévère de la part des Romains et amené peut-être la suppression du pouvoir du sanhédrin.

C’est là ce qu’ils expriment par ces termes énergiques : Ils détruiront (grec enlèveront, supprimeront) et notre lieu c’est-à-dire Jérusalem et son temple, siège de notre gouvernement et notre nation, à laquelle ils ôteront ce qui lui reste de son antique indépendance.

Que cette crainte fût sincère ou simulée leur principal mobile était l’ambition égoïste : ils craignent que les Romains ne mettent un terme à leur domination sur ce qu’ils appellent notre (tout l’accent porte sur ce mot en grec) lieu, notre nation.

Verset 49

Les mots : souverain sacrificateur cette année-là, ne signifient point que dans la pensée de l’auteur cette charge fût annuelle.

Même si notre évangéliste n’était pas l’apôtre Jean, il se montre trop instruit des coutumes de l’Ancienne Alliance pour ignorer que le souverain sacrificateur était nommé à vie. Il n’est pas même nécessaire, pour expliquer le terme qu’il emploie, de rappeler que cette haute dignité était depuis longtemps conférée arbitrairement par l’autorité romaine, qui, redoutant le pouvoir d’un fonctionnaire inamovible, remplaçait fréquemment les titulaires de cette charge.

Tout ce que Jean veut dire, par cette expression qui se retrouve au verset 51 et au Jean 18.13, c’est que Caïphe était souverain sacrificateur dans cette année-là, l’année mémorable et fatale de la mort du Sauveur (Jean 18.13, note ; Matthieu 26.3 ; Luc 3.9, note).

Verset 50

Caïphe, en vrai sadducéen (Josèphe, Bell. jud. 2, 8, 14), parle avec rudesse : Vous n’y entendez rien (grec vous ne savez rien) ; puis, invoquant la raison d’État, au nom de laquelle tant d’iniquités ont été commises, il leur dit : Vous ne considérez pas qu’il vous (B, D : le texte reçu, avec A, majuscules porte nous) est avantageux de sacrifier un seul homme pour sauver la nation.

Innocent ou coupable, il faut que cet homme périsse ! Par là, ce politique qui se croit habile ne fait que reprendre en sous-ordre le raisonnement du verset 48 et il ne voit pas que c’est précisément le crime qu’il conseille qui amènera, par un juste jugement de Dieu, la ruine, de son peuple !

Verset 51

L’évangéliste ajoute (versets 51 et 52) aux paroles de Caïphe un commentaire inattendu, lumineux, profond.

Les exégètes ne sont pas d’accord sur la nature de cette prophétie attribuée au souverain sacrificateur. Les uns, se rappelant que, dans les beaux jours de la vie religieuse en Israël, le souverain sacrificateur était censé posséder le don de prophétiser, ou de prononcer des oracles en consultant l’Éternel (Exode 28.30 ; Nombres 27.21 ; Deutéronome 33.8), pensent qu’en ce moment l’Esprit de Dieu renouvela en Caïphe ce don depuis longtemps disparu et lui fit prononcer, en vertu de sa charge, une véritable prophétie.

Mais n’y a-t-il pas quelque chose qui répugne dans la pensée que l’Esprit de Dieu aurait réellement agi sur l’esprit d’un homme tout rempli de desseins meurtriers ? Est-ce là ce que Jean a voulu dire ? Cette pensée ne ressemblerait-elle pas à la monstrueuse erreur du catholicisme, attribuant aux papes les plus corrompus l’infaillibilité, en vertu de leur sacerdoce ?

Non, c’est bien Caïphe lui-même qui, de son propre mouvement, prononce un principe de sa détestable politique, mais, par une direction spéciale de la providence divine, il le fait en des termes dans lesquels l’évangéliste pouvait, à bon droit, voir une prophétie involontaire de la mort du Fils de Dieu.

Pilate aussi, comme l’observe Bengel, proclama la royauté divine de Jésus-Christ aux yeux de tous, en attachant à la croix le titre de cette dignité. Nous dirons donc, avec M. Luthardt, que Caïphe prophétisa non comme souverain sacrificateur, en vertu de sa charge, mais comme souverain sacrificateur de cette année-là (l’adjonction de ces derniers mots n’aurait pas de sens s’ils ne portaient l’accent) car cette année-là devait voir s’accomplir le grand sacrifice qui mettrait fin à tout l’ancien sacerdoce.

Il y a, dit R. Stier une haute ironie de la providence spéciale de Dieu dans le fait que la sacrificature expirante dut encore annoncer, sans le savoir et sans le vouloir, par la bouche de celui qui en était revêtu, le grand sacrifice d’expiation.

Verset 52

Le principe énoncé par Caïphe : un pour tous ne s’applique pas seulement au peuple Juif ; il a un caractère d’universalité, que l’évangéliste relève encore.

Ce n’est pas seulement pour la nation juive que Jésus devait mourir, mais afin de rassembler en un seul corps, par la prédication de l’évangile, les enfants de Dieu dispersés parmi toutes les nations (comparer Jean 10.16, note).

Les mots : en un seul corps (grec en un) indiquent la sainte communion d’esprit et d’amour dans laquelle Juifs et païens convertis ne sont plus qu’un cœur et qu’une âme en Jésus, leur chef et leur Sauveur.

Mais dans quel sens Jean peut-il appeler enfants de Dieu ces milliers d’hommes de l’avenir qui n’avaient encore aucune connaissance de lui ?

Des interprètes, jaloux d’attribuer à l’homme le plus possible et à Dieu le moins possible dans l’œuvre du salut, répondent que ces enfants de Dieu étaient ceux que Dieu voyait disposés à le devenir. Mais, répondent Meyer et Luthardt, tout luthériens qu’ils sont, c’est se mettre en opposition avec tous les principes de l’Écriture que de donner le titre d’enfants de Dieu à des hommes pécheurs qui sont encore en dehors de toutes les conditions du salut.

L’expression est donc prophétique comme le dit Meyer, ici en parfait accord avec Calvin ; l’évangéliste parle au point de vue de la prescience de Dieu, en d’autres termes, de l’élection de sa grâce.

C’est là le mystère de la miséricorde divine, s’étendant à toutes les nations et dont Paul a été le grand prédicateur (Romains 8.28-29 ; Éphésiens 1.9 et suivants ; Éphésiens 3.4 et suivants, Colossiens 1.26-27).

Verset 53

Le mot donc montre que la décision de faire mourir Jésus fut prise en conséquence de la proposition de Caïphe, qui fut ainsi adoptée par le conseil.

Depuis ce jour-là leurs délibérations ne concernèrent plus que les voies et les moyens d’exécuter leur dessein.

Verset 54

Jésus n’ignorait pas la décision qui venait d’être prise ; il quitte donc les environs de Jérusalem et la Judée, il ne paraissait plus (grec), il ne marchait plus ouvertement, en public, librement, parmi les Juifs, il se retire dans la contrée voisine du désert de Juda qui s’étendait au loin dans la direction du Jourdain et de la mer Morte.

Il va séjourner avec ses disciples dans une ville appelée Éphraïm.

Cette ville selon Eusèbe, était à huit milles, selon Jérôme à vingt milles au nord-est de Jérusalem. L’historien Josèphe la place dans le voisinage de Béthel (comparer 2 Chroniques 13.19).

M. Luthardt observe que par cette retraite Jésus montrait à ses adversaires que leur volonté ne serait pas accomplie sans la sienne et qu’elle le serait, non comme ils le voulaient, mais comme il le voudra. Quand son heure sera venue, il ira lui-même au-devant d’eux.

Verset 55

Le mot : contrée ne désigne pas spécialement le pays où Jésus s’était retiré, mais en général les campagnes, par opposition à la capitale.

Ces gens se rendaient à Jérusalem avant la Pâque, afin que ceux qui étaient atteints de quelque souillure légale eussent le temps de se purifier par des sacrifices et diverses cérémonies, pour pouvoir prendre part à la fête.

Par cette observation, Jean prépare ce qu’il va raconter au verset suivant.

Verset 56

L’évangéliste nous décrit ainsi un mouvement de curiosité chez les uns, de sérieuse attente chez les autres. Leur attente était excitée par le bruit qu’avait fait le dernier miracle de Jésus.

Mais la décision prise par le sanhédrin contre lui rendait très douteuse, à leurs yeux, sa venue à la fête.

Ils se demandent donc les uns aux autres, avec un vif intérêt : Que vous en semble ? (grec) qu’il ne viendra point à la fête ?

Ils se posaient ces questions, se tenant là dans le temple où ils savaient que Jésus avait l’habitude de se rendre pour parler au peuple.

Verset 57

Tandis que se produisait parmi la foule ce mouvement, qui montrait toute l’influence que Jésus exerçait encore sur elle, les chefs du sanhédrin avaient pris leurs mesures pour exécuter leur décision.

Ils avaient donné l’ordre que quiconque savait où il était, le dénonçât, afin qu’ils pussent se saisir de lui.

Le texte reçu, avec D et quelques majuscules, porte : avaient aussi donné l’ordre. Ce aussi marque, suivant M. Godet, « un nouvel anneau dans la série des mesures hostiles, si bien retracée par Jean : Jean 5.16-18 ; Jean 7.32 ; Jean 9.22 ; Jean 11.53 ».

Tout est donc préparé, l’heure de la catastrophe approche. Mais si Jésus était resté dans les montagnes ou il s’était retiré, tous ces desseins des adversaires auraient été vains (Jean 12.1-12).

Informations bibliographiques
bibliography-text="Commentaire sur John 11". "La Bible Annot�e de Neuch�tel". https://www.studylight.org/commentaries/fre/neu/john-11.html.
 
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