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Bible Commentaries
Ésaïe 53

La Bible Annotée de NeuchâtelLa Bible Annotée de Neuchâtel

versets 1-12

Verset 1

Les souffrances et la mort du serviteur de Jéhovah (1-9)

Le prophète parle ici comme représentant d’Israël. Il se transporte au moment où le peuple, après avoir rejeté son Messie, ouvrira enfin les yeux et regardera à celui qu’il a percé (Zacharie 12.10). Israël confesse son incrédulité et s’accuse d’être demeuré sourd aux révélations divines (comparez Ésaïe 42.19-20). Tandis que les païens, qui n’avaient point entendu parler du serviteur de Dieu, ont cru en lui (Ésaïe 52.15), ceux auxquels il avait été annoncé, l’ont méconnu et rejeté. Comparez Ésaïe 49.4 ; Ésaïe 50.6.

Ce qui nous était annoncé, plutôt que notre prédication (Ostervald). Jean et Paul citent ce verset d’après la traduction des LXX, dans laquelle le terme grec peut avoir les deux sens (Jean 12.38 ; Romains 10.16).

Le bras de l’Éternel : le symbole de la puissance divine. Cette puissance s’est manifestée dans l’œuvre du serviteur accomplissant le salut du monde (voir surtout les derniers versets du chapitre).

Verset 2

Le fait inouï du rejet du Messie par Israël s’explique par le caractère d’infirmité qu’a revêtu son apparition. Sous cette faiblesse, qui le scandalisait, ce peuple n’a pas su discerner le bras de Dieu. Ésaïe compare le serviteur à une plante frêle, que personne ne remarque, mais sur laquelle reposent le regard et la faveur de Dieu, car lui seul il en sait le prix : a poussé devant lui, ; comparez Luc 2.40 ; Luc 2.52. Ce rejeton ne sort pas, comme Ésaïe 11.1, du tronc d’Isaï, mais d’un sol desséché (du sein d’Israël profondément abaissé. Le Messie en effet apparaît ici et dans toute cette partie du livre d’Ésaïe, non comme le représentant de la famille royale, le fils de David, mais comme celui du peuple tout entier, dont il est le sacrificateur (le vrai Israël, Ésaïe 49.3).

Verset 3

Le prophète a sans doute devant les yeux l’image d’un de ces lépreux auxquels la loi ordonnait de se voiler la face devant leurs semblables (Lévitique 13.45). Mais ici, ce sont les autres hommes qui se couvrent pour ne pas le voir, tant son aspect inspire d’horreur. Comparez Ésaïe 49.7 ; Ésaïe 52.14.

Verset 4

Les versets 4 à 7 indiquent la cause des souffrances extraordinaires du serviteur.

Nos maladies, nos douleurs, désignent toutes les souffrances qui constituent le salaire du péché dont il s’est chargé.

Et nous, nous le croyions puni… Israël a raisonné comme les amis de Job : prétendant mesurer sa faute par sa souffrance, il l’a tenu pour un homme que Dieu frappait d’un mal hideux en raison de quelque crime exceptionnel. Le mot nagoual que nous rendons par frappé, est employé 2 Rois 15.5, en parlant d’Ozias atteint de la lèpre ; et le substantif néga : plaie (verset 8), est une désignation très usuelle de cette maladie, regardée comme le châtiment direct du péché ; voir par exemple Lévitique 13.1-59 ; le traité du Talmud qui s’occupe de la lèpre est intitulé des plaies. Un fait à noter, c’est que, d’après une tradition juive, le Messie fils de Joseph (le Messie humilié) doit être lépreux.

Verset 5

Le prophète modifie l’image pour introduire ici un nouveau trait : non seulement le serviteur souffre d’infirmités qui provoquent le mépris et l’incrédulité, mais la haine de son peuple s’acharne contre lui et il finit par succomber à une mort violente (comparez Ésaïe 50.6-7 ; Zacharie 12.10). Cette mort est voulue de Dieu (verset 6) ; c’est un châtiment, mais non, comme on l’avait cru, celui de ses propres fautes (voir verset 6).

Le châtiment qui nous donne la paix, littéralement : le châtiment de notre paix, c’est-à-dire par lequel nous obtenons le salut, la paix avec Dieu.

Guéris : c’est nous qui étions les véritables lépreux (verset 1). Comparez 1 Pierre 2.24.

Verset 6

Errants comme des brebis : pareils à un troupeau qui a abandonné son berger ; infidèles et misérables tout ensemble. Même image Jérémie 50.6 et dans la bouche de Jésus Matthieu 15.21 ; Luc 15.4. Comparez 1 Pierre 2.25.

L’Éternel a eu pitié, tout en faisant justice. Il est de règle que le péché revienne sur le pécheur sous forme de châtiment. Ici la faute de tous retombe sur le seul juste, non par accident, mais en vertu d’un décret de Dieu, qui le frappe pour sauver les coupables ; le péché du monde pèse sur lui (Jean 1.29). On comprend maintenant ce que signifiaient des paroles comme celles-ci : C’est moi, moi, qui efface tes iniquités… J’ai effacé tes forfaits… (Ésaïe 43.25 ; Ésaïe 44.22). Il est impossible d’exprimer plus nettement que ne le fait Ésaïe dans tout ce passage, l’idée d’un sacrifice dans lequel le Messie est substitué aux pécheurs.

De nous tous. Ésaïe ne distingue pas entre fidèles et infidèles ; tout Israël, sans aucune exception, a péché et a besoin de la médiation du serviteur. Le prophète est d’accord avec lui-même (Ésaïe 6.5 ; Ésaïe 64.6) et avec tout l’Ancien Testament (Psaumes 14.2-3 ; Psaumes 143.2).

Verset 7

Loin de protester contre ce châtiment immérité, le serviteur l’accepte et le subit en silence. Il faut traduire : et lui s’humilie, plutôt que : on l’accable ; il y a un contraste intentionnel entre la brutalité de ses persécuteurs et la douceur dont il fait preuve. Deux images servent à peindre sa patience : celle d’un agneau qu’on immole, comme l’agneau pascal (Exode 12.3) et celle d’une brebis sous la main des tondeurs. Comparez l’application que Jérémie fait à sa propre situation d’une image semblable (Jérémie 11.19). Le Nouveau Testament revient fréquemment à ce type de l’agneau de Dieu : Jean 1.29 ; 1 Pierre 1.18-19 ; 1 Pierre 2.23 ; pour l’accomplissement, comparez Actes 8.32-35.

Verset 8

D’autres traduisent : Il a été enlevé à l’oppression et au jugement, c’est-à-dire délivré par la mort et glorifié par Dieu. Ce sens est possible, mais peu naturel ici, où il ne s’agit pas de l’élévation, mais de la fin douloureuse du serviteur. L’idée est plutôt qu’il a été victime d’une sentence inique ; les termes oppression et jugement sont synonymes de jugement oppressif.

La seconde partie du verset a été interprétée de bien des manières. Le mot dor, que nous rendons par contemporains, signifie proprement génération. Plusieurs l’appliquent à la postérité spirituelle du serviteur, mais cette idée n’a aucun rapport avec le contenu de ce verset ; sa place est au verset 10 ; et il est douteux quelle pût être exprimée par le mot dor. D’autres traduisent ce terme par, durée, sens qu’il ne comporte pas, ou par demeure, sens qui est possible (voir Ésaïe 38.12), mais bien invraisemblable (il faudrait entendre par cette demeure le tombeau du serviteur, verset 9). Celui que nous avons adopté se retrouve ailleurs (par exemple Jérémie 2.31) et s’accorde bien avec l’idée, énoncée déjà au verset 1, que nul, parmi les témoins de sa souffrance, n’a compris l’œuvre d’amour qu’il accomplissait en mourant.

Retranché de la terre des vivants : voyez Ésaïe 38.11 ; Ésaïe 38.18-19.

La plaie : voir la note verset 4.

Le frappait. Le pronom lamo est ordinairement un pluriel (les) ; mais il est employé quelquefois à la place du singulier lo (ainsi par Ésaïe lui-même, Ésaïe 44.15) ; il sert à donner ici plus de poids à la fin de la phrase. C’est donc à tort qu’on a vu dans ce mot la preuve que le serviteur n’est pas un individu, mais un être collectif, opinion qui est contredite par tout l’ensemble de ce chapitre.

