«Celui qui brise est monté contre toi: garde la forteresse, surveille le chemin, fortifie tes reins, affermis beaucoup ta puissance» (v. 1).
Après sâêtre adressé à Juda pour lâencourager et le consoler, lâÃternel se tourne subitement vers le Méchant, vers lâAssyrien roi de Ninive et lâinterpelle. Ces interpellations inopinées sont, comme nous lâavons vu dans lâAvant-propos, un des traits extérieurs, caractéristiques de notre prophète. Ici nous entrons en plein dans la scène historique.
Les mots «Celui qui brise est monté contre toi» contrastent étrangement avec la parole de Michée: «Celui qui fait la brèche est monté devant eux» (Michée 2:13). Là le Berger faisait la brèche pour briser les obstacles et délivrer ses brebis; ici, le Vengeur monte pour briser à jamais la puissance hostile dont le joug pesait si lourdement sur Juda, et la retrancher entièrement. Donc le jugement des nations est aussi certain que la délivrance du peuple de Dieu.
Les instruments que lâÃternel emploie pour détruire Ninive sont appelés «ses hommes forts» (v. 3; Ãs. 13:3). Ce ne sont pas les mêmes hommes forts que lâÃternel fait descendre avec lui en Joël 3:11, quand il sâassied pour juger toutes les nations et qui ont pour antitypes les hommes forts de David (2 Sam. 23:8-39). Ici Babylone, associée aux Mèdes, est lâinstrument dont Dieu se sert pour anéantir Ninive, comme il se servira plus tard des Mèdes et des Perses pour anéantir Babylone. Toutes ces puissances qui croient agir indépendamment et pour elles-mêmes sont des instruments inconscients et aveugles en la main de lâÃternel pour accomplir ses desseins. Ce principe est important à retenir dans le jour actuel. Dieu élève aujourdâhui une nation; il lâabaissera demain. Aujourdâhui elle lui sert de verge; demain il suscitera une verge nouvelle qui brisera, puis écrasera la première. Lâorgueil de lâAssyrien est abaissé par lâorgueil de Babylone, par les hommes forts de lâÃternel; lâorgueil de Babylone sera écrasé à son tour. Au temps de Nahum, Babylone, fief des rois dâAssyrie, sâétait déjà révoltée à diverses reprises contre le joug de Ninive et avait dû maintes fois subir de sanglantes représailles. Maintenant le cadran marquait lâheure où lâÃternel, quoique lent à la colère, allait laisser libre cours à cette dernière. Retranchant la domination à Israël infidèle, Dieu avait décidé de la confier à Babylone dont il voulait faire la «tête dâor» des empires gentils. Il fallait donc que les prétentions de lâAssyrien à obtenir cette suprématie fussent anéanties, sans parler de lâiniquité de Ninive qui était arrivée à son comble. Malgré ses ambitions, Assur nâavait jamais obtenu lâempire universel. Ce terme ne veut pas dire que lâunivers soit soumis à un tel empire, et ne fait pas même allusion à lâétendue de son territoire; il signifie plutôt quâune domination universelle ne rencontre plus de nation qui ne lui soit pas soumise et quâelle a pour vassaux les rois de ces nations. Il en fut ainsi de Babylone et des autres empires qui lui succédèrent. Il en sera de même du dernier, de lâempire romain, ressuscité à la fin des temps sous la forme de la Bête et des dix rois, de cette confédération qui provoquera lâadmiration du monde entier.
