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Friday, July 18th, 2025
the Week of Proper 10 / Ordinary 15
the Week of Proper 10 / Ordinary 15
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Bible Commentaries
La Bible Annotée de Neuchâtel La Bible Annotée de Neuchâtel
Déclaration de droit d'auteur
Ces fichiers sont dans le domaine public.
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Informations bibliographiques
bibliography-text="Commentaire sur John 1". "La Bible Annotée de Neuchâtel". https://studylight.org/commentaries/fre/neu/john-1.html.
bibliography-text="Commentaire sur John 1". "La Bible Annotée de Neuchâtel". https://studylight.org/
Whole Bible (6)New Testament (1)
versets 1-51
Plan du commentaire biblique de Jean 1
La Parole dans ses rapports avec Dieu et avec le monde
à lâorigine de toutes choses la Parole existait, elle était en relation vivante avec Dieu et elle était Dieu. Câest par elle que toutes choses existent ; en elle était la vie, cette vie qui est la lumière des hommes ; mais lâhumanité rebelle repousse cette lumière (1-5).
La Parole repoussée par lâincrédulité et reçue par la foi
Bien quâelle fût précédée du témoignage de Jean-Baptiste, quâil y eût une relation naturelle entre elle et tout homme, que le monde eût été fait par elle et quâelle vînt chez le peuple qui avait été préparé comme son chez-soi, elle nâa obtenu ni du monde ni de ce peuple lâaccueil auquel on pouvait sâattendre. Mais à ceux qui lâont reçue, elle a donné de devenir enfants de Dieu, à ceux qui sont nés, non de la chair, mais de Dieu (6-13).
La Parole faite chair, objet de lâexpérience du croyant
La Parole a été faite chair et a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité ; lâévangéliste et les croyants ses contemporains ont contemplé sa gloire de Fils unique venu du Père ; Jean-Baptiste le leur a attesté ; et lâévangéliste énumère tout ce quâils ont reçu de Jésus-Christ, le Fils unique en qui Dieu sâest révélé (14-18).
Verset 1
Prologue
Versets 1 Ã 18 â La Parole
Tandis que les autres évangélistes commencent leur narration avec la venue de Jésus-Christ en ce monde, ou son entrée dans son ministère, Jean remonte, dâun vol dâaigle, au-delà du temps, pour saisir le Sauveur dans son éternelle préexistence, puis il nous montre en Jésus de Nazareth la Parole faite chair (verset 14). Câest le sujet du «â¯prologueâ¯Â» de son Ãvangile (versets 1-18).
Ce morceau se divise naturellement en trois partiesâ¯: Dans la première (versets 1-5), lâauteur, sâélevant à lâorigine de toutes choses, nous présente la Parole en elle-même et dans sa relation primordiale avec Dieuâ¯; puis il nous décrit ses rapports avec le monde en général et son action sur lâhumanité rebelle.
Dans la seconde partie (versets 6-13), lâauteur caractérise lâaccueil que les hommes et spécialement le peuple élu ont fait à la Parole, quand, annoncée par Jean-Baptiste, elle est apparue en Jésus-Christ. Repoussée par le peuple qui aurait dû la recevoir, elle a donné à ceux qui lâont reçue et qui, par la foi, sont nés de Dieu, le pouvoir de devenir enfants de Dieu.
Cette expérience des croyants est exposée dans la troisième partieâ¯: la Parole faite chair a habité parmi ceux qui ont cru en elle.
Il faut remarquer en outre que la dernière pensée de la première partie (verset 5) devient le thème de la seconde partie (versets 6-13) et de même la pensée finale de la seconde partie (verset 13) est développée dans la troisième partie (versets 14-18). Jean nous élève ainsi comme dans une spirale. Nous ne croyons pas que le prologue suive un plan historique. Le verset 5 nous montre déjà en termes généraux Jésus apparu en chair et rejeté par les hommes qui lâont fait mourir.
Et la seconde partie (versets 6-13) nâa pas pour sujet, comme on lâa prétendu, le rôle du Christ préexistant sous lâancienne Alliance, en effet elle débute par le témoignage de Jean-Baptiste (verset 6), qui, de même que dans les synoptiques (Marc 1.1), ouvre lâhistoire évangéliqueâ¯; on ne saurait, sans arbitraire, prendre ici Jean-Baptiste pour le représentant des prophètes. Et de plus cette seconde partie se termine par lâaffirmation que «â¯la Parole a donné à ceux qui lâont reçue le pouvoir de devenir enfants de Dieu lesquels ne sont point nés de la volonté de la chair, mais de Dieuâ¯Â», ces derniers mots nous transportent sur le terrain de la nouvelle Alliance.
Les premiers mots de lâÃvangile de Jeanâ¯: Au commencement était la Parole rappellent les premiers mots de la Genèse et il ne sâagit point dâun simple rapprochement dans les termes, mais dâune analogie profonde. Si la Genèse raconte la création de lâunivers, lâÃvangile retrace la création nouvelle dâun monde moral. Dans son prologue, Jean remonte à lâorigine de toutes choses pour nous montrer lâAuteur de cette double création. En effet, si les motsâ¯: au commencement ne reportent pas la pensée au-delà de la première création, Jean ne dit pourtant pas que la Parole elle-même fut alors créée, mais quâelle était au moment où toutes choses furent créées, quâelle est antérieure à toute la création, Par conséquent au temps lui-même (Proverbes 8.23â¯; Jean 17.5â¯; Ãphésiens 1.4)â¯; or câest là désigner lâéternité.
Si la pensée de lâéternité nâétait pas impliquée dans les termes mêmes dont se sert lâévangéliste, elle se présenterait comme une conséquence de la nature divine attribuée à la Parole. Et, du reste, cette idée de la préexistence éternelle du Fils de Dieu nâest point une spéculation métaphysique de lâapôtre, mais une vérité religieuse clairement enseignée dans tout le Nouveau Testament (Colossiens 1.17â¯; 1 Jean 1.1â¯; Apocalypse 3.14â¯; comparez Michée 5.1) et qui ressort de mainte déclaration de Jésus lui-même, dans notre Ãvangile (Jean 6.62â¯; Jean 8.58â¯; Jean 17.5-24).
La Paroleâ¯: il faut laisser à ce mot son sens premier, ordinaire. Rattachant sa pensée au commencement de la Genèse (note précédente), Jean affirme (verset 3) que toute la création a été opérée par la Parole, expression de la volonté et de la puissance de Dieu.
Comment Jean fut-il amené à concevoir comme une personne cette Parole éternelle, par laquelle ont eu lieu la création et toutes les révélations divines�
LâAncien Testament, compris à la lumière des enseignements de son Maître, lui fournit cette idée. Plusieurs de ses données conduisent en effet à la notion de la Parole que nous trouvons dans notre évangile.
Mon nom est en lui, dit lâÃternel en parlant de lâange quâil envoyait devant Israël (Exode 23.20-21), câest-à -dire quâil était la manifestation de lâessence divine elle-même.
Enfin, le dernier des prophètes annonce en ces termes lâapparition définitive sur notre terre de ce grand révélateur de Dieuâ¯: «â¯Voici, je vais envoyer mon messagerâ¯; il préparera la voie devant moi et aussitôt entrera dans son temple le Seigneur (Adonaï) que vous cherchez, lâange de lâalliance que vous désirezâ¯Â» (Malachie 3.1).
Les deux vérités contradictoires que nous venons de signaler sont ainsi conciliées et notre évangéliste, qui est pénétré de toutes deux, nous en montre le sublime accord dans ces parolesâ¯: «â¯Personne ne vit jamais Dieu, le Fils unique qui est dans le sein du Père, est celui qui nous lâa fait connaîtreâ¯Â» (verset 18, comparez Jean 5.37-39â¯; Jean 6.45).
Nous savons maintenant pourquoi Jean appelle la Parole Celui par qui le Dieu invisible sâest toujours manifesté au monde, soit dans la création, soit dans ses révélations successives, soit enfin dans la rédemption de notre humanité. Et lâon conçoit quelle vive lumière ce fait projette sur toutes les Ãcritures, qui nous apparaissent ainsi dans leur pleine harmonie.
Jean a donc tiré de lâAncien Testament son idée de la Parole (grec Logos). Si, de ce que ce mot était alors usité dans les écoles de la philosophie alexandrine et se trouve souvent dans les écrits de Philon, on veut inférer que Jean lâa emprunté à ce philosophe, il nây a pas lieu de le nier absolument. Mais sâil lâa fait, câest pour rectifier les notions fausses que ce terme recouvrait et pour mettre la vérité divine à la place des spéculations métaphysiques de son époque.
Câest ainsi que Paul empruntait à la philosophie de son temps ce grand mot de sagesse, dont elle était si fière, afin dâen montrer la folie, ajoutant avec une sainte hardiesseâ¯: «â¯Mais nous prêchons une sagesse entre les parfaits, sagesse qui nâest pas de ce siècle, mais une sagesse de Dieuâ¯Â» (1 Corinthiens 2.6).
Avec Dieuâ¯; la préposition que nous traduisons ainsi ne signifie pas seulement que la Parole était auprès de Dieu, dans sa sociétéâ¯; elle nous la présente dans un mouvement constant vers lui, réalisant avec lui la communion vivante et intime de lâamour. Cette nuance se retrouve au verset 18 «â¯le Fils unique qui est dans le sein du Pèreâ¯Â». Jean emploie la même préposition dans sa première épître (1 Jean 1.2), en parlant de «â¯la vie éternelle, qui était auprès du Père et qui nous a été manifestéeâ¯Â» (comparer 2 Corinthiens 5.8). Par cette seconde sentence, lâévangéliste établit une distinction entre la Parole éternelle et Dieu, et cela, au moment de déclarer que cette Parole était Dieu.
La Parole était Dieuâ¯; il nây a rien à expliquer dans cette déclaration solennelle, il nây a quâà la recevoir dans toute la plénitude de sa significationâ¯; elle attribue à la Parole tous les caractères et toutes les perfections de lâessence divine.
Il est vrai quâici le mot Dieu nâa pas lâarticle, dont il est habituellement précédéâ¯; cette omission sâimposait, soit parce que le mot joue dans la phrase le rôle dâattribut, soit surtout parce quâen lâécrivant avec lâarticle, Jean aurait identifié la Parole et Dieu et effacé la distinction quâil venait de faire en disantâ¯: «â¯La Parole était avec Dieuâ¯Â».
Il y a quelque chose de majestueux dans la progression des trois sentences de ce verset, dont la première enseigne la préexistence éternelle de la Parole, la seconde son rapport unique avec Dieu, la troisième sa divinité. La même solennité se retrouve dans ce terme trois fois répétéâ¯: la Parole et la Parole et la Parole.
Verset 2
Grecâ¯: celle-là , cette même Parole, était⦠Jean répète dans ce verset ce quâil a dit de la préexistence éternelle de la Parole et de son rapport avec Dieuâ¯: il prépare ainsi ce quâil va exposer (verset 3) du rôle de la Parole dans la création du monde.
Pour avoir cette puissance créatrice qui nâappartient quâà Dieu, il fallait que la Parole possédât réellement tous les attributs divins qui lui sont conférés dès la première ligne de lâévangile.
Verset 3
Grecâ¯: toutes choses sont devenues par elle et pas une des choses qui sont là nâest devenue sans elle. Traduction de M. Godet, qui fait observer que le verbe devenir trois fois répété, en grec, forme un contraste avec les était des versets 1 et 2 (comparer Jean 8.58).
Ici se trouve pour la première fois cette particularité du style de Jean qui aime à exprimer la même pensée dâabord sous forme dâaffirmation, puis sous forme de négation (Voir, par exemple, verset 20).