Mon peuple : Israël, au nom duquel le prophète a parlé jusqu’ici.

Verset 9

Dans sa mort il est avec le riche. L’hébreu porte simplement : dans sa mort avec le riche. Il serait assez naturel de faire de ces mots le parallèle de ceux-ci : son sépulcre avec les méchants. Il faudrait alors, avec Luther et Calvin donner au mot riche le sens d’orgueilleux ou de violent. Mais on détourne ainsi le terme hébreu de son sens constant. La sépulture d’un riche, même impie, n’est d’ailleurs pas une sépulture ignominieuse, comme celle d’un malfaiteur. Si on laisse au mot riche son sens naturel, les deux membres de la phrase forment évidemment une antithèse. Ceux qui ont condamné à mort le serviteur (verset 8), lui ont destiné la sépulture d’un criminel. Mais, à cause de son innocence, Dieu a pourvu à ce qu’il fût enterré parmi les riches… Le récit évangélique de la mort de Jésus entre deux malfaiteurs et de son ensevelissement dans le tombeau du riche Joseph d’Arimathée (Matthieu 27.57), offrirait une coïncidence frappante avec ce trait de la prophétie. Mais nous avons peine à croire que ce soit là le vrai sens du texte. L’explication suivante nous paraît plus naturelle : Il a été enterré avec les criminels (avec lesquels il est mort) ; mais après sa mort il a été (dans le schéol) mis par l’Éternel au rang des plus honorés (comparez le pauvre Lazare dans le sein d’Abraham, Luc 16.22). Le mot bemothav signifie proprement : dans ses morts. Ce pluriel, analogue au pluriel chajim : les vies, pour dire la vie, désigne l’état de mort dans lequel le serviteur est maintenant entré et ne prouve en aucune façon que le prophète ait en en vue la mort de plusieurs individus (Reuss).

Comparez avec la fin du verset 1 Pierre 2.22.

Verset 10

La gloire du serviteur, récompense de son sacrifice (10-12)

Il a plu à l’Éternel…

Dieu ne fait rien arbitrairement ; la mort du Messie a donc une cause légitime. Mais il faut retenir qu’il n’y a en lui aucun péché. Pourquoi donc Dieu a-t-il voulu qu’il souffrit ? Parce qu’il soutenait notre cause et qu’il ne pouvait être satisfait autrement que par sa mort au jugement de Dieu— Calvin

Sacrifice expiatoire, hébreu ascham. Ce mot désigne le sacrifice pour le délit. L’idée spéciale de ce genre de sacrifice était celle d’une réparation ou compensation offerte à la loi pour certaines offenses. Le serviteur est donc représenté ici comme payant la dette que les pécheurs ne sont pas en état d’acquitter eux-mêmes (comparez le terme de rançon dont se sert Jésus Matthieu 20.28).

C’est son âme qui est offerte, ou plutôt qui s’offre elle-même. Il faut se rappeler que dans les sacrifices de l’ancienne alliance le sang est l’élément purifiant, parce qu’en lui réside la vie ou l’âme (Lévitique 17.11). Ésaïe fait entendre clairement, par cette allusion aux rites lévitiques, que dans les souffrances volontaires du serviteur juste de l’Éternel, Israël trouvera la réalité de ce qui n’était que figuré par les sacrifices de l’ancienne alliance.

Au lieu de : Quand son âme aura offert… M. Reuss traduit : Ah ! Tu ne donneras pas sa vie en expiation ! Ces mots exprimeraient la certitude que la vie du serviteur ne sera pas définitivement perdue et prouveraient que le serviteur est un être collectif, qui subsiste, tout en succombant dans quelques-uns de ses membres. Le texte hébreu permet sans doute la traduction proposée par M. Reuss ; mais cette interprétation est en contradiction avec le reste du chapitre, entre autres avec ces mots du verset 12 : il a livré son âme à la mort et n’a d’autre avantage que de permettre d’échapper à l’idée d’un Messie personnel et à celle d’une résurrection de ce Messie, qui est la transition nécessaire de son sacrifice à son règne.

Le prophète mentionne une triple récompense des souffrances du serviteur :

  • une postérité : ceux que sa mort fait vivre, Jean 12.21
  • de longs jours : vie sans fin du Ressuscité, Apocalypse 1.18 ; Romains 6.9-10 ; Hébreux 7.16-24
  • enfin la prospérité de l’œuvre de Jéhova entre ses mains. Cette œuvre est celle de l’établissement du règne de Dieu dans tout le monde, que le Rédempteur accomplit du sein de sa gloire. À la période d’humiliation et d’insuccès qu’il a traversée sur la terre, pendant son ministère en Israël, a succédé depuis son élévation une période de conquêtes spirituelles dont le terme sera la soumission de toute l’humanité à son empire, Jean 12.32 ; Philippiens 2.9-11

Verset 11

À cause du travail… Comparez Philippiens 2.9-11 : C’est pourquoi aussi Dieu l’a souverainement élevé…

Il jouira…, littéralement : il verra, se rassasiera, c’est-à-dire il se rassasiera de la vue de la prospérité de son œuvre (verset 10).

Par sa connaissance. On peut entendre, ou bien : par la connaissance dont il sera la source, c’est-à-dire par la révélation de Jéhova qu’il répandra jusqu’aux bouts de la terre ; ou bien : par la connaissance dont il sera l’objet, c’est-à-dire par la connaissance que les hommes, qui autrefois ne le connaissaient pas ou le méconnaissaient (Ésaïe 52.15 ; Ésaïe 53.1), auront de la rédemption qui leur est acquise par son sacrifice. Ce dernier sens se rattache mieux que le premier à l’idée fondamentale de ce morceau, qui est celle de l’expiation des péchés par la mort du serviteur de Dieu. Le titre de juste prend aussi dans ce sens toute sa valeur : c’est en vertu de sa sainteté qu’il a pu offrir sa vie en rançon pour les pécheurs ; c’est en qualité de juste qu’il peut justifier. Comparez Jésus-Christ le juste, notre avocat (1 Jean 2.1).

Beaucoup d’hommes. Cette expression retentit à travers tout le Nouveau Testament, aussi bien dans les discours de Jésus (Matthieu 20.28 ; Matthieu 26.28) que dans les écrits des apôtres (Romains 5.15-19 ; Hébreux 9.28).

Lui-même se chargera… Ces mots se rapportent sans doute au ministère d’intercession qu’il accomplira en faveur des pécheurs après son élévation (voyez verset 12).

Verset 12

Le serviteur, jusqu’ici méprisé, esclave des puissants (Ésaïe 49.7), devient lui-même un puissant dans l’histoire de l’humanité, un de ceux qui marquent dans son développement, l’un des conquérants spirituels du monde (Ésaïe 52.15 ; Jean 12.32) et il distribue le butin (l’humanité, sa conquête : Ésaïe 49.24) parmi les forts, c’est-à-dire entre les membres de la vaillante armée qui aura combattu avec lui pour l’établissement du règne de Dieu (Psaumes 110.3 ; Apocalypse 19.7).

Parmi les malfaiteurs. Voir Luc 22.37.

Il intercédera. Le futur, succédant au passé (il a livré, il a été compté), montre que cette intercession a lieu après sa mort et continue indéfiniment. Semblable au sacrificateur israélite, qui entrait dans le sanctuaire pour offrir à Dieu le sang de la victime et réclamer, en vertu de ce sang la grâce du pécheur, le Messie glorifié fera valoir devant Dieu son propre sacrifice et obtiendra le pardon des hommes coupables (Hébreux 9.24).

Tous les interprètes s’accordent à envisager le serviteur décrit dans la prophétie Ésaïe 52.13 à 53.1-12, comme le même personnage que le serviteur des chapitres 42, 49 et 50. Mais ils se divisent sur la manière d’envisager ce serviteur, les uns voyant en lui un être collectif, les autres un personnage individuel. Dans la pensée des premiers, le serviteur serait soit le peuple juif dans son ensemble, soit la meilleure partie, l’élite, de ce peuple ; aux yeux de quelques-uns, le corps des prophètes.

Cette interprétation n’est, selon nous, admissible ni sous l’une ni sous l’autre de ces formes. Le serviteur ne peut être la personnification du peuple. Car il est dans plusieurs passages expressément distingué de ce dernier ; ainsi quand, Ésaïe 50.10, le peuple est exhorté à l’écouter ; quand il est dit, Ésaïe 49.6-8 et Ésaïe 42.6, que le serviteur est appelé à rétablir les tribus de Jacob et à être le médiateur du peuple ; quand il est représenté comme le juste, le seul fidèle, souffrant pour tous les autres (Ésaïe 42.1-7 ; Ésaïe 50.4 ; Ésaïe 53.6), tandis que le peuple lui-même est censuré, à chaque page de cette prophétie, comme le serviteur sourd et aveugle, comme la nation coupable, qui dans l’exil subit la peine de ses fautes (Ésaïe 43.8 ; Ésaïe 48.4 ; Ésaïe 50.1 ; Ésaïe 53.6). On a émis l’idée, il est vrai, que le peuple serait représenté ici comme expiant les péchés des païens. Mais Ésaïe dit expressément, Ésaïe 53.8, en parlant du serviteur : La plaie lui a été faite pour le péché de mon peuple. Ajoutez ce que le prophète annonce de l’incrédulité du peuple à l’égard du serviteur et l’on comprendra bien que le serviteur ne saurait être le peuple lui-même.

Mais peut-être le serviteur serait-il du moins la personnification de la portion fidèle du peuple, souffrant innocemment pour la masse de la nation ; ou même plus spécialement le corps des prophètes ? Mais le prophète lui-même, qui est certainement à la tête de la partie fidèle du peuple, confesse Ésaïe 53.3-5 les faux jugements auxquels lui et ceux qui l’entourent se sont livrés d’abord à l’égard du serviteur, en le voyant si affligé ; et il se range parmi ceux dont le serviteur a expié le péché (l’iniquité de nous tous, verset 6). Les souffrances des justes en Israël sont des souffrances de purification pour eux-mêmes, jamais d’expiation pour les autres. Personne ne saurait racheter son frère, ni donner à Dieu sa rançon ; car le rachat de leur âme est trop cher (Psaumes 49.8). Voilà l’expression du sentiment des plus fidèles en Israël. Israël rachetant Israël : c’est une monstruosité aux yeux de tout vrai Israélite. Lui-même (l’Éternel) rachètera Israël de ses iniquités (Psaumes 130.8). Telle est la foi de l’élite d’Israël. Le saint reste, l’élite du peuple, bien loin d’être celui qui rétablit Israël est au contraire l’Israël rétabli. En général, lorsqu’on lit tous les passages des chapitres 42, 49, 50 et 53 sur le serviteur de Jéhova, sans parti pris, il est impossible de se défendre de l’impression qu’il s’agit non d’une collectivité, mais d’un individu.

Cela saute tellement aux yeux, que des interprètes décidés à ne pas trouver dans ce tableau la personne du Messie, l’ont appliqué à des personnages tels que Jérémie ou Josias, ou même, comme le fait M. Renan, à quelqu’un de ces nombreux martyrs qui furent victimes de la persécution de Manassé (2 Rois 21.16). Mais si, à certains égards, ces hommes sont des types du Messie souffrant, jamais il ne sera possible d’attribuer à leurs souffrances le caractère expiatoire qui est celui du supplice du serviteur. Comment leur appliquer des mots tels que ceux-ci : Mon serviteur juste en justifiera plusieurs. Que faire, dans cette explication, de cette prolongation de sa vie après le sacrifice et de cette domination universelle qui doit être la récompense de son œuvre ?

Déjà dans le Psaume 110 David avait contemplé un personnage en qui se concentrait la postérité royale que Nathan lui avait promise (2 Samuel 7.1-29) ; il avait vu ce roi, son descendant, assis sur le trône divin et en même temps remplissant un sacerdoce à la façon de Melchisédec. Ésaïe avait décrit dans les chapitres 7 à 11 le Messie comme roi ; il le dépeint ici comme sacrificateur, ou pour mieux dire, comme élevé à la divine royauté par la voie douloureuse de la sacrificature volontaire. Là, il l’avait contemplé comme Emmanuel (dès avant sa naissance), puis naissant, puis régnant (chapitres 7, 9 et 11). À cette élévation graduelle répond ici un abaissement croissant. Le serviteur, après avoir été présenté, chapitre 42, comme prophète, échoue dans son œuvre auprès d’Israël au chapitre 49 ; il est méprisé et maltraité au chapitre 50 ; il meurt enfin, chapitre 53. Mais cette mort ne termine pas son histoire. Au moment où il vient d’être retranché du monde des vivants, il reparaît et il agit plus victorieusement que jamais. Par sa mort il est devenu le roi du chapitre 11.

Un seul personnage traverse toutes ces phases, réunit tous ces contrastes : le Messie. L’antiquité juive n’a pas douté de cette explication. Le lépreux de la maison de l’Éternel, disaient les rabbins, est le nom du Messie. Embarrassés par ces gloires d’un côté, ces humiliations de l’autre, ils en étaient venus à se figurer deux Messies, l’un souffrant, qu’ils appelaient le fils de Joseph, car il devait naître selon eux de la tribu d’Éphraïm, l’autre, glorieux, qu’ils nommaient le fils de David. Ils n’abandonnèrent que plus tard cette application de notre chapitre au Messie, parce qu’elle devenait une arme dangereuse dans la main des chrétiens. Le Nouveau Testament n’est pas moins net sur ce point ; comparez Matthieu 8.17 ; Matthieu 20.28 (rançon, ascham, Ésaïe.) ; Matthieu 26.28 (plusieurs, rabbim, Ésaïe 52.14 ; Ésaïe 53.11) ; Luc 18.31-32 ; Luc 22.37 ; Luc 24.26 ; Luc 24.44 ; Actes 8.32-35 ; Jean 12.38 ; 1 Pierre 2.22-25.

En face de ces faits, que signifient des objections comme celle-ci : L’Ancien Testament ne connaît pas le Messie souffrant. Quand Zacharie 12.10 et Daniel 9.24-27 ne prouveraient pas le contraire, notre passage est si clair que, même seul, il se suffirait à lui-même.

L’idée du Roi-Messie, dit-on encore, est étrangère à cette dernière partie d’Ésaïe. Elle l’est aussi peu que celle du Messie abaissé l’était à la première (voir à Ésaïe 11.1). La vérité est que, dans la première partie le Messie est présenté comme roi fidèle et juste, en opposition à la royauté israélite qui s’égare même dans ses meilleurs représentants, tandis que dans la seconde, en face d’Israël plongé dans la plus profonde misère, il apparaît comme le sacrificateur qui n’arrive au trône que par la souffrance. Mais la royauté n’en est pas moins clairement indiquée dans les passages Ésaïe 43.1-7 ; Ésaïe 49.7 et suivants ; Ésaïe 52.13-15 ; Ésaïe 53.10-12.

La vraie objection, aux yeux de plusieurs, c’est que l’application messianique impliquerait nécessairement une révélation positive accordée à Ésaïe, ce que l’on ne croit pas pouvoir concéder. Cette conséquence est évidente en effet et nous l’acceptons pleinement, car nous sommes convaincus que, comme l’histoire du peuple d’Israël en général ne peut s’expliquer que par une intervention constante de Dieu, la prophétie qui a fleuri au sein de ce peuple et de ce peuple seul et dont notre chapitre est le produit le plus merveilleux, ne peut s’expliquer que par une action extraordinaire et directe de l’Esprit divin sur l’esprit de l’homme.

La prophétie d’Ésaïe chapitre 53, par son caractère évidemment messianique, donne le démenti le plus absolu à ceux qui nient la révélation prophétique.

Informations bibliographiques
bibliography-text="Commentaire sur Isaiah 53". "La Bible Annot�e de Neuch�tel". https://www.studylight.org/commentaries/fre/neu/isaiah-53.html.
 
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