Quâil est ironique cet appel au roi de Ninive: «Garde la forteresse, surveille le chemin, fortifie tes reins, affermis beaucoup ta puissance!» As-tu pris toutes tes précautions? Surveille tout toi-même, forme tes réserves; que rien ne manque; que nulle part ta prévoyance ne soit en défaut! Mes hommes forts pourront-ils quelque chose contre une organisation aussi savante? Mais tu oublies une chose: «LâÃternel a ramené la gloire de Jacob comme la gloire dâIsraël». Ce passage a été traduit de diverses manières, mais je ne doute pas que nous ne devions adopter cette version comme correspondant à lâinterprétation spirituelle et dépassant le sens historique même dans un tableau aussi essentiellement historique que celui-ci. Au moment où «celui qui brise est monté», la gloire de Jacob (de lâensemble du peuple représenté par Juda) et la gloire dâIsraël (nom donné fréquemment aux dix tribus) ont été ramenées. Rien de pareil nâavait eu lieu, si ce nâest partiellement et très incomplètement sous Josias; lâÃternel avait tiré pour un moment Juda de son abaissement profond, quoique le caractère du peuple ne fût nullement changé (Hab. 1:1), mais déjà la ruine avait repris son cours sous les successeurs de ce roi pieux. Il nâen sera pas de même à la fin; la gloire de lâancien peuple de Dieu sera remise en lumière et alors lâAssyrien, Gog, sera détruit pour toujours. Ainsi le Résidu sera restauré, car, est-il dit, «ceux qui dépouillent» les avaient dépouillés et avaient gâté leurs sarments. Lors de la destruction de Ninive, cet état nâavait point changé, et aujourdâhui même Israël est aussi abaissé quâalors. Il est comme un tronc sans rameaux, et toutes les nations le dépouillent. Tout changera lorsque la gloire du Messie quâil avait méprisé apparaîtra et sera reconnue de lui, et quâen parlant de Christ, il pourra dire: «Ma gloire» (Ps. 3:4; Jér. 2:11). On voit ici quâIsraël, tombé par son péché sous les coups de lâAssyrien, sera ramené par la chute de son ennemi, celle de Ninive nâétant que lâavant-coureur des terribles jugements de la fin, car la restauration est inséparable du jugement.
Aux v. 3, 4 nous avons une description magnifique de ces hommes forts de lâÃternel, câest-à -dire de lâarmée des Mèdes et des Chaldéens: «Le bouclier de ses hommes forts est teint en rouge, les hommes vaillants sont vêtus dâécarlate, lâacier fait étinceler les chars, au jour où il se prépare, et les lances de cyprès sont brandies. Les chars sâélancent avec furie dans les rues, ils se précipitent sur les places; leur apparence est comme des torches, ils courent comme des éclairs». Il sâagit là des rues et des places de Ninive et non pas des villes dâAssyrie comme le veulent certains commentateurs. Ninive est toujours en vue en premier lieu dans Nahum.
«Il pense à ses vaillants hommes: ils trébuchent dans leur marche, ils se hâtent vers la muraille, et lâabri est préparé. Les portes des fleuves sont ouvertes, et le palais sâeffondre» (v. 5, 6). LâAssyrien (toujours la même manière abrupte dâintroduire les personnages) pense à opposer ses «vaillants hommes» aux «hommes forts» de lâÃternel. En vain! Il faut que la volonté de Dieu sâaccomplisse. Ces vaillants hommes se hâtent, sortant peut-être de quelque orgie; ils trébuchent dans leur ivresse (cf. 1:10) pour gagner les abris confiés à la défense, quand déjà une partie de la cité est envahie. «Les portes des fleuves sont ouvertes.» Les fleuves qui défendaient la ville et lui constituaient une barrière inattaquable servent maintenant de porte dâentrée aux assaillants1. Plus tard, ne différant quâen un point de ceci, le sort de Babylone se décidera par le détournement de lâEuphrate, dont le lit mis à sec servira de porte dâentrée à lâennemi pour sâemparer de la grande cité. Le palais magnifique, orné et merveilleusement agrandi par Sankhérib, sâeffondre et nâest plus quâune ruine.
1 Cette interprétation me paraît beaucoup plus simple que celle dâautres commentateurs.
Telle est la sentence prononcée. «Câest arrêté» pour nây plus revenir. Ninive, semblable à une reine dépouillée de ses vêtements, sera exposée aux outrages et emmenée captive avec ses servantes. La partie féminine de la ville devient la proie éplorée du vainqueur. Toute cette scène est annoncée comme ayant déjà eu lieu, tant lâarrêt est irrévocable.
«Dès le jour où elle exista, Ninive a été comme une mare (ou plutôt un étang, un réservoir «Berekah») dâeau» (v. 8)1. Entourée de fleuves et de canaux, elle était dès le jour de son existence une cité inexpugnable, aussi bien que prospère, fournissant abondamment par ses fleuves de quoi alimenter les peuples. Elle avait augmenté le nombre de ses marchands plus que les étoiles des cieux (3:15). à grand peine entretenait-on à Jérusalem les étangs et les réservoirs; ceux de Ninive, fournis par la nature, la rendaient inabordable... «Mais ils fuient...» à quoi servent leurs défenses quand ils sont saisis de panique? Câest la déroute... «Arrêtez! Arrêtez!» Rien nây peut; pas un ne se retourne pour faire face à lâennemi. Alors câest le pillage; les envahisseurs sâemparent des immenses richesses accumulées. Ninive est pillée, vidée, dévastée. Une angoisse indicible sâempare de tous ses habitants.
1 Voir 1 Rois 22:38; 2 Rois 18:17; 20:20; Néh. 2:14; 3:15, 16; Cant. 7:4; Ãsaïe 7:3; 22:9, 11; 36:2; 2 Sam. 2:13; 4:12; Eccl. 2:6.
Quel tableau graphique de ce désastre! On croit assister à cette scène terrible, à cet effondrement! Lâhistoire nous dira que pendant trois ans Ninive fut assiégée, puis prise. La chose est possible, mais ce que Dieu nous montre ici, câest le jugement subit et final amené par les instruments préparés par Dieu pour cette destruction.
Lâorgueil si connu de lâAssyrien est écrasé du coup. Quand Dieu prononce le terrible: «Câest arrêté», qui pourrait résister, ne fût-ce quâun instant? Le sort que lâAssyrien infligeait aux nations, ses attaques brusquées, la terreur quâil répandait autour de lui, quand «tous les visages pâlissent» à son approche (Joël 2:6), tout cela lui est infligé maintenant: «Le cÅur se fond, et les genoux sont tremblants, et une poignante douleur est dans tous les reins, et tous les visages pâlissent» (v. 10). Nous le voyons ici, atteint par le sort même quâil avait infligé à la grande Thèbes dâÃgypte (chap. 3).
(v. 11 - 13.) â «Où est le repaire des lions, et le lieu où se repaissaient les lionceaux, où se promenaient le lion, la lionne, et le petit du lion, sans que personne les effrayât? Le lion déchirait suffisamment pour ses petits, et étranglait pour ses lionnes, et remplissait de proie ses antres, et de bêtes déchirées ses repaires. Voici, jâen veux à toi, dit lâÃternel des armées; et je réduirai tes chars en fumée; et lâépée dévorera tes lionceaux, et je retrancherai de la terre ta proie; et la voix de tes messagers ne sâentendra plus.»
Lâimage du lion était familière aux monarques assyriens et leurs monuments en témoignent. Dès Nimrod, la chasse aux lions était lâorgueil et le passe-temps des rois dâAssyrie. La force, lâimpétuosité, la cruauté de cet animal qui dévore, que rien nâeffraye, qui étrangle et déchire pour se satisfaire lui, sa lionne et ses lionceaux, sa soif de puissance et le butin dont il remplit ses antres, tout cela caractérisait lâAssyrien. Il suffit que lâÃternel des armées se lève pour sâopposer à celui auquel jamais homme nâavait pu résister; aussitôt tout lâattirail de guerre avec lequel il sâélançait pour conquérir le monde est réduit en fumée. Lâépée de Dieu anéantit sa progéniture par laquelle il aurait pu espérer reconquérir le pouvoir1. Son royaume anéanti, ceux dont il faisait sa proie et qui se révoltaient constamment contre lui, se soumettent à lâempire nouveau suscité de Dieu et lâère des carnages est close, sans que pour cela la paix soit jamais rétablie sur la terre. Elle ne le sera que lorsquâil sera dit: «Paix sur la terre», à lâapparition du Seigneur dans son règne. «La voix de tes messagers ne sâentendra plus.» Ah! comme elle avait été entendue autrefois cette voix menaçante que les messagers du roi venaient transmettre à Ãzéchias et à Jérusalem, et qui osait sâélever jusquâau trône même de Dieu! (Ãsaïe 36:37). Dans un temps futur on nâentendra plus que les voix joyeuses des messagers de bonnes nouvelles qui annoncent la paix! (1:15).
1 Le dernier rejeton des rois dâAssyrie, Assur-edil-ilane, périt dans le sac de Ninive.
Les histoires profanes nous ont à peine conservé une ou deux remarques au sujet de la grandeur de Ninive; les anciens monuments assyriens découverts depuis le milieu du siècle passé, nous en disent bien davantage et nous initient au luxe sans précédent, et à lâétonnante prospérité de cette immense cité. Mais aucun document ne nous parle de sa chute et ne nous décrit son désastre. La Bible seule nous renseigne clairement et divinement sur les origines de Ