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Bible Commentaries
Ésaïe 66

Bible annotéeBible annotée

versets 1-24

1 à 4 condamnation du culte hypocrite

1 à 2

La vraie explication a déjà été donnée par Calvin. Le prophète s’élève avec indignation, comme au chapitre 1 (verset 11 et suivants; comparez Ésaïe 58:1 et suivants), contre l’idée si répandue chez les Juifs d’un mérite attaché aux cérémonies du culte. Israël croit avoir assez fait pour son Dieu, et même lui avoir rendu service, en lui bâtissant un temple et en lui offrant les sacrifices prescrits. À des gens qui pensent être en règle quand ils sont allés au temple et y ont sacrifié, Ésaïe rappelle que le vrai culte est de nature spirituelle comme Dieu lui-même, et que c’est même dégrader l’Éternel, insulter à sa majesté et faire de lui une idole, que de prétendre l’enfermer dans un temple et s’acquitter envers lui par des offrandes, comme si celui qui a fait toutes choses avait besoin de quelque chose (Actes 17:24-25; comparez Psaumes 50:8-13) ! Sans doute, le temple est le lieu de repos de l’Éternel (Psaumes 132:5-8), mais parce que, dans sa condescendance, il l’a choisi pour s’y laisser invoquer et s’y manifester, non pour s’y renfermer; c’est ce qu’avait bien compris Salomon, lorsqu’à la dédicace du temple il exaltait la majesté du Dieu que les cieux des cieux ne peuvent contenir, combien moins cette maison ! (1 Rois 7:27). Ésaïe fait allusion à cette parole. Croyez-vous, veut-il dire, que Dieu ait besoin d’une demeure, et que ce temple, ou tout autre que vous pourriez bâtir, en fût une digne de lui ? Le seul sanctuaire où il puisse habiter réellement sur la terre, c’est le cœur de l’homme qui s’humilie et obéit à sa parole (Ésaïe 57:15; comparez Psaumes 51:18-19). Ces versets 1 et 2 sont cités par Étienne (Actes 7:49-50).

Pour les images du trône et du marchepied, voir Ésaïe 6:1 et Ésaïe 60:13. L’Éternel a sans doute aussi une demeure dans la création visible; mais ce sanctuaire, ce n’est pas le temple de Jérusalem, c’est l’univers entier, qui seul convient à sa grandeur. Comparez Ésaïe 57:15.

On a donné de ce passage plusieurs explications différentes de celle que nous venons d’exposer. D’après les uns, le prophète, s’adressant au peuple exilé, condamnerait à l’avance la pensée de rebâtir un temple après le retour, ou du moins le formalisme qu’il craindrait déjà de voir s’y renouveler. Mais il déclare lui-même ailleurs que le temple doit être rebâti (Ésaïe 44:28; comparez Esdras 1:1-4 et Aggée); et s’il parlait ici en vue de l’époque du retour, il n’aurait pu le faire que dans les tout derniers temps qui précédèrent, ou dans ceux qui suivirent cet événement. Ce chapitre appartiendrait donc à une autre époque que le reste de la prophétie chapitres 40 à 66; ce qui n’est guère admissible. Selon d’autres, le but du prophète serait de s’opposer au projet formé par les exilés de bâtir un temple en Babylonie. Mais ni dans notre texte ni dans l’histoire on ne trouve la moindre trace d’un semblable dessein. Enfin, selon quelques-uns, Ésaïe voudrait dire que dans la nouvelle économie il n’y aura plus de temple, et condamnerait comme une profanation toute espèce de culte rituel qui pourrait s’y produire. Mais si dans quelques tableaux des temps messianiques, le prophète ne parle pas du temple (Ésaïe 2:4; Ésaïe 4:5-6), dans plusieurs autres il suppose l’existence d’un temple et d’un culte dans la nouvelle Jérusalem (versets 21 à 24; Ésaïe 56:7; Ésaïe 60:7).

Le sens est que celui qui offre à Dieu un culte de pure forme, l’outrage aussi gravement que celui qui commet un crime et viole audacieusement la loi. Le rite sans l’adoration du cœur, le sacrifice sans l’obéissance, lui est insupportable. Comparez Ésaïe 1:13-14.

Leurs abominations : l’idolâtrie (Jérémie 7:30), à laquelle ils se livrent, en dépit de leur piété apparente. Le chien et le porc : deux animaux impurs, qu’on n’offrait jamais en sacrifice, chez les Israélites (Ésaïe 65:4).

Comparez Ésaïe 65:2; Ésaïe 65:12.

5 à 14 le châtiment des impies; le salut glorieux de Sion

Le prophète adresse aux fidèles une parole de consolation. Leurs frères (des Israélites, non des païens) les méprisent, les haïssent, les repoussent même (voyez Ésaïe 65:5), à cause de leur fidélité à Jéhova, et se moquent des promesses qui font leur espérance (Ésaïe 5:19). Comparez Luc 6:22. Qu’ils se consolent ! Ce n’est pas pour les opprimés, mais pour les oppresseurs que sera la confusion

L’Éternel paraîtra pour le bien des fidèles et pour la ruine de ceux qui nient qu’il doive apparaître— Calvin

Comparez Ésaïe 1:29; Ésaïe 26:14; Ésaïe 65:13.

Le prophète assiste en esprit au jugement qu’il vient d’annoncer. Il entend un fracas pareil à celui du tonnerre : l’Éternel sort de sa résidence (la ville, le temple) pour foudroyer ses ennemis; c’est sa réponse au défi des moqueurs (verset 5; comparez le jugement des profanateurs en Sion Ésaïe 33:14). Joël parle également de l’Éternel qui rugira de Sion (Joël 3:16).

Pendant qu’Israël infidèle est frappé, Sion (le reste fidèle) voit se multiplier sa population. Ésaïe la compare à une femme qui va devenir mère (comme Ésaïe 54:1). Il insiste sur le caractère merveilleux de cet enfantement : au lieu d’être lent et douloureux, il s’accomplit en un instant et sans souffrance; au lieu de ne naître qu’à de longs intervalles, les enfants viennent au monde soudain en grand nombre : c’est chose inouïe, tout un pays (tout le peuple d’un pays) qui naît en un jour ! Comparez Ésaïe 26:4-5.

Ce verset oblige à donner un sens collectif au terme : un enfant mâle (verset 7) (grand et fort); c’est la personnification de tout le peuple nouveau.

Cet enfantement miraculeux est l’œuvre de Dieu lui-même. Après avoir préparé et conduit cette œuvre de grâce jusqu’au point où le nouvel Israël est prêt à sortir du sein de l’ancien, se pourrait-il qu’il ne voulût pas l’achever ?

Les fidèles (verset 5), qui ont si longtemps gémi sur Sion, peuvent et doivent se réjouir de sa prospérité, qui sera le partage de tous ceux qui ont pour elle des sentiments de fils (verset 11 et suivants). Comparez Ésaïe 51:3; Ésaïe 65:18.

Après la naissance, l’allaitement; et après ce dernier, les caresses et les consolations (versets 12 et 13).

Comparez Ésaïe 48:18; Ésaïe 60:17-18; Ésaïe 61:6.

Portés sur le côté. Voir Ésaïe 60:4, note.

L’image des nouveau-nés est remplacée par une autre, plus touchante encore : celle d’un homme fort, accablé par la souffrance, et que l’amour maternel relève et console. Dieu, prenant lui-même le rôle d’une mère, console son peuple des peines de l’exil (comparez Ésaïe 49:13-15).

Comparez Ésaïe 60:5.

L’image est pareille à celles de Ésaïe 44:4; Ésaïe 48:2 : la grâce divine leur rendra la vie comme la pluie à l’herbe desséchée (contraste : Ésaïe 1:30).

Les derniers mots forment la transition à la strophe suivante; par les ennemis il faut entendre non seulement Israël infidèle, mais les rebelles dans tous les peuples; car c’est un jugement tout à fait général qui va être décrit (verset 16).

15 à 24 le jugement universel et le rassemblement des fidèles de tout peuple en Sion

Un triage final s’opère parmi les Gentils comme en Israël.

L’Éternel est un guerrier (Ésaïe 42:13; Ésaïe 59:17). Son apparition est semblable à l’orage (Ésaïe 30:27; Ésaïe 30:30; Ésaïe 29:6; comparez Psaumes 18:8-16). Les nuées sont son char; l’ouragan et le feu (la foudre), les armes avec lesquelles il détruit ses ennemis. Cette description est imitée en partie Jérémie 4:13. Déverser : littéralement rendre ; il paie les idolâtres en feu (Reuss).

L’épée : trait emprunté à l’image du guerrier; comparez Ésaïe 34:5. Ce jugement universel (toute chair) est présenté sous l’image d’une bataille; les tués de Jéhova jonchent le sol sans nombre. Imitation dans Jérémie 25:31; Jérémie 25:33.

Ce verset fait un effet étrange au milieu de la description du jugement, versets 15 à 18 : on serait tenté avec quelques-uns d’y voir une adjonction au texte du prophète. En tous cas, l’idolâtrie ici dépeinte est plutôt celle des Juifs infidèles de l’exil que celle des contemporains d’Ésaïe.

Se sanctifient… : pour être initiés aux mystères des idoles (Ésaïe 65:5).

En imitant celui qui les conduit. Le texte hébreu dit littéralement : après un qui est au milieu. Il s’agit sans doute du hiérophante ou prêtre qui présidait aux rites et conduisait la procession. D’autres pensent à l’idole, placée au milieu du sanctuaire.

Pour les animaux impurs indiqués ici, voir Ésaïe 65:4; Lévitique 11:41; Lévitique 11:29. Certaine espèce de souris passait chez les Arabes et chez les Romains pour un mets fort délicat.

Il est nécessaire de suppléer une idée au commencement du verset : Mais moi… [je vais juger, ou je connais] …leurs œuvres. L’émotion de l’auteur, en présence du terrible spectacle du jugement, explique l’omission du verbe; et les deux termes qui se heurtent : moi…leurs œuvres… ! sont d’un effet saisissant.

Rassembler toutes les nations: Dieu rassemble des gens de toute nation, afin d’accomplir son jugement (versets 15 et 16) et de faire éclater ainsi sa gloire au milieu d’elles. Le prophète a devant les yeux le tableau de Joël 3:2; Joël 3:9-17). Zacharie 14:12-14 développe à son tour ces tableaux de Joël et d’Ésaïe et dit expressément que les nations s’assemblent pour combattre contre Jérusalem : elles préparent ainsi elles-mêmes l’accomplissement du dessein de Dieu, qui est de les frapper sous les murs de la ville sainte (voir au verset 24 et Apocalypse 20:8-9). Comparez aussi Ésaïe 29:5-7; Ézéchiel 38:1-23.

Le prodige fait au milieu des peuples est l’acte par lequel Dieu anéantit leurs armées et manifeste sa gloire. Ceux qui échappent au désastre vont en porter la nouvelle et proclamer la puissance de Jéhova parmi les nations, c’est-à-dire parmi tous les habitants de la terre qui n’étaient point montés contre Jérusalem. Plusieurs entendent par les réchappés les Israélites sauvés. Ce sens est inadmissible; au milieu d’eux se rapporte évidemment aux peuples rassemblés; leurs ne peut se rapporter à un sujet différent. Au verset 20 ce sont les païens qui ramènent les Juifs; pourquoi ne seraient-ce pas eux aussi qui s’en iraient par tout le monde donner le signal du retour ?

Le prophète mentionne, à titre d’exemples, quelques peuples éloignés : Tarsis, l’Espagne (Ésaïe 2:16, note).

Pul et Lud : il faut lire plutôt Put et Lud (comme Ézéchiel 27:10 et ailleurs); comparez Genèse 10:6; Genèse 10:13. Ces noms désignent deux peuples de l’Afrique, voisins de l’Égypte et habiles tireurs d’arc (Ézéchiel 30:5; Jérémie 46:9). Put est probablement la Lybie; le nom paraît signifier arc et se présente dans les hiéroglyphes égyptiens sous la forme Phet.

Tubal : les Tybaréniens habitant la côte sud-est de la mer Noire, souvent nommés dans Ézéchiel.

Javan : les Grecs d’Asie (Ioniens) et d’Europe. Voir Genèse 10:2.

Les îles : l’Occident.

À la nouvelle de cette manifestation de la gloire de Jéhova sous les murs de Jérusalem, tous les peuples y affluent pour l’adorer (Ésaïe 2:2-4; Ésaïe 60:4 et suivants); et ils ramènent, avec toute sorte d’honneurs et par les moyens de locomotion connus du temps d’Ésaïe, les Israélites dispersés parmi eux (vos frères; voyez verset 5). Le plus bel hommage qu’ils puissent offrir à Jéhova, n’est-ce pas de lui rendre son peuple ? Par une image d’une grande beauté, les Israélites sont comparés à l’offrande, et les païens aux vases d’honneur dans lesquelles elle est présentée. Comparez, pour l’image, l’offrande que saint Paul fait à Dieu des Gentils sauvés (Romains 15:16).

Il semblait, d’après Ésaïe 61:6, qu’Israël seul dût exercer la sacrificature dans la nouvelle économie. Mais ici le prophète va plus loin. Tout Israël sera prêtre; mais Dieu se choisira en outre des prêtres et des lévites parmi ces païens qui viennent de remplir un office vraiment sacerdotal en lui offrant les restes d’Israël. On sait que dans l’Ancien Testament nul Israélite, sinon les descendants de Lévi et à plus forte raison nul païen ne pouvait être appelé au sacerdoce. C’est donc une ère toute nouvelle qu’annonce Ésaïe : le mur de séparation entre Israël et les Gentils est tombé (Éphésiens 2:14). Comparez Ésaïe 56:7; Malachie 1:11.

Quelle sorte de sacrifice seront offerts par ce sacerdoce renouvelé ? Des offrandes spirituelles telles que celles mentionnées Hébreux 13:15; Romains 15:16, des dons en faveur du règne de Dieu (chapitre 60); l’offrande que chacun fera de sa personne à son service (Romains 12:1).

L’admission des païens au sacerdoce suppose que toutes choses ont été faites nouvelles (Ésaïe 65:16-17). Cet ordre de choses nouveau ne périra pas comme l’ancien, non plus que ceux qui y auront part.

Votre postérité et votre nom : il était dit de Babel (Ésaïe 14:22) : J’anéantirai le nom et le reste. Comparez Ésaïe 48:19.

Ésaïe décrit le culte nouveau dans la nouvelle Jérusalem sous les formes du culte de l’ancienne alliance. De même qu’Israël se rassemblait à Jérusalem aux grandes fêtes, toute l’humanité s’y rendra à chaque sabbat et à chaque nouvelle lune (jour sabbatique selon la loi) (Contraste : Ésaïe 1:13). Comparez l’assemblée sur la montagne de Sion Ésaïe 4:5-6.

Toute chair : non chacun à chaque sabbat, mais chaque fois des représentants de tous les peuples. Comparez Zacharie 14:16-19; Sophonie 3:9-10. L’idée dégagée de l’image, est celle d’un culte permanent offert à Dieu par l’humanité entière (Ésaïe 2:2-3). Chaque dimanche qui réunit les croyants autour du trône invisible de leur Père céleste, est un accomplissement de cette prophétie.

La multitude des adorateurs, en sortant de la ville sainte s’en va contempler le champ de bataille, voisin de Jérusalem, où gisent sans sépulture, comme un éternel monument de la justice de Dieu les cadavres des impies (versets 16 et 18). Le prophète fait certainement allusion à l’odieuse vallée de Hinnom (Ésaïe 30:33). La nouvelle Jérusalem lui apparaît comme l’ancienne renouvelée et glorifiée. De même qu’il y avait près de celle-ci un lieu maudit, où l’on jetait pour être brûlés les cadavres des malfaiteurs, il place le lieu du supplice éternel aux portes même de la nouvelle Sion. Ce tableau ne peut être pris à la lettre, non plus que les images qui suivent. Le ver qui ne meurt pas (châtiment intérieur) et le feu qui ne s’éteint pas (châtiment extérieur), sont les symboles d’une souffrance sans terme, qui consume le pécheur sans le détruire. Jésus s’approprie ces images (Marc 9:43-48; comparez Apocalypse 20:10; Apocalypse 20:15; Apocalypse 21:8), tout en dégageant l’idée éternelle de la forme matérielle dont la revêt Ésaïe. Le nom de géhenne, par lequel il désigne l’enfer, provient de celui de cette vallée de Hinnom (Gué-Hinnom) qui en est le type dans l’Ancien Testament.

Ce verset est la reproduction développée du refrain menaçant par lequel le prophète a terminé les deux premiers cycles de cette dernière partie (Ésaïe 48:22; Ésaïe 57:21). Comparez aussi le dernier verset du chapitre 1. C’est par cet effrayant tableau que se termine le livre des consolations (Ésaïe 40:1) : l’Éternel ne cesse pas d’offrir à tous et surabondamment sa grâce; mais il faut que ceux qui la méprisent sachent à quoi ils s’exposent en la repoussant.

Conclusion

Après avoir étudié en détail le livre d’Ésaïe, essayons d’en résumer les vues principales.

  1. L’adoration en esprit du seul vrai Dieu est destinée à remplacer les religions païennes et le culte symbolique de l’ancienne alliance. L’établissement de ce culte spirituel sur la terre entière est le terme auquel doit aboutir, selon le plan de Dieu, l’histoire de l’humanité.
  2. Le royaume de Dieu sera réalisé ici-bas par l’apparition d’un descendant de David, qui l’établira, non par la force extérieure, mais par la puissance de l’Esprit divin dont il sera oint : il révélera la loi de Dieu à tous les peuples, proclamera le salut et établira ainsi un règne de paix et de justice. Mais Ésaïe annonce qu’il ne pourra accomplir cette œuvre qu’en se sacrifiant lui-même, comme victime expiatoire, pour ses frères. Il est donc le prophète et le Roi parfait, en même temps que le souverain sacrificateur de l’humanité.
  3. L’établissement du règne de Dieu a pour condition un jugement ou une série de jugements par lesquels l’Israël charnel sera dispersé et la théocratie juive détruite. Il faut que l’ancienne Jérusalem disparaisse pour faire place à la nouvelle. La nation sainte des derniers temps comprendra le résidu croyant d’Israël, ramené de ses exils successifs, et les convertis d’entre les Gentils : tous ceux en un mot dont la foi au Christ aura fait de vrais enfants d’Abraham quiconque, juif ou païen, refusera obstinément le salut, sera retranché par le jugement final qui clora la série des jugements antérieurs.
  4. Le salut promis par les prophètes devait, dans l’intention divine, renouveler d’abord Israël, pour s’étendre ensuite à tous les Gentils. Ésaïe annonce déjà le fait anormal qui modifiera profondément l’exécution de ce plan : l’incrédulité d’Israël à l’égard du Messie. Il résultera de là que les païens remplaceront momentanément Israël dans le règne de Dieu, jusqu’à ce que celui-ci revienne à l’Éternel et soit restauré avec le concours des païens eux-mêmes. Ainsi toutes les promesses qui, dans la bouche des prophètes, s’adressaient proprement à Israël, s’appliquent actuellement à l’Église, qui a pris sa place et qui accomplit l’œuvre qui eût été la sienne de répandre la connaissance de Jéhova sur la terre. Mais Israël sera replacé un jour au bénéfice de la grâce dont il aurait dû lui-même communiquer les bienfaits aux païens. Les promesses faites à ce peuple ne sont donc pas ébranlées par son rejet momentané. Le centre de l’humanité sauvée sera l’Israël converti des derniers temps, autour duquel se grouperont tous les autres peuples.
  5. On ne doit pas se représenter cet état final sous une forme purement spirituelle. Toute âme, pour se réaliser complètement, doit se revêtir d’un corps. La vie spirituelle, pénétrant l’humanité, créera un état social saint et heureux, dans lequel Israël rétabli (à Jérusalem, sans doute) jouera un rôle prépondérant. Humilié d’abord plus que tout autre peuple, glorifié maintenant entre tous, il sera au milieu d’eux le prophète de la grâce divine, et Jérusalem redeviendra la lumière du monde.

Ces vues, dont l’histoire a, jusqu’ici, pleinement confirmé la vérité, seraient-elles le produit de la réflexion d’un pieux israélite, plusieurs siècles avant Jésus-Christ ? Comment méconnaître dans le tableau de la personne du Messie et surtout dans celui de ses souffrances, de sa mort et de son activité royale et sacerdotale après qu’il est revenu à la vie, le fruit d’une révélation de Dieu ? Un trait surtout dans ce tableau est inexplicable sans une communication supérieure : c’est l’étonnante prévision de l’incrédulité d’Israël et de la mort du Messie, victime de cette incrédulité. On n’échappe à la force démonstrative de ce fait que par une exégèse qui détourne les textes de leur sens naturel (voir entre autres le chapitre 53).

Ce phénomène de l’inspiration prophétique atteint évidemment, dans certains moments, un degré particulier d’intensité. Soudain une vue nouvelle, communiquée le plus souvent sous forme de vision, s’empare de l’esprit du prophète; puis elle devient le point de départ de développements plus réfléchis et plus oratoires. C’est comme une illumination subite qui se répand sur un point quelconque de l’avenir, pour se résoudre ensuite en une lumière continue. Il suffit de comparer certains points culminants de la prophétie (comme les chapitres 7, 9, 42, 50, 53, 61, 63), avec ce qui précède et ce qui suit, pour sentir que de tels passages sont le produit immédiat de ces actes d’inspiration les plus absolument divins.

Informations bibliographiques
bibliography-text="Commentaire sur Isaiah 66". "Bible annotée". https://www.studylight.org/commentaries/fre/ann/isaiah-66.html.
 
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