En déclarant que toutes choses ont été créées par la Parole, il importait à lâapôtre dâexclure toute exception. Comme au verset 1, il fait certainement allusion aux premiers mots de la Genèse. Il se trouve du reste, en parfait accord avec dâautres écrivains du Nouveau Testament, qui rendent la même pensée dâune manière plus explicite encore (Colossiens 1.16â¯; Hébreux 1.2â¯; Psaumes 33.6).
Par elle ne signifie pas que la Parole nâait été que lâinstrument de la création (voir verset 4), car la même préposition est employée quand il sâagit du rôle de Dieu lui-même dans la création (Romains 11.36â¯; Hébreux 2.10). Paul dit pareillement en parlant de Christ que «â¯toutes choses ont été créées en lui, par lui et pour luiâ¯Â» (Colossiens 1.16-17).
Si les apôtres appliquent les mêmes termes tantôt au Père, tantôt au Fils, câest que le Fils nâagit que dans une parfaite communion de volonté et dâamour avec le Père.
Dès les temps les plus anciens, on a discuté sur la ponctuation de la fin du verset 3 (texte grec).
A, C, D, les versions Syriaque, Origène, Irénée, rattachent les mots ce qui a été fait à la première proposition du verset 4.
Des éditeurs modernes, Lachmann, Westcott-Hort adoptent cette ponctuation. La traduction la plus probable est alorsâ¯: «â¯ce qui a été fait était vie en elleâ¯Â» (la Parole).
Comme le remarque M. Weiss, il faudrait le présentâ¯: est vie en elle. Codex Sinaiticus D, Itala, présentent en effet cette leçon.
Mais la pensée ainsi exprimée est sans parallèle dans notre évangile. Jean aurait dit seulementâ¯: «â¯avait (ou a) vie en elleâ¯Â».
Pour ces raisons exégétiques, la plupart des interprètes rattachent les mots ce qui a été fait au verset 3. Ils nây font pas double emploi, car le parfait ce qui a été fait a en grec le sens dâun présentâ¯: ce qui, étant devenu, existe actuellement.
Verset 4
Jean vient de direâ¯: Par elle toutes choses ont été faitesâ¯; maintenant il écritâ¯: En elle était la vie.
La seconde expression, plus intime, plus profonde, plus complète, nous fait mieux comprendre la déclaration du verset précédent et prépare celle qui suit.
Le mot vie est sans article. M. Weiss pense que lâauteur reprend la description de la nature de la Parole (versets 1 et 2) pour préparer ce quâil va dire de son action illuminatrice (versets 4-5). La vie serait, dâaprès lui, la vie de la Parole elle-même et Il limite le sens de ce terme à la vie spirituelle que la Parole possède par sa communion avec Dieu et communique à ceux qui la reçoivent.
Il paraît cependant plus naturel dâadmettre, avec la plupart des interprètes, quâil y a progrès dans lâexposé et non retour en arrière et que Jean continue à caractériser lâÅuvre de la Parole.
Il nây a pas lieu de restreindre ici la portée du mot vie. Lâabsence de lâarticle montre quâil sâagit de la vie au sens le plus indéterminéâ¯: toute vie était dans la Parole et en découlait comme de sa source (Jean 5.26â¯; 1 Jean 5.11).
Mais la vie, dont la Parole est la source, devient lumière pour les créatures intelligentes et moralesâ¯: la vie était la lumière des hommes. Après avoir décrit la Parole en elle-même, dans son rapport avec Dieu et dans son rapport avec le monde, Jean nous la montre dans sa relation avec notre humanité.
Le mot profond et très riche de lumière nâest pas une notion toute intellectuelleâ¯: la raison, ni une notion purement moraleâ¯: la sainteté ou le salut. Lorsque Jean écritâ¯: «â¯Dieu est lumière et il nây a point en lui de ténèbresâ¯Â» (1 Jean 1.5), ou que Jésus dit «â¯Je suis la lumière du monde, celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbresâ¯Â» (Jean 8.12â¯; Jean 9.5â¯; Jean 12.46), ce terme de lumière, opposé à celui de ténèbres, désigne à la fois la perfection morale et la clarté quâelle communique à lâentendement.
Pour lâhomme qui la reçoit, la lumière est la vérité divine qui illumine son âme et y répand la connaissance de Dieu par la Parole. Mais cette connaissance nâest jamais purement intellectuelleâ¯; elle est inséparable de la vie morale quâelle crée et entretient dans le cÅurâ¯; elle grandit ou diminue et sâéteint avec elle. Câest ce qui ressort du rapport que Jean établit entre la vie et la lumière. Dâabord la vie et par elle la lumière, tel est lâordre du royaume de Dieu et de lâexpérience chrétienne.
Mais quand est ce que la vie était ainsi réellement la lumière des hommesâ¯? Ces verbes au passé était la vie, était la lumière, nâexpriment pas une simple possibilité et ne servent pas seulement à caractériser lâétat normal. Dans leur contraste avec le présentâ¯: luit (verset 5), ils désignent un moment déterminé de la durée et nous transportent au lendemain de la création (verset 3), au matin lumineux et pur de lâexistence humaine, où lâhomme créé à lâimage de Dieu, en communion avec lui, recevait de lui la vie et la lumière. Le péché nâavait point encore répandu dans son âme les ténèbres qui résisteront à la clarté dâen haut.
Entre les verset 4 et verset 5, Jean suppose évidemment le fait tragique de la chute, sans lequel la présence des ténèbres serait incompréhensible.
Verset 5
Malgré lâapparition des ténèbres qui ont envahi lâhumanité, la lumière nâa point cessé de projeter ses rayons salutaires elle persiste à éclairer (verbe grec à lâactif) cette humanité devenue ténèbresâ¯: mais, par suite de lâobscurcissement moral, lâhumanité résiste à lâaction de la lumièreâ¯: les ténèbres ne lâont point reçue.
Il ne faut point limiter, avec plusieurs interprètes, cette action de la lumière aux révélations accordées au peuple juif dans lâancienne Alliance, car le verbe au présent, luit, éclaire, ne conviendrait pas pour désigner un fait appartenant tout entier au passé. Jean parle dâune manière générale des rayons de lumière dont la parole éternelle continue à éclairer le monde, même dans son état de chute, en tout temps et partout (verset 9, note).
Les moyens naturels de cette illumination sont, dâune part, la contemplation des Åuvres de Dieu dans la création (Romains 1.20) et, dâautre part, les avertissements de la conscience, cette loi écrite dans les cÅurs (Romains 2.14-15). Ces moyens avec le secours de la Parole éternelle qui les emploie, suffiraient pour ramener les hommes à Dieu, sâils étaient dans un état normalâ¯; ils suffisent du moins pour les rendre «â¯inexcusablesâ¯Â» (Romains 1.20) de résister aux sollicitations de cette lumière.
Ils ne lâont point reçue, dit lâévangéliste avec tristesse. Il exprime ainsi lâexpérience universelle des siècles, sans sâarrêter aux rares exceptions de ces hommes qui, de temps à autre, se sont élevés, par leurs lumières, bien au-dessus de leurs semblables.
Quoiquâil y ait des degrés divers dans lâobscurcissement de lâintelligence et du cÅur (Ãphésiens 4.18), tous, même les meilleurs, sont restés plus ou moins sous lâinfluence de ces ténèbres au sein desquelles luit la lumière (versets 10 et 11). Si cette explication est la première qui se présente à lâesprit et demeure la plus naturelle, il ne faut pas exclure â tant la déclaration de lâapôtre est générale â la venue de Jésus-Christ en ce monde dont il va être question (comparer verset 1, 1re note).
Verset 6
Après avoir dit ce quâétait la Parole divine, créatrice, vie et lumière des hommes (versets 1-4) et comment elle nâa point été reçue à cause des ténèbres qui règnent dans le monde, lâévangéliste poursuit son exposition, en nous transportant au moment le plus tragique de cette lutte de la lumière avec les ténèbresâ¯: précédée et annoncée par le solennel témoignage de Jean, la Parole vient au sein du peuple qui avait été préparé pour la recevoirâ¯; elle est repoussée par lui, mais elle se constitue un nouveau peuple, formé de ceux qui reçoivent dâelle par la foi le pouvoir de devenir enfants de Dieu (versets 6-13).
Lâexpression envoyé de Dieu rappelle la prophétie de Malachie 3.1â¯; Malachie 4.5, dâoù elle est tirée.
Le précurseur parut (grec devint), ce terme, qui indique un fait historique un événement, est le même dont se sert Marc (Marc 1.4).
Verset 7
Grecâ¯: celui-ci vint en témoignage (ou pour un témoignage), afin quâil témoignât au sujet de la lumière. Le fait de ce témoignage est si important aux yeux de lâévangéliste, quâil le mentionne dâabord sans indiquer sur quoi portait le témoignage (il vint en témoignage)â¯; puis il ajouteâ¯: afin de rendre témoignage à la lumière.
Jean devait annoncer ce quâil avait reçu par une révélation divine (Luc 3.2) et ce dont il avait été témoin oculaire (versets 33 et 34).
Le but du témoignage de Jean était que tous crussent (à la lumière) par lui, par lâentremise de Jean.
Telle était lâintention de Dieu dans sa miséricordeâ¯; et le témoignage de Jean était assez clair, assez puissant, pour que cette intention eût été réalisée en tous, si la plupart nâeussent été retenus loin de la foi par lâendurcissement de leurs cÅurs. Cependant plusieurs crurent et les plus éminents disciples de Jean devinrent disciples de Jésus.
Verset 8
Bien que Jean-Baptiste fût le plus grand des prophètes et que Jésus lui-même lâappelle «â¯la lampe qui brûle et qui luitâ¯Â» (Jean 5.35), il nâétait pas la lumièreâ¯; son rôle se réduisait à rendre témoignage à la lumière.
On a vu dans ces paroles de lâévangéliste une intention de polémique contre les disciples de Jean qui nâavaient pas cru en Jésus (Jean 1.20â¯; Jean 3.25 et suivants Actes 19.3-4).
Selon dâautres, elle rappellerait lâexpérience personnelle de lâévangéliste, qui crut dâabord avoir trouvé en Jean toute la lumière quâil cherchait, mais qui dut reconnaître, lorsque Jean lâeut adressé à Jésus, que Jean nâétait pas encore, lui, la lumière.
Si intéressantes que soient ces suppositions, nâest-il pas plus simple de dire que lâévangéliste se propose de marquer la vraie place du Précurseur en présence de celui quâil annonçaitâ¯?
Même les plus grands prophètes ne tiennent leur lumière que de Celui qui est «â¯la lumière du mondeâ¯;â¯Â» câest lui quâils doivent glorifier, en faisant tout remonter à lui comme à la source, eux-mêmes ne peuvent que rendre témoignage à la vérité qui leur a été révélée et dont ils ont fait lâexpérience dans leurs cÅurs. Jean-Baptiste se tint dans ce rôle avec une admirable humilité (Jean 1.33-34â¯; Jean 3.28-30).
Verset 9
Le témoignage de Jean nâétait pas le seul fait qui aurait dû assurer un accueil favorable à la Paroleâ¯: une relation primordiale lâunissait à chaque homme et au monde dans son ensemble (versets 9 et 10), et, dâautre part, le milieu dans lequel elle parut avait été spécialement préparé pour elle (verset 11).
La Parole, cette lumière à laquelle Jean devait rendre témoignage (verset 8), était la véritable lumière (comparez verset 4) qui éclaire tout homme. Le mot véritable, expression caractéristique du quatrième évangile, ne désigne pas proprement ce qui est vrai par opposition à ce qui est faux, mais plutôt la qualité dâune chose qui répond parfaitement à son idée et qui en réalise lâessence (Jean 4.23â¯; Jean 6.32â¯; Jean 7.28â¯; Jean 15.1â¯; comparez 1 Jean 5.20).
La Parole est appelée la véritable lumière par contraste avec la lumière que répandait Jean-Baptiste et qui nâétait quâun reflet de la véritable lumière manifestée en Christ (verset 8).
Cette lumière divine éclaire (il faut remarquer le verbe au présent) tout homme. Il sâagit de cette illumination universelle et intérieure (verset 4, note) que la Parole éternelle procure à lâhomme créé à lâimage de Dieu et par laquelle celui-ci est amené à sentir le besoin dâun Sauveur et à le reconnaître quand il lui est présenté.
La plupart des commentateurs actuels séparent les mots venant au monde des mots tout homme, qui, dans le texte les précèdent immédiatement. Ils en font lâattribut de la proposition et traduisentâ¯: la véritable lumière venait (grec était venant) au monde.
Leur principal argument est que lâexpression venir au monde est habituellement appliquée à Christ et à son incarnation (Jean 3.19â¯; Jean 6.14â¯; Jean 9.39â¯; Jean 18.37). Il est cependant un passage où une expression très semblable désigne la naissance dâun homme quelconque (Jean 16.21).
Aussi croyons-nous pouvoir rapporter ces mots à tout homme ce qui est seul conforme à lâordre des termes dans lâoriginal.
M. Godet qui, avec Meyer et les anciens interprètes, avait adopté cette construction dans la première édition de son commentaire, disait avec raisonâ¯:
Dâailleurs lâidée que ces mots ajoutent au terme tout homme nâest pas superflue. Ils ne constituent pas seulement une amplification pleine de solennité (Meyer). Ils sont destinés à affirmer que chaque membre de lâhumanité, dès lâinstant où il fait son entrée dans le monde et quelles que soient les ténèbres qui règnent autour de lui, trouve en lui-même, dans sa conscience, des rayons de cette lumière véritable, «â¯la Parole qui était dans le monde et par laquelle le monde a été faitâ¯Â» (verset 10). Cette interprétation a lâavantage dâétablir un lien naturel entre verset 9 et verset 10.
Verset 10
Dans les versets qui précèdent (versets 7-9), Jean a parlé de la lumièreâ¯; ici, il substitue mentalement à ce terme abstrait la personne de celui quâil désignait comme «â¯la véritable lumièreâ¯Â», Jésus-Christ.
Câest ce qui ressort de lâemploi du pronom masculin. Celui-ci ne se rapporte pas au mot lumière, qui est en grec du genre neutre.
La plupart des interprètes modernes estiment quâil représente la Parole (grec le Logos). Mais cette notion est bien éloignée, puisquâelle a été remplacée dès verset 5 par celle de la lumière.
Dâailleurs lâexpression du verset 12â¯: Ceux qui croient en son nom, ne saurait sâappliquer à la Parole, mais bien, selon toutes les analogies (Jean 2.23â¯; Jean 3.18â¯; 1 Jean 5.13), à Jésus-Christ.
Câest Jésus-Christ qui est le sujet des versets 11 et 12. Câest à lui que lâauteur pense déjà au verset 10. Aussi, dès ce verset, avons-nous mis au masculin les sujets des verbes, suivant lâexemple de la traduction allemande de Weizsäcker et des versions de Calvin dans son commentaire et de Pau-Vevey.
Jean répète encore ici, sans se lasser, deux faits dâune portée immenseâ¯: dâabord que Jésus-Christ était dans le monde (versets 4, 5 et 9)â¯; puis que le monde a été fait par lui (verset 3)â¯;, et cela, afin de montrer dans ces deux faits, deux raisons qui auraient dû porter les hommes à croire en Jésus. Ils auraient pu croire, puisquâil était la lumière interne qui cherchait à les éclairer et ils auraient dû croire, puisque, crées par lui et à son image, ils nâavaient quâà reconnaître leur parenté intellectuelle et morale avec luiâ¯; et à conclure quâils étaient faits pour lui.
Au lieu de cela, lâévangéliste constate avec tristesse que le monde ne lâa point connu (versets 5 et 11), tellement il était aveuglé par les ténèbres du péché.
Verset 11
Le contraste tragique entre lâaction miséricordieuse de Dieu et lâincrédulité obstinée des hommes apparaît surtout dans le fait quâénonce ce verset. Il est venu chez soi (grec dans son chez soi, comparez Jean 19.27).
Par ces mots lâévangéliste proclame dâune manière générale le grand événement de lâapparition personnelle et visible de la Parole en Jésus-Christ. Il se réserve de nous dire bientôt (verset 14) comment sâest accompli ce prodige de lâamour divin.
Malgré tout, les siens ne lâont point accueilli. Ce dernier terme est plus expressif encore que les précédentsâ¯: pas reçu (verset 5), pas connu (verset 10). En effet, bien loin dâavoir été accueillie, la Parole vivante et personnelle fut rejetée, méprisée, crucifiée.
Quâest-ce maintenant quâil faut entendre par les mots chez soi, les siensâ¯? Presque tous les interprètes anciens et modernes les ont appliqués au peuple dâIsraël, qui est appelé dans lâÃcriture la propriété précieuse de Dieu, son peuple particulier (Exode 19.5â¯; Deutéronome 7.6â¯; Psaumes 135.4)â¯; les siens sont les propres concitoyens de Jésus, ses proches, ceux quâil aimait.
Cette désignation fait ressortir vivement lâingratitude et la culpabilité des Juifs. Reuss, Astié, M. Holtzmann entendent par ces termes, le monde ou lâhumanité tout entière, que Jésus venait sauver et qui était bien, en effet, sa propriété, puisquâil en était le Créateur (verset 10) et le Sauveur.
Cette explication méconnaît la progression évidente que Jean a voulu marquer entre verset 10 et verset 11 par cette grande paroleâ¯: Il est venu chez soi, qui nâest pas une simple répétition de lâidée énoncée aux versets 5, 9 et 10.
On objecte que, sâil faut entendre par les siens le peuple dâIsraël il faudrait aussi ne voir dans ceux qui croient au Sauveur (verset 12) que des Israélites, à lâexclusion de tous les autres.
Mais câest là une conclusion exagérerâ¯; elle ne tient pas compte du changement survenu dans les faitsâ¯: Jésus-Christ avait un chez soi, le peuple éluâ¯; à ce peuple sont substitués des individus, tous ceux qui (verset 12) le reçoivent par une consécration personnelle, en vertu de la nouvelle naissance (verset 13).
Verset 12
Jusquâici lâévangéliste, en nous retraçant lâhistoire de la Parole éternelle, nâa eu à signaler que lâaveuglement et lâincrédulité de ceux qui lâont méconnue, rejetée.
Maintenant il passe, par un mais significatif, au côté lumineux du sujet, à la foi de ceux qui, en recevant le Sauveur, sont devenus, par lui, enfants de Dieu.
à tous ceux qui lâont reçuâ¯; câest là lâopposé direct du fait signalé dans les versets 5, 10 et 11. Et, afin quâil ne reste aucun doute sur ce que lâapôtre entend par recevoir le Sauveur, il sâexplique en ajoutantâ¯: à ceux qui croient en son nom.
La foi, une confiance intime du cÅur en Celui qui sâoffre à nous comme Sauveur tel est le moyen de nous unir à lui, de lâembrasser, de le posséder avec toutes les richesses de sa grâce.
Croire en son nom, câest, au fond, croire en lui, mais Jean emploie ce terme parce que, dans le style de lâÃcriture, qui est celui de la vérité, le nom exprime lâessence intime et réelle dâun être (Matthieu 6.9, 3e note, Jean 3.18â¯; 1 Jean 3.23).
à ceux qui croient en lui, le Sauveur communique une grâce immenseâ¯: le pouvoir de devenir enfants de Dieu.
Il est difficile de rendre en français le sens complet du mot grec que nous traduisons par pouvoir. Ce nâest point le «â¯droitâ¯Â», selon nos anciennes versions, même celles de Lausanne et de Rillietâ¯; car ce mot est déplacé quand il sâagit dâune grâce divine, ce nâest point non plus la «â¯dignitéâ¯Â», ni le «â¯privilègeâ¯Â», ni la «â¯prérogativeâ¯;â¯Â» ce serait plutôt «â¯lâautoritéâ¯Â», la «â¯compétenceâ¯Â», en ajoutant à cette notion lâidée dâune force morale communiquée à lâhomme par Dieu et résultant de la position nouvelle dans laquelle le croyant est placé par sa foiâ¯: câest ce que nous appelons le pouvoir. La version anglaise ditâ¯: powerâ¯; Lutherâ¯: Macht.
Jésus donne à ses disciples autorité sur les esprits impurs, câest-à -dire évidemment «â¯le pouvoir de les chasser et de guérir toute maladieâ¯Â» (Matthieu 10.1â¯; Marc 3.15).
Voilà pourquoi on trouve ce mot dâautorité uni à celui de puissance (Luc 4.36â¯; Luc 9.1).
Or le Sauveur seul peut donner à de pauvres pécheurs, qui sont «â¯par nature enfants de colèreâ¯Â» (Ãphésiens 2.3), le pouvoir de devenir des enfants de Dieuâ¯; seul il peut les enrichir de toutes les dispositions morales que suppose ce beau titre. Câest là lâÅuvre de Dieu, lâeffet et la preuve de son amour immense (1 Jean 3.1).
Le verset suivant nous apprend comment sâopère cette transformation morale.
Verset 13
Lâapôtre exprime tout dâabord avec insistance la pensée quâaucune filiation humaine, aucun effort de la nature corrompue de lâhomme ou même de sa volonté ne peut engendrer des enfants de Dieu. «â¯Ce qui est né de la chair est chairâ¯Â» (Jean 3.6).
Pour devenir enfant de Dieu, il faut être né (grec engendré) de Dieu.
Ce nâest point là seulement une image, ces termes caractérisent dans toute sa réalité la transformation morale que lâÃcriture appelle régénération, nouvelle naissance, création nouvelle et que Dieu lui-même opère par la puissance de son Esprit (Jean 3.5â¯; Jacques 1.18â¯; 1 Pierre 1.23â¯; 1 Jean 5.1â¯; 2 Corinthiens 5.17).
Verset 14
Lâévangéliste continue son exposition par cette simple particule et, qui rattache le verset 14 à la fois au verset 11 et au verset 12. Au verset 11, que le verset 14 explique en disant comment Jésus-Christ «â¯est venu chez soiâ¯Â».
Au verset 12, quâil développe également en révélant le grand objet de la foi des croyants et en signalant lâévénement grâce auquel cette foi peut faire dâhommes nés de la chair des enfants de Dieu. En outre, comme lâobserve Meyer, il nomme la Parole pour la première fois depuis le verset 1â¯; afin de donner plus de solennité au fait quâil annonce et il exprime en trois mots le plus grand événement qui se soit accompli depuis la création du monde par cette même paroleâ¯: (verset 3).
La Parole est devenue chair. Quel contrasteâ¯! Quel abîme entre ces deux termesâ¯!
La chair, quâil ne faut pas confondre avec le corps, désigne, comme partout dans lâÃcriture, la nature humaine, lâhomme tout entier, dans lâétat de faiblesse, dâinfirmité, de souffrance et de mortalité auquel il se trouve réduit par suite du péché (Romains 1.4, note).
Lâon ne doit pas exclure cette idée de faiblesse quand on définit la chair quâa revêtue le Sauveur. Cette chair infirme ne le faisait pas participer au péché des hommesâ¯; elle le rendait seulement accessible à la tentation (Hébreux 4.15â¯; Romains 8.3, note).
Au reste, lâhistoire évangélique, en nous racontant la naissance de Jésus, nous met sur la voie de comprendre comment il nâeut aucune part à la corruption native de notre humanité (Matthieu 1.20â¯; Luc 1.35).
La déclaration du verset 14 signifie donc que la Parole éternelle est devenue pleinement homme en Jésusâ¯; que le Fils de Dieu, comme tous les enfants des hommes, a «â¯participé à la chair et au sangâ¯;â¯Â» (Hébreux 2.14) que lui, «â¯qui était en forme de Dieu, se dépouilla lui-même, prenant une forme de serviteur, fait à la ressemblance des hommesâ¯Â» (Philippiens 2.6-8â¯; comparez 1 Timothée 3.16).
Cette incarnation du Fils de Dieu, né au sein de notre humanité, afin de la sauver en la pénétrant dâune vie nouvelle, est, aux yeux de notre apôtre lui-même, le fondement de la foi chrétienne, à la position quâil prend en présence de ce fait, on peut reconnaître si un homme est de Dieu ou sâil porte en lui lâesprit de lâantéchrist (1 Jean 4.2-3â¯; 2 Jean 1.7).
Lâunion de la nature divine et de la nature humaine, qui ressort si clairement du rapprochement des verset 1 et verset 14, est un grand mystère, mais un «â¯mystère de piétéâ¯Â», comme Paul lâappelle parce quâil est, pour lâhomme pécheur, là source de sa réconciliation avec Dieu et de toute vie chrétienne (1 Timothée 3.16).
Il est permis à la théologie, fondée sur lâexpérience religieuse, de sâefforcer de sonder ce mystère, pour que, sâil est possible, la raison le saisisse aussi bien que la foi. Mais il faut avouer que jusquâà ce jour ces louables tentatives nous ont laissés en présence du mystère avec les mêmes aspirations que nourrissait Mélanchton quand, sur son lit de mort, il se réjouissait dâarriver bientôt à connaître comment Jésus-Christ pouvait être à la fois Fils de Dieu et Fils de lâhomme, Parole éternelle devenue chair.
Ici-bas «â¯nous connaissons en partie et nous prophétisons en partieâ¯;â¯Â» un jour «â¯je connaîtrai pleinement comme jâai été connuâ¯Â» (1 Corinthiens 13.9-12).
Le mot que nous traduisons par elle a habité signifie proprement dresser une tente et y séjourner. Ce terme fait allusion à la tente où lâÃternel habitait au milieu de son peuple dans le camp dâIsraël et qui fut remplie de la gloire de lâÃternel, lors de son inauguration (Exode 40.34â¯; comparez Ãzéchiel 37.27).
Ce fait était lâaccomplissement visible des promesses de Dieu dâhabiter au milieu de son peuple (Exode 25.8â¯; Exode 29.45â¯; Lévitique 26.11-12â¯; Ãzéchiel 37.27).
Les commentateurs juifs désignaient toutes les formes sensibles par lesquelles Jéhova manifestait sa présence au sein dâIsraël, par le terme de Schekina, la demeure de Dieu.
Notre évangéliste, en disant de la Parole quâelle a habité sous une tente parmi nous, rappelle ces glorieuses manifestations de Dieu à Israël et les voit réalisées dans leur plénitude par lâincarnation de la Parole. En elle Dieu nous est véritablement apparu, il est descendu à notre portée, semblable à nous, accessible au plus pauvre, au plus faible, au plus ignorant, au plus coupable. Et dans lâaccomplissement des temps, cette demeure de Dieu avec nous sera la plénitude de sa communion, de sa lumière, de son amour (Apocalypse 7.15â¯; Apocalypse 21.3).
Les mots parmi nous ne se rapportent ni aux hommes en général, ni exclusivement aux apôtres, mais auxâ¯: croyants, à tous ceux qui avaient reçu le Sauveur (verset 12) et contemplé sa gloire.
Saisi par la majesté de cette apparition du Fils de Dieu sur notre terre, lâévangéliste, qui rappelle avec émotion ses souvenirs personnels, donne essor à ses sentiments en célébrant la gloire dont a resplendi, même dans son abaissement, la Parole faite chair. Cette gloire, Jean lâa contemplée son âme en a été pénétrée (1 Jean 1.1).
Mais en quoi consista cette manifestation de la gloire du Fils de Dieu apparu sous sa forme de serviteur� Pas seulement dans ses miracles (Jean 2.11) ou dans sa transfiguration sur la sainte montagne. Pour ceux qui surent la contempler, la gloire de Jésus-Christ fut sa sainteté, son amour, ses tendres compassions pour les malheureux et les coupables, son héroïque dévouement dans ses souffrances et dans sa mort, en un mot, sa vie entière, unique au sein de notre humanité.
Cette gloire a brillé surtout dans ce qui a été le trait dominant de la vie du Christ, sa relation filiale dâobéissance et de communion avec son Père.
Cette interprétation sâaccorde avec le fait que Jésus avait quitté lors de son incarnation la gloire divine, dont il jouissait auprès du Père comme Parole éternelle puisquâil la redemande au moment où il va retourner auprès du Père (Jean 17.5).
Et dâautre part, cette interprétation est confirmée par Jean lui-même, quand il ajoute, à la fin de notre versetâ¯: «â¯Que cette gloire était telle que celle du Fils unique, venu du Père et que la Parole est apparue pleine de grâce et de véritéâ¯Â».
Ici se trouve pour la première fois, ce terme de Fils unique (grec unique né), qui ne se rencontre que dans les écrits de Jean (Jean 1.18â¯; Jean 3.16-18â¯; 1 Jean 4.9) et qui exprime si bien le rapport métaphysique et exclusif du Fils de Dieu avec son Père.
Tous les hommes régénérés, nés de Dieu, sont enfants de Dieu, fils de Dieu (Romains 8.14 et ailleurs)â¯; mais le nom de Fils unique élève la pensée à une relation divine à laquelle aucune créature ne peut prétendre.
Paul exprime à peu près la même idée par le terme de premier-né (Colossiens 1.15).
Ces derniers mots par lesquels lâévangéliste achève de peindre lâapparition du Sauveur sur la terre, se rapportent à la Parole, ce qui fait que la plupart des traducteurs rendent ainsi le commencement de notre versetâ¯: «â¯La Parole est devenue chair et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de véritéâ¯Â».
Nous avons préféré conserver lâordre adopté par lâévangéliste.
Il achève maintenant son tableau par ce trait sublimeâ¯: elle était pleine de grâce et de vérité.
En maintenant ces mots à la fin de la phrase, nous leur laissons tout leur relief.
La grâce et la vérité furent, en effet, les deux traits les plus saillants du caractère du Sauveur dans toute sa vie.
La grâce nâest quâun autre nom de la miséricorde et de lâamour de Dieu qui pardonne au pécheur et sâabaisse vers lui. Ce sentiment de la faveur de Dieu a pour fruit la paix (1 Corinthiens 1.3â¯; 2 Corinthiens 1.2â¯; Galates 1.3 et ailleurs).
La vérité est lâessence de Dieu, sa pensée et sa volonté dévoilées, elles ont été fidèlement manifestées dans la vie et dans lâenseignement de Jésus.
Ces paroles nous redisent donc quâen Jésus Dieu lui-même sâest donné et révélé aux hommes. En effet, il est bon de se rappeler que ces mots grâce et vérité nâétaient pas nouveaux, bien quâils nâaient trouvé que dans le Sauveur la plénitude de leur signification. Dans lâAncien Testament déjà , ils servent à exprimer les deux traits essentiels du caractère de Dieu (Exode 34.6-7â¯; Psaumes 25.10â¯; Psaumes 26.3 et souvent ailleurs). à ces deux traits, les témoins de la vie de Jésus ont donc reconnu en lui le Fils unique venu du Père.
Verset 15
Pour la seconde fois, dans le prologue, lâévangéliste invoque le témoignage de Jean-Baptiste (versets 6 et 7).
Son intention nâest pas encore de retracer le rôle historique du Précurseurâ¯; il le fera ci-aprèsâ¯; il veut appuyer son propre témoignage relatif à lâincarnation de la Parole éternelle sur les déclarations du prophète auquel il devait lui-même la première révélation de ce mystère. Tel est le but de cette remarque du verset 15, qui paraît interrompre le discours.
Après avoir invoqué lâautorité de Jean-Baptiste, lâévangéliste continue en rapportant son expérience personnelle, qui est celle de tous les croyantsâ¯: nous avons reçu de sa plénitude la grâce et la vérité (versets 16 et 17). Les motsâ¯: Celui dont je disais,⦠reproduisent littéralement le témoignage rapporté au verset 30â¯; celui-ci fait allusion au premier témoignage (verset 27).
Les premiers mots de ce témoignage sont énigmatiques et renferment une contradiction intentionnelle dans les termesâ¯: Celui qui vient après moi, puisquâil nâest pas encore entré dans son ministère, mâa précédé, selon lâordre des temps, vu quâil était avant moi, quâil existait antérieurement à son apparition sur la terre, dans lâéternité.
Les paroles du Précurseur confirment ainsi celles de lâévangéliste.
La plupart des interprètes entendent ces motsâ¯: mâa précédé, dans le sens deâ¯: mâa surpassé, est préféré, est supérieur à moiâ¯; en un mot, comme désignant le rang, la dignité et non lâordre des temps.
Avec Meyer, MM. Weiss et Godet, nous préférons le sens indiqué, qui seul conserve à la pensée son caractère énigmatique et paradoxal.
Le dernier mot du témoignage de Jeanâ¯: il était avant moi (grec il était mon premier) est, de même, entendu par plusieurs de la supériorité de rang.
Il eut fallu non lâimparfait était, mais le présent est.
Cette déclaration, comprise dans le sens de lâantériorité, nâest pas une répétition de la précédente, car celle-ci nous plaçait sur le terrain de lâhistoire (il a été là avant moi), tandis que la seconde se rapporte à la nature (il était) du Fils de Dieu.
Cette double affirmation suppose chez Jean-Baptiste la connaissance de la préexistence du Christ. Et câest là ce que certains exégètes trouvent peu probable. Mais cette connaissance est-elle inadmissible chez un si grand prophète, rempli de lâEsprit de Dieu et éclairé par les révélations de sa Paroleâ¯?
Dépasse-t-elle ses autres vues lumineuses sur la personne et sur lâÅuvre du Sauveurâ¯? Nâest-ce pas lui qui lâappelle «â¯lâAgneau de Dieu qui ôte le péché du mondeâ¯?â¯Â» (verset 29, note). Il lui suffisait, dâailleurs, de bien comprendre Malachie 3.1, pour nâavoir pas le moindre doute sur la préexistence du Messie (Matthieu 11.10â¯; Marc 1.2, note).
Verset 16
Câest lâévangéliste et non plus Jean-Baptiste, qui parle ici. Il énonce lâexpérience de tous les croyants qui vient sâajouter au témoignage du Précurseur (verset 15), pour confirmer le grand fait de lâincarnation, attesté par les témoins immédiats de la vie du Christ (verset 14).
Toutes ces richesses de Christ, les croyants membres de lâÃglise (nous tous), les connaissent par les dons quâils ont reçus de sa plénitude.
Ce dernier mot ramène la pensée à celui du verset 14, pleine de grâce et de vérité. La liaison de ces deux termes est encore plus frappante si lâon admet au commencement du verset 16 la variante de Codex Sinaiticus, B, C, D, car, au lieu de etâ¯: la Parole a habité parmi nous pleine de grâce et de vérité, car tous nous avons reçu de sa plénitude.
Mais il faudrait en ce cas faire du verset 15 une simple parenthèse, dont il serait difficile dâexpliquer la raison dâêtre. M. Weiss suppose que le car porte sur le fait même du témoignage de Jean-Baptiste et non sur son contenuâ¯: Jean a pu rendre son témoignage, parce que nous tous (par conséquent lui-même aussi) avons reçuâ¦
Câest la meilleure interprétation du car, si on le considère comme la vraie leçon, mais elle donne à la pensée un tour bien alambiqué. Cette difficulté exégétique nous engage à conserver le et du texte reçu.
Le verbeâ¯: nous avons reçu est employé sans régime. Lâévangéliste attire dâabord lâattention sur le fait même quâexprime ce verbeâ¯: nous avons puisé à cette source inépuisable. Dans la suite de la phrase, introduite par et, il précise les dons reçusâ¯: grâce pour grâce, une grâce suivant toujours et dépassant la grâce précédente, une succession non interrompue de grâces qui émanent de lâinépuisable plénitude de la Parole faite chair.
Tel est le témoignage de lâexpérience chrétienne, qui se trouve exprimé aussi par Paul en divers passages de ses épîtres. Par exemple Romains 5.1-5â¯: justification, paix avec Dieu, libre accès auprès de lui espérance de la gloire, force dans les afflictions, amour de Dieu répandu dans nos cÅurs par lâEsprit-Saint (voir encore Ãphésiens 3.16-19, où une chaîne ininterrompue de grâces conduit lââme chrétienne jusquâà la plénitude de Dieu).
Verset 17
Ce verset motive et explique le précédent (car)â¯; non quâil faille entendre la loi et lâÃvangile comme une explication des mots grâce pour grâce, en sorte que lâancienne alliance eût été une première grâce et la nouvelle une autre grâce ajoutée à la première.
Cette interprétation méconnaît le fait quâici la grâce et la vérité sont mises en opposition avec la loi et que le but de lâévangéliste est de faire ressortir la grandeur, la richesse et la beauté de lâÃvangile apporté par le Sauveur.
La loi, en effet, ne peut que commander, exiger, condamnerâ¯; elle ne donne rien à lâhomme pécheur. La grâce, au contraire, répond à tous ses besoins, elle est pour lui le pardon, lâamour divin, le salut tout entier. Câest dans ce sens complet quâil faut prendre le mot grâce (avec lâarticle).
Il en est de même de la vérité que lâapôtre entend dans son sens absolu, comme la révélation de Dieu lui-même et de ses perfections. Elle était imparfaite sous lâéconomie de la loiâ¯; elle devient parfaite par le moyen de la grâce.
Ainsi le contraste que ces deux grandes dispensations, la grâce et la vérité, forment avec la loi, est complet à un double égardâ¯: pour celui que la loi condamne, voici la grâceâ¯; et au lieu des ombres et des figures que présentait la loi, voici la vérité (comparez Romains 10.4â¯; Hébreux 10.1 et suivants).
Lâévangéliste marque un autre contraste entre Moïse, par lâentremise duquel la loi fut donnée et Jésus-Christ, par qui sont venues la grâce et la vérité
Verset 18
Cette grande déclaration, qui couronne si admirablement le prologue, se lie étroitement au verset précédent et explique comment la vérité, la vérité absolue qui est Dieu, est venue par Jésus-Christ.
Avant lui, hors de lui, personne ne vit jamais Dieu, pas même Moïse (Exode 33.20-23â¯; 1 Jean 4.12â¯; Colossiens 1.15â¯; 1 Timothée 6.16).
Voir Dieu, câest avoir une intuition immédiate de son essence, de ses perfections et câest ce qui nâa jamais été donné à aucun homme sur la terre et qui reste la prérogative exclusive du Fils unique (voir sur ce nom verset 14, 4e note).
Jean avait entendu cette déclaration de la bouche même de son Maître (Jean 6.46â¯; Matthieu 11.27).
Tout homme déchu serait resté à jamais exclu dâune connaissance parfaite de Dieu, sâil ne nous avait été révélé en Jésus-Christ. Mais câest cette révélation même que lâévangéliste proclame maintenant avec bonheur. Et pour que nous comprenions mieux encore comment le Fils unique pouvait nous faire connaître Dieu (grec le révéler, lâexpliquer), il dépeint sa communion parfaite avec lui, par ces mots profondsâ¯: le Fils unique qui est dans le sein (comparez Jean 13.23, note) du Père.
Quelques interprètes (Meyer, Hofmann, Weiss) voient dans ces mots la relation du Fils avec Dieu après son retour dans la gloire et non durant son état dâabaissement sur la terre.
Jean emploierait cette expression en se plaçant au point de vue du temps où il écrivaitâ¯: qui est maintenant dans le sein du Père.
Mais, comme le fait justement observer M. Godetâ¯:
Jésus a toujours été dans le sein du Père, par sa communion intime avec luiâ¯; il était «â¯dans le cielâ¯Â» (Jean 3.13) tout en vivant sur la terre et, en mainte occasion, il déclare dans notre Ãvangile quâil ne parle que selon ce quâil voit et entend de son Père.
Câest parce quâil était dans le sein du Père quâil a pu être, non seulement le révélateur, mais la révélation même de Dieu.
Jean affectionne ce beau et doux nom de Père, parce que Jésus exprimait habituellement par ce nom lâineffable amour qui est lâessence de Dieu.
Aussi, en contemplant son Maître, le disciple a trouvé cette définition sublime de Dieuâ¯: Dieu est amour.
Ce verset 18 résume tout le prologue, qui nâa dâautre but que de nous montrer dans le Fils unique la révélation même de Dieu et dâamener les hommes à la foi en lui. Câest là aussi le but de tout cet Ãvangile (Jean 20.31).
Codex Sinaiticus, B, C portentâ¯: «â¯le Dieu Fils unique qui est dans le sein du Pèreâ¯Â». Cette variante a donné lieu à de savantes discussions, desquelles il résulte que les deux leçons existaient déjà au deuxième siècle.
La leçonâ¯: le Dieu Fils unique, est attestée par les Pères alexandrins à peu près exclusivement. Elle ne trouve son analogue dans aucun texte du Nouveau Testament.
Verset 19
Jean répond aux délégués du sanhédrin
Jean désigne Jésus
Le lendemain, Jésus venant à lui, Jean le désigne comme lâAgneau de Dieu. Il affirme que Jésus était avant lui, quâil a vu lâEsprit descendre et sâarrêter sur lui et que, de cette manière, Dieu le lui a fait connaître. Sur la foi de ce signe, il atteste que Jésus est le Fils de Dieu (29-34).
Première partie de 1.19 à 4.54
Le fils de Dieu
Le prologue étant clos, lâévangéliste commence sa narration en rapportant le témoignage de Jean-Baptiste. Les synoptiques, de même, placent en tête le ministère du Précurseur. Mais tandis quâils rapportent la prédication que Jean adressait au peuple pour lui annoncer la venue prochaine du royaume de Dieu et lâémouvoir à la repentance, notre évangéliste ne nous a conservé que les paroles par lesquelles Jean a présenté Jésus à Israël et lâa désigné à ses disciples comme le Fils de Dieu. Il introduit son récit simplement par la particule et, sâen référant au verset 15, où ce témoignage de Jean a été invoqué comme un argument pour la foi. Il va dire à quel moment et dans quelles circonstances ce témoignage avait été rendu.
Lâoccasion du premier témoignage de Jean-Baptiste fut une députation de membres du sanhédrin, envoyés auprès de lui pour sâenquérir de son autorité Nous rencontrons ici pour la première fois cette expressionâ¯: les Juifs, qui revient fréquemment dans le quatrième évangile. Désignant primitivement les membres de la tribu de Juda, ce terme avait été étendu, depuis lâexil, à tout ce qui restait du peuple de Dieu. Jean lâemploie tantôt dans ce sens général, comme synonyme dâIsraélite (Jean 2.6-13â¯; Jean 3.1â¯; Jean 7.2), tantôt en lui attribuant une signification religieuse, en lâappliquant au peuple incrédule et rebelle à la prédication de lâÃvangile, spécialement aux autorités de Jérusalem, dans lesquelles se concentrait cette résistance (Jean 2.18â¯; Jean 5.10â¯; Jean 5.15-16â¯; Jean 6.41-52â¯; Jean 7.11-13â¯; Jean 11.45, etc.).
On a allégué lâemploi de cette expression les Juifs et le sens défavorable qui sây trouve attaché, pour prouver que lâauteur nâétait pas lui-même dâorigine juive. Mais à lâépoque où Jean écrivait, après la ruine de Jérusalem et la dispersion des Juifs, ceux-ci ne formaient plus une nation.
Lâappellation de Juifs avait pris une signification plus religieuse que politique. Il était naturel que Jean lâappliquât à une communauté à laquelle il nâappartenait plus, de laquelle au contraire, il était séparé profondément par sa qualité de disciple de Jésus-Christ (comparer Apocalypse 2.9â¯; Apocalypse 3.9â¯; 1 Thessaloniciens 2.14-16).
La députation se composait de sacrificateurs, membres du sanhédrin, appartenant à la secte des pharisiens (verset 24) et de Lévites, qui leur servaient dâacolytes et de secrétaires.
Câétait donc une délégation officielle et solennelle qui venait poser au Précurseur cette questionâ¯: Toi, qui es-tuâ¯? Lâautorité théocratique avait pour mission de veiller à tous les intérêts religieux de la nation (Matthieu 21.23).
Or Jean baptisait en vue du royaume messianique (verset 25)â¯; il excitait une grande attention parmi le peuple (Matthieu 3.5) qui allait le reconnaître pour le Messie (Luc 3.15)â¯; le sanhédrin ne manquait donc pas de raisons pour lui demander officiellement qui il était et pour rechercher, en particulier, sâil nâaurait pas peut-être la prétention dâêtre le Christ.
Verset 20
Il nâest pas rare que lâévangéliste, voulant accentuer fortement une pensée, lâexprime à la fois sous forme négative et positive.
Câest ce quâil fait ici, pour dire que le Précurseur déclara sans hésiter et nettement quâil nâétait pas le Christ.
Selon le texte reçu, il faudrait traduireâ¯: «â¯je ne suis point le Christâ¯Â».
Une variante de Codex Sinaiticus, B, A, C, Itala présente ainsi lâordre des motsâ¯: moi, je ne suis point le Christ, ouâ¯: ce nâest pas moi qui le suis. Câétait dire aux membres de la députation quâun autre lâétait et que cet autre était présent au milieu dâeux.
Verset 21
Dans ce rapide dialogue, les questions sont dictées par lâattente, alors générale, dâun envoyé de Dieu. Cette attente, qui avait été excitée par lâapparition de Jean-Baptiste, se reportera plus tard sur Jésus lui-même (Matthieu 16.14).
Quoi doncâ¯? demandent-ils, quâest ce à direâ¯? Que se passe-t-il donc (B porteâ¯: quâes-tu doncâ¯?)â¯?
Il y a, dans cette question, quelque impatience.
Jean-Baptiste nie quâil soit Ãlie. Il est vrai quâil le représentait spirituellement (Malachie 4.5â¯; comparez Luc 1.17â¯; Matthieu 11.14â¯; Matthieu 17.11-12)â¯; mais comme les délégués du sanhédrin, dans leurs vues charnelles pensaient à un retour personnel dâÃlie, il pouvait répondre négativement, car il nâétait pas Ãlie dans le sens quâils donnaient a ce mot.
Leur dernière questionâ¯: Es-tu le prophèteâ¯? (non «â¯un prophèteâ¯Â»), était inspirée par Deutéronome 18.15.
Dans ce prophète que Dieu promettait par la bouche de Moïse, les uns voyaient le Christ lui-même (Jean 1.46â¯; Jean 6.14â¯; Actes 3.22â¯; Actes 7.37)â¯; dâautres, seulement lâun de ses précurseurs (Jean 7.40-41). Cette dernière opinion était celle des députés du sanhédrin.
Jean-Baptiste répond encore non, parce que, dans son humilité, il ne veut pas se proclamer lui-même un prophète «â¯semblable à Moïseâ¯Â».
Verset 23
Ãsaïe 40.3, dâaprès les Septante, sauf quâon trouve ici dressez, au lieu de préparez le chemin.
Les motsâ¯: dans le désert peuvent se rapporter, en grec comme en hébreu, soit à la phrase qui précèdeâ¯: voix de celui qui crie, soit au verbe qui suitâ¯: dresser (voir sur cette prophétie Matthieu 3.3â¯; Marc 1.2â¯; Luc 3.4, note).
Verset 24
Lâévangéliste relève maintenant seulement le fait que les délégués étaient des pharisiens, parce que leur attitude hostile va sâaccuser dans la question suivante.
Codex Sinaiticus, B, A, C présentent une variante qui pourrait se traduireâ¯: et ils avaient été envoyés de la part des pharisiens.
Cette variante paraît provenir dâune erreur de copiste. Même en lâadmettant, on peut voir dans le texte un hébraïsme quâil faudrait rendre parâ¯: «â¯des pharisiens avaient été envoyésâ¯Â» (comparer Jean 16.17).
Verset 25
Les pharisiens ne se contentent pas de la réponse de Jean (verset 23), quâils trouvent sans doute trop vague pour lui donner des titres à sa mission.
Rigoureux observateurs de la loi et des traditions reçues, ils sont indignés que Jean se permette une innovation comme celle du baptême, puisquâil déclare lui-même quâil nâest, ni le Christ, ni Ãlie, ni le prophète. Pourquoi donc baptises-tuâ¯?
Par cette question, ils pensent le convaincre dâune usurpation de pouvoirs.
Verset 27
Par ces motsâ¯: Moi je baptise dâeau, Jean oppose à son humble personne le Messie qui va se manifesterâ¯; il se hâte de diriger lâattention de ses interlocuteurs sur Celui qui déjà se trouve au milieu dâeux, quâils ne connaissent point.
Lui substituera au baptême dâeau, pratiqué par Jean et qui nâa quâun caractère préparatoire, le vrai baptême, le baptême de lâEsprit-Saint (verset 33), ou, comme il est appelé dans Matthieu 3.11 (4e note), le baptême «â¯dâEsprit Saint et de feuâ¯Â».
Ainsi le Précurseur se place sous lâautorité du Christ dont la présence justifiait et rendait nécessaire son baptême dâeauâ¯; car celui ci, comme baptême de repentance, devait préparer les âmes à la foi.
Quant au paroles qui suivent, voir verset 15, 2e note. Les motsâ¯: qui mâa précédé (grec qui a été là avant moi), manquent dans Codex Sinaiticus, B, C, mais au verset 30, Jean reproduit ce témoignage et il est naturel de supposer quâil le fait dans des termes identiques à ceux quâil avait employésâ¯: or les mots incriminés se lisent au verset 30.
Après avoir précisé sa mission, le Précurseur sâhumilie profondément devant Celui quâil annonceâ¯; il nâest pas même digne de lui rendre le service dâun esclave, en déliant la courroie de sa chaussure (Marc 1.7â¯; Luc 3.16).
Verset 28
Les témoignages sont presque unanimes en faveur du nom de Béthanie et contraires à celui de Béthabara, qui se lit dans le texte reçu.
Origène rapporte quâil ne trouva point de Béthanie au-delà du Jourdain mais bien un lieu nommé Béthabara, que la tradition désignait comme celui où Jean baptisait.
Mais il reconnaît que presque tous les manuscrits de son temps portaient Béthanie. Il est probable que sous lâinfluence de ce Père la leçon Béthabara fut substituée à la leçon primitive Béthanie.
Au temps de Jean-Baptiste, il a pu se trouver dans cette contrée une localité obscure nommée Béthanie, qui aura été détruite, comme tant dâautres villes et villages, pendant la guerre romaine.
En tout cas, il est impossible de supposer que lâévangéliste ait pu confondre ce Béthanie avec le village de Marthe et Marie, quâil connaissait si bien (Jean 11) et qui était situé loin du Jourdain, à une petite distance de Jérusalem et du mont des Oliviers.
Quelques critiques ont contesté le caractère historique de ce récit. Ils nây ont vu quâune amplification de celui de Luc 3.15 et suivants (comparez Marc 1.7-8)â¯; Mais lâindication précise du lieu (verset 28) et des députés du sanhédrin (versets 19 et 24) conduisent a distinguer les deux scènes.
Dans Luc 3.15, le Précurseur annonce, en termes vagues, lâavènement prochain du Messie. Cette déclaration est antérieure au baptême de Jésus (Luc 3.21).
Le récit de Jean (versets 19-28), où le Précurseur désigne Jésus personnellement, nous transporte à une époque postérieure au baptême et probablement aux quarante jours de la Tentation dans le désert (Marc 1.12).
Câest ce qui ressort des versets 31-33, où Jean-Baptiste déclare quâil ne connaissait pas Jésus avant que celui-ci vint lui demander le baptême. Ces mêmes versets détruisent lâopinion de ceux qui ont prétendu que le quatrième Ãvangile ignore le baptême de Jésus, car ils renferment une évidente allusion au récit que les synoptiques font de ce baptême.
Verset 29
Au moment de rapporter un second témoignage que le Précurseur rendit en présence de ses disciples, lâévangéliste en marque le temps précisâ¯: le lendemain.
Il donnera de semblables indications aux versets. 37â¯; et 44. Le souvenir de ces trois journées consécutives est resté ineffaçable dans le cÅur de Jean, car ce furent les jours de sa première rencontre avec Jésus et, par là même, de sa naissance à la foi et à une vie nouvelle.
Jean voit Jésus qui vient à lui, non point pour être baptisé, le baptême a eu lieuâ¯; mais bien, comme nous lâapprendra la suite de ce chapitre, pour chercher et trouver parmi les disciples de Jean ses premiers disciples. Lâévangéliste ne dit pas dâoù il venaitâ¯: il revenait probablement du désert et de sa première lutte avec la puissance des ténèbres (note précédente).
Ces termes, si profonds et si vrais par lesquels Jean-Baptiste présente le Sauveur à ses disciples, peuvent, au premier abord, nous étonner, mais ils nâavaient rien dâinusité pour des Israélites. Et dâabord, cette imageâ¯: lâAgneau (avec lâarticle qui dessine un agneau spécial) était bien connue de tout lecteur de lâAncien Testament. Ãsaïe (Ãsaïe 53.7) avait annoncé le serviteur de lâÃternel comme un «â¯agneau quâon mène à la boucherie, une brebis muette devant ceux qui la tondentâ¯;â¯Â» et tous les écrivains du Nouveau Testament ont appliqué cette prophétie au Sauveur, comme lâavaient fait, avant eux, plusieurs interprètes juifs.
En ajoutant que câest là lâAgneau de Dieu, le Précurseur fait comprendre que ce nâest pas lâhomme qui sâest donné un Sauveur mais quâil lui vient de la miséricorde éternelle de Dieu. Peut-être même faut-il remonter plus haut quâÃsaïe pour retrouver lâimage sous laquelle il peignait le Libérateur futur de son peuple. Câétait par le sang dâun agneau que ce peuple avait été sauvé de la destruction en Ãgypte (Exode 12.13)â¯; et dès lors, chaque année, Israël célébrait la Pâque en immolant un anneau, en souvenir de cette délivrance.
Cette idée de lâagneau pascal nâest point étrangère au Nouveau Testament (Jean 19.36â¯; 1 Pierre 1.19)â¯; pourquoi le serait-elle au passage qui nous occupe, comme le prétendent plusieurs interprètes qui préfèrent sâen tenir exclusivement à la prophétie dâÃsaïeâ¯? Les deux opinions se concilient parfaitement.
Quoi quâil en soit, si le Précurseur désigne le Sauveur par cette image dâun agneau, ce nâest point seulement pour indiquer lâinnocence et la douceur qui le distinguent, mais afin dâexprimer ce grand fait qui est le but essentiel de sa missionâ¯: il ôte le péché du monde. Le verbe que nous traduisons ainsi signifie également porter (Matthieu 11.29â¯; Matthieu 16.24) et ôter (Jean 11.39â¯; Jean 17.15â¯; 1 Jean 3.5).
Ce dernier sens doit être préféré, car si Jean-Baptiste avait désigne seulement le Messie comme portant le péché, lâévangéliste, pour traduire sa parole, se fût servi du verbe employé par les Septante dans Ãsaïe 53.
Les deux idées, loin de sâexclure, se supposent du reste lâune lâautre. La sainte victime ôte le péché, parce que dâabord elle lâa portéâ¯: elle en a fait lâexpiation en présence de la justice divine. Câest la grande vérité qui se retrouve clairement enseignée dans la prophétie de (Ãsaïe 53.4â¯; Ãsaïe 53.5-6â¯; Ãsaïe 53.10-12), comme dans tout le Nouveau Testament (Matthieu 8.17â¯; Luc 22.37â¯; Actes 8.32â¯; 1 Pierre 1.19â¯; 1 Pierre 2.24â¯; 1 Jean 2.2â¯; Jean 3.5).
Le péché (non les péchés) exprime la maladie morale et la culpabilité de lâhomme, dans son ensemble, dans son unité réelle et profonde (Jean 8.21â¯; Romains 6.1, etc.).
Le péché du monde, dit enfin Jean-Baptiste et cette grande parole élève la pensée jusquâà lâuniversalité de lâÅuvre de la rédemption quâaccomplira le Sauveur et qui ne sera révélée aux apôtres eux-mêmes que beaucoup plus tard (1 Jean 2.2).
Mais cette déclaration du Précurseur est trop lumineuse, trop évangélique, pour que bien des interprètes ne lâaient pas déclarée inadmissible dans sa bouche et nâaient pas soupçonné lâévangéliste de lui avoir prêté sa propre pensée.
Il suffirait peut-être, pour réfuter cette opinion dâobserver que Jean-Baptiste était prophète, le plus grand des prophètes, quâil était éclairé par lâEsprit de Dieu et quâil connaissait les Ãcritures où se trouvait annoncée à lâavance toute lâÅuvre divine du salut (Ãsaïe 52.13-15â¯; Ãsaïe 53.11â¯; Ãsaïe 19.23-25â¯; Genèse 12.3), mais nous préférons rappeler simplement avec Meyer que, comme il le déclare positivement lui-même (verset 33), il avait reçu de Dieu une révélation au sujet du Sauveur quâil devait annoncer.
Verset 30
Jean-Baptiste répète solennellement, devant ses disciples, le témoignage quâil avait prononcé en présence de la délégation du sanhédrin (verset 26) et que lâévangéliste avait invoqué au verset 15 (voir la 2e note).
Verset 31
Le Précurseur raconte (versets 31-34) comment il est arrivé à la certitude que Jésus est le Messie. Il justifie ainsi le beau témoignage quâil venait de lui rendre (versets 29 et 30)â¯; ce témoignage reposait exclusivement sur lâordre et la révélation de Dieu (verset 33, comparez Luc 3.2).
Câest pour obéir à lâordre de Dieu quâil sâétait mis à baptiser dâeau, expression qui embrasse tout son ministère comme précurseur. En commençant ce ministère, il savait seulement que le Messie allait être manifesté à Israël et que sa propre vocation consistait à lui préparer les voies.
Cette déclarationâ¯: je ne le connaissais pas, que Jean répète au verset 33, signifie quâil ne savait pas que Jésus fût le Messieâ¯; pour en être assuré il eut besoin du signe qui lui avait été annoncé et qui lui fut donné par Dieu (versets 33 et 34).
M. Godet entend ces mots dans un sens absolu et pense que Jean-Baptiste, qui avait vécu dans les déserts, nâavait jamais rencontré Jésus et ne le connaissait même pas comme homme.
Cette supposition nâest pas inadmissible, mais peu probable puisque Jean était parent de Jésus et que leurs familles soutenaient des rapports intimes (Luc 1.36-39 et suivants).
Mais même appliquée à la messianité de Jésus la déclaration du Précurseur paraît en contradiction avec le récit de (Matthieu 3.14), où Jean refuse de baptiser Jésus et lui ditâ¯: «â¯Câest moi qui ai besoin dâêtre baptisé par toi et tu viens à moiâ¯!â¯Â»
Comment expliquer ce refus, si Jean ignora que Jésus fut le Messie jusquâau moment où Jésus, sortant de lâeau, reçut lâEsprit sous une forme visibleâ¯?
Meyer pense que Jean eut une sorte de pressentiment prophétique de la messianité de Jésus. M. Godet suppose que Jean eut un entretien intime avec Jésus, avant le baptême, comme il en avait généralement avec ceux qui venaient à lui et qui, à ce moment, confessaient leurs péchés.
Dans cet entretien, Jean-Baptiste fut frappé des dispositions uniques de ce pénitent dâun nouveau genre qui nâavait aucun péché sur la conscience. La vérité quâil commença dâentrevoir et qui lui arracha lâhumble protestation conservée par Matthieu, lui fut pleinement confirmée par la manifestation divine qui suivit le baptême.
Telle est la manière la plus naturelle de concilier les deux récits. Selon Lücke, il y aurait eu transposition dans le récit de Matthieuâ¯: la parole du verset 14 nâaurait été prononcée quâaprès le baptême de Jésus.
Cette hypothèse serait confirmée par lâÃvangile des Hébreux qui rapporte les faits dans cet ordreâ¯; mais câest là , il faut en convenir, un assez faible témoignage.
Verset 32
Ces motsâ¯: Et Jean rendit témoignage, sont de lâévangéliste qui interrompt ainsi le discours du Précurseur afin dâintroduire dâune manière solennelle son témoignage.
Jean-Baptiste pouvait dire quâil avait vu lâEsprit descendre du ciel, parce quâil se présenta sous une forme visible, «â¯comme une colombeâ¯Â».
Le témoignage de Jean, dans notre évangile, est donc en pleine harmonie avec le récit des synoptiques (Matthieu 3.16â¯; Marc 1.9-11, Luc 3.22, voir les notes) et il exclut nettement lâidée de quelques interprètes (Tholuck, Meyer, Astié), que Jean-Baptiste nâaurait eu quâune vision intérieure, produite par une action de lâEsprit de Dieu sur lâesprit du prophète et nâaurait pas contemplé un phénomène qui tombât sous les sens.
à quoi bon alors ce symbole de la colombeâ¯? Câest sous cette «â¯forme corporelleâ¯Â» (Luc 3.22), qui rappelle le phénomène des langues de feu descendant sur la première Ãglise et se posant sur chacun des assistants (Actes 2.3), que Jean vit lâEsprit descendre et demeurer sur Jésus.
Verset 33
Jean-Baptiste tient à répéter quâil ne connaissait pas Jésus comme le Messie (verset 31, note), que par conséquent son témoignage ne venait pas de lui, puis il fait remonter la certitude de ce témoignage jusquâà Dieu lui-même, qui, en lâenvoyant remplir sa mission, lui avait donné un signe lui ne devait laisser aucun doute dans son esprit (verset 34).
Quelques interprètes pensent que, selon le récit de notre évangéliste, Jésus nâaurait point reçu, lors de son baptême, un don nouveau et spécial du Saint-Esprit, puisquâil avait toujours été, en tant que Parole faite chair, sous lâinfluence de cet Esprit.
Le but exclusif de la scène rapportée par Jean-Baptiste aurait été de donner à celui-ci la certitude que Jésus était le Messie.
Cette idée est en contradiction directe avec le récit des synoptiques, suivant lequel les manifestations divines qui se produisent au baptême de Jésus sâadressent à celui-ci en premier lieu (voir les notes) et elle ne saurait être attribuée à lâauteur du quatrième évangile, car elle méconnaît le fait de lâincarnation, point capital du Prologue (verset 14).
Ce fait, envisagé dans toutes ses conséquences, nous oblige à admettre que Jésus a passé, dans son enfance et sa jeunesse, par un développement religieux et moral (Luc 2.40) il lâaccomplit, sans doute, sous lâaction constante du Saint-Espritâ¯; mais cela nâempêcha pas quâil ne reçût une effusion toute spéciale de cet Esprit à lâheure décisive du baptême, qui marque pour lui une étape importante de sa vie intérieure en même temps que lâentrée dans la carrière messianique.
Verset 34
Il y a quelque chose de solennel dans les affirmations de ce récit où, trois fois de suite, le Précurseur commence ses déclarations par ce motâ¯: Et moi (versets 31, 33, 34).
Câest dans le même but quâil emploie ici les verbes au parfait (jâai vu jâai rendu témoignage), affirmant ainsi un fait accompli, mais permanent dans sa réalité.
Quant à ce grand nom de Fils de Dieu, il nâa point lieu de surprendre dans la bouche de Jean-Baptiste puisque celui-ci a déjà affirmé la préexistence de la Parole éternelle (versets 15 et 30) et quâil avait du reste entendu une voix des cieux dire de Jésus, au moment de son baptêmeâ¯: «â¯Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je me complaisâ¯Â» (Matthieu 3.17â¯; Marc 1.11â¯; Luc 3.22).
La variante du Codex Sinaiticus et de deux versions syriaquesâ¯: «â¯lâÃlu de Dieuâ¯Â», rend plus évidente encore la relation de ce témoignage de Jean avec la scène du baptême.
Le témoignage du Précurseur eut un résultat immédiat, raconté dans la fin de ce chapitre et il est resté dans lâÃglise, dont il a affermi la foi, en certifiant la mission divine du Sauveur.
On sâest demandé comment le Précurseur, après avoir rendu à Jésus ces témoignages si lumineux et si fermes put traverser, dans le fond de sa prison, une heure dâépreuve intérieure telle que nous la racontent Matthieu (Matthieu 11.2 et suivants) et Luc (Luc 7.18 et suivants, voir les notes).
Il faut connaître bien peu le cÅur humain pour estimer quâune telle contradiction ne saurait se produire dans la vie du même homme.
Verset 35
Le premier groupe de disciples
Vocation de Philippe et de Nathanaël
Les premiers disciples
Versets 35 à 52 â La première rencontre
Lâun de ces deux disciples était André (verset 41), lâautre était certainement Jean, notre évangéliste, qui souvent trahit sa présence sans se nommer, ce qui est un indice très significatif de lâauthenticité de notre évangile (voir lâIntroduction et comparez Jean 13.23â¯; Jean 19.26â¯; Jean 20.2-3, etc.).
Il suffit de lire les détails si précis du récit qui va suivre, pour reconnaître à chaque trait le témoin oculaire.
Verset 36
Jean, ayant arrêté son regard sur Jésus, nâadresse pas précisément ces paroles à ses deux disciples, mais il les prononce pour eux. Ils ont entendu la veille ce même témoignage, plus complet (verset 29) et cette allusion suffira pour leur inspirer le désir de connaître de plus près
Celui que leur maître leur annonce. Telle était lâintention humble et désintéressée de ce grand serviteur de Dieu (Jean 3.26-30).
Verset 37
Ils le suivirent en cherchant à sâapprocher de lui. Il ne sâagit point encore du moment où ils se consacreront à son service et cependant on a pu dire avec raisonâ¯:
Verset 38
Jésus, voyant ces deux jeunes gens le suivre pour entrer en relation avec lui, les prévient avec bienveillance et leur facilite ainsi une rencontre qui décidera de leur vie.
Verset 39
Ce titre de Rabbi, quoique très honorable chez les Juifs, restait bien au-dessous de lâidée que ces deux disciples se faisaient de Jésus dâaprès le témoignage quâils venaient dâentendreâ¯; mais, pour le moment, ils nâosent sâélever plus haut en adressant la parole à Jésus.
Verset 40
Ou, selon le texte reçu (Codex Sinaiticus, A, la plupart des majuscules)â¯: venez et voyez. Les deux disciples sâinformaient modestement de la demeure de Jésus, dans lâintention de le visiter plus tardâ¯; mais lui les invite à le faire immédiatement et quand ils lâauront vu et entendu, ils lui seront acquis pour toujours. La vraie foi, qui est la confiance du cÅur, ne naît que dâun contact immédiat avec le Sauveur.
Câest-à -dire quatre heures de lâaprès-midi, à compter depuis six heures du matin selon la manière des Juifs.
Notre évangéliste adopte probablement partout cette division du jour usitée chez tous les peuples anciens, qui comptaient les heures à partir du lever du soleil et non, comme le pensent quelques interprètes (Tholuck, Ebrard, Ewald, Westcott, Keil), celle des modernes, qui les comptent à partir de minuit. Cette dernière manière de compter placerait le fait qui nous occupe à dix Heures du matin (voir Jean 4.6, notesâ¯; Jean 4.52, notesâ¯; Jean 11.9, notesâ¯; Jean 19.14, note).
Ce jour-là sâexpliquerait mieux sâil sâagissait de dix heures du matin, mais cette expression peut sâappliquer aussi à la fin de la journée. Elle oppose à la courte visite que les deux disciples se proposaient de faire à Jésus, les longues heures quâils passèrent auprès de lui.
Cette première rencontre avec son Maître a laissé à Jean un souvenir si ineffaçable, quâen écrivant son Ãvangile un demi-siècle plus tard, il sait en indiquer lâheure précise.
Verset 41
Comparer verset 35, note.
Verset 42
Que signifient ces expressionsâ¯: le premier et son propre frèreâ¯? â£Ãvidemment, lâévangéliste sous-entend ici le fait que chacun des deux disciples, après leur entretien avec Jésus, se mit aussitôt avec empressement à la recherche de son frère André à la recherche de Simon Pierre et Jean à celle de Jacques. André fut le premier à trouver son frère.
Ce mot suppose que Jean rencontra ensuite le sien et lâamena à Jésus (Marc 1.19)â¯; mais lâévangéliste, selon son habitude, passe sous silence ce qui le concerne. Câest ce que nâont pas compris les copistes qui ont corrigé le premier en premièrement.
Cette leçon (B, A, versions syriaque) ne saurait donner un sens satisfaisant, puisque le récit ne dit pas quâAndré ait trouvé en second lieu quelque autre disciple.
Le but des deux disciples était dâannoncer, chacun à son frère, cette grande nouvelle qui venait de remplir leur cÅur de joieâ¯: nous avons trouvé le Messieâ¯! (comparer verset 46) Ces mots furent, sans doute, prononcés avec un saint enthousiasme, puisquâil sâagissait de Celui qui, depuis tant de siècles, était attendu comme «â¯la consolation dâIsraëlâ¯Â».
Jean, qui ordinairement se sert du terme grecâ¯: Christ (versets 20 et 25) emploie ici le mot hébreu Messie (Oint), afin de conserver exactement les paroles dâAndréâ¯; mais il a soin de traduire ce nom, parce quâil écrit pour des Grecs.
Verset 43
La parole de Jésus à Pierre est préparée par ce motâ¯: lâayant regardé, considéré, de ce regard qui pénétrait jusquâau fond des cÅurs (Jean 2.25) et qui suffit à Jésus pour découvrir dans ce caractère lâénergie et la force qui en fera le Céphas (le roc) de son Ãglise.
Lâintroductionâ¯: tu es Simon, fils de Jonas, ne sert quâà donner plus de solennité à ce changement de nom, signé dâun changement de vie ou de position (Genèse 17.5â¯; Genèse 32.28).
Suivant dâautres, le nom de Céphas (roc) propose au disciple un idéal quâil doit sâefforcer de réaliser et qui est précisément le contraire de sa versatilité naturelle (Jean 13.36-38).
Par son caractère propre, Pierre est inconstant, homme du premier mouvement, mais sans persévérance dans ses résolutions dominé par la crainte des hommes (Jean 18.17â¯; Galates 2.11 et suivants)â¯; la grâce de Dieu fera de lui un rocher.
On a voulu voir une contradiction entre ce récit et celui de Matthieu 16.18. Mais à Césarée de Philippe Jésus ne fait que reconnaître et confirmer à son disciple le nom quâil lui avait donné auparavantâ¯: Tu es Pierre.
Cette présentation de Pierre à Jésus eut probablement lieu le soir même du jour où les deux disciples avaient trouvé leur Maître. On peut supposer quâils le quittèrent quelques instants pour se mettre à la recherche de leurs frères. Lâévangéliste fait le compte exact des jours de cette semaine mémorable en répétant cette indication le lendemain, versets 29, 35 et 44â¯; comparez Jean 2.1.
Les interprètes qui estiment que les mots du verset 40 «â¯ils restèrent auprès de lui ce jour-là â¯Â», obligent à placer au lendemain ou aux jours suivants la recherche faite par André et Jean et lâentrevue de Simon avec Jésus, doivent renoncer à trouver dans notre morceau des données chronologiques précises et concordantesâ¯: le lendemain (verset 44) serait le jour qui suivit la visite de Pierre, mais comme il ne serait pas dit quand celle-ci eut lieu cette indication ne correspondrait à rien.
Verset 45
Au moment où, le lendemain, Jésus se disposait à partir pour la Galilée, pour y exercer son ministère, il rencontre Philippe quâil invite à le suivre.
Cette invitation nâétait pas encore un appel à lâapostolat (Matthieu 4.19)â¯; elle signifiait pour Philippeâ¯: «â¯Reviens avec moi en Galiléeâ¯Â».
Mais, dans la pensée de Jésus, elle avait une portée plus grande. Lâévangéliste fait ensuite cette remarque que Philippe était de la même ville quâAndré et Pierre (Jean 12.21), sans doute afin de faire comprendre quâil entra en relation avec Jésus par lâintermédiaire de ces deux disciples.
Verset 46
Il nâest pas dit où Philippe trouve Nathanaël, câétait probablement pendant ce voyage vers la Galilée (verset 44), où les disciples accompagnaient Jésus. Peut-être Nathanaël faisait-il la même route, en sens inverse, pour se rendre auprès de Jean-Baptiste.
Quoi quâil en soit, Nathanaël, après cette rencontre avec Jésus, devint son disciple et même très probablement un apôtre. En effet, au Jean 21.2, il est nommé parmi les apôtres et, dans les diverses listes de ces derniers (Matthieu 10.3â¯; Luc 6.14â¯; Marc 1.18â¯; Actes 1.13), où son nom manque, on trouve celui de Barthélemi placé à côté de celui de Philippe, son ami.
Or, comme Barthélemi nâétait quâun nom patronymique («â¯fils de Tholmaïâ¯Â»), on peut conclure que câest Nathanaël qui le porte dans les synoptiques.
Nous avons trouvé, telle est la joyeuse exclamation par laquelle ces nouveaux disciples sâannonçaient lâun à lâautre la bonne nouvelle de leur première rencontre avec Jésus (verset 42).
Pour affermir sa propre foi et celle de son ami, Philippe aime à rappeler que cet envoyé de Dieu nâapparaît pas inattendu en Israël. Moïse et les prophètes ont écrit de luiâ¯; Moïse dans Deutéronome 18.15 et dans toutes les institutions de la loi qui préfiguraient le Messie (Jean 5.46â¯; Luc 24.27-44)â¯; les prophètes, dans la plupart de leurs écrits.
En ajoutant que Jésus était fils de Joseph et originaire de Nazareth, Philippe ne fait quâexprimer lâopinion courante et il faut que la critique négative soit bien avide de vaines objections pour conclure de là que lâauteur de notre Ãvangile ignorait la naissance de Jésus à Bethléhem et son origine surnaturelle. Elle oublie que ce nâest pas lâévangéliste qui parle ici, mais Philippe qui, apparemment, nâétait pas au fait alors des circonstances particulières dans lesquelles Jésus était venu au mondeâ¯!
Verset 47
Naïve expression du préjugéâ¯! Dâoù pouvait venir ce préjugé dans lâesprit de lâhonnête Nathanaëlâ¯? De ce que Nazareth était en Galiléeâ¯? (Jean 7.52) de ce que câétait une petite et Obscure localitéâ¯? Ou enfin de ce que cette ville était mal famée sous le rapport de la moralitéâ¯?
Les interprètes ont tour à tour soutenu ces diverses opinions. M. Godet pense que le doute de Nathanaël venait de ce quâaucune prophétie nâassignait a Nazareth un rôle si important.
Mais la question de Nathanaël paraît trop générale (quelque chose de bon) pour comporter cette idée.
En revanche, le même commentateur fait cette observation pleine de justesse que Nathanaël étant de Cana (Jean 21.2), à une lieue seulement de Nazareth, il pouvait céder a cette mesquine jalousie qui existe souvent de village à village et qui ne lui permettait pas de croire que cette localité, aussi obscure que la sienne, avait part à une gloire si éclatante.
Quoi quâil en soit, il est sûr que les habitants de Nazareth ne manquèrent pas de justifier, dans la suite, lâopinion peu favorable que Nathanaël avait dâeux (Marc 6.6â¯; Luc 4.16 et suivants).
Viens et voisâ¯!
Verset 48
Grecâ¯: véritablement un Israélite, qui ne lâest point seulement par son origine nationale (Romains 9.6), mais dans son cÅur (Romains 2.29) et il est tel par sa droiture et sa sincérité câest un homme intègre (Psaumes 32.2).
Jésus adresse ces paroles à ceux qui lâentourent, mais de manière à être entendu de Nathanaël et afin dâentrer en rapport avec lui, de gagner sa confiance en se dévoilant à lui dès lâabord comme Celui qui sonde les cÅurs (Jean 1.43â¯; Jean 2.25).
Verset 49
Nathanaël ne repousse point la louange de Jésusâ¯; câest là , comme lâobserve Meyer, une preuve de sa sincérité et sa question nâest que lâexpression dâun profond étonnement.
Il paraît que, peu de temps avant la rencontre de Philippe et de Nathanaël, ce dernier sâétait retiré et recueilli sous un figuier près du Chemin, ou il croyait être seul et dérobé à tous les regards.
Là , lui dit Jésus, je tâai vu.
Le regard du Sauveur, non seulement a découvert Nathanaël en un lieu où il était naturellement caché, mais il a pénétré jusquâau fond de son cÅur et a reconnu les sentiments intimes qui lâoccupaient à ce moment.
Câest ce qui ressort de lâimpression profonde et décisive que fait sur Nathanaël ce simple motâ¯: je tâai vu. Rien de moins ne saurait expliquer comment cette parole crée la foi en cet homme et provoque la belle confession qui sâéchappe de son cÅur et de ses lèvres (verset 50).
Verset 50
Se sentant en présence dâun Ãtre qui lâa pénétré jusquâau fond de lââme, Nathanaël le reconnaît et le confesse avec bonheur comme le Fils de Dieu et le Roi dâIsraël.
Ces deux termes ne sont point synonymes, ainsi que le prouve déjà la répétition de ce motâ¯: tu esâ¯; mais chacun de ces titres doit être entendu dans sa signification biblique.
Sans doute, la connaissance de Nathanaël est bien faible encore, ce nâest point un théologien qui fait de la métaphysique, mais un croyant qui confesse sa foi et cette foi renferme en germe tout ce que croira plus tard, avec plus de lumières, Nathanaël devenu apôtre.
Ceux qui sâétonnent de rencontrer des lâabord dans sa bouche une telle confession, ont oublié que tout Israélite pieux connaissait les Ãcritures et que Nathanaël avait pu trouver, dans le seul Psaumes 2, les deux titres quâil donne ici à Jésus.
Verset 51
La plupart des interprètes considèrent cette parole de Jésus comme une questionâ¯: tu croisâ¯?
Cette question exprimerait la surprise, de Wette va jusquâà y voir une légère désapprobation de ce que Nathanaël croyait, sans une expérience mieux fondée.
Câest une erreur. Jésus se serait bien gardé de révoquer en doute et plus encore de blâmer, la foi naissante de cette âme droite et sincère. La preuve quâil la reconnaît et lâapprouve câest quâil promet à son nouveau disciple des grâces nouvellesâ¯: de plus grandes choses.
Verset 52
Cette solennelle affirmationâ¯: en vérité, en vérité, qui se trouve ici pour la première fois, mais quâon rencontre si fréquemment dans cet Ãvangile seul, est le mot hébreuâ¯: amen, amen, conservé par Jean dans la langue originale, bien quâil écrive en Grec.
Cette formule par laquelle il affirmait la vérité de sa parole, Jésus lâempruntait à lâAncien Testament quâil aimait à citer (Néhémie 8.6â¯; Psaumes 41.13â¯; Psaumes 72.19, comparez Apocalypse 3.14).
Jésus sâadresse ici non plus à Nathanaël seul, mais à tous les disciples qui lâentouraientâ¯: je vous dis.
Tout, dans ces solennelles paroles, a un sens symbolique, plein de vérité et de grandeur. Si le mot désormais est authentique (plusieurs critiques le retranchent suivant Codex Sinaiticus, B, Itala), il dirige la pensée sur le ministère de Jésus qui allait commencer.
Alors les disciples verront le ciel ouvertâ¯; ce ciel que le péché de lâhomme avait fermé à la terre, allait redevenir accessible à leur foi, à leurs espérances, à leurs prières (comparer Matthieu 3.16â¯; Actes 7.55).
Les disciples verront même les anges de Dieu monter et descendre sur le Fils de lâhomme. Ils comprirent dès lâabord cette image sublime car ils connaissaient la belle vision de Jacob à laquelle elle est empruntée (Genèse 28.12). Celle-ci allait être réalisée dans sa plénitude pour le Sauveur et pour tous ceux qui sâattacheront à lui (voir sur ce mot Fils de lâhomme Matthieu 8.20, note).
La communion intime et vivante de Jésus avec Dieu son Père, ses ardentes prières, qui monteront vers le ciel et qui redescendront sur lui en flots de grâces et de puissances divines pour lui permettre dâaccomplir les Åuvres qui lui serviront de signes (Jean 5.36â¯; comparez Jean 2.1-11) et dâexercer sur tous ceux qui lâapprocheront une action profonde, de faire participer aux bénédictions célestes tous ceux qui croiront en lui, telle sera la réalité de cette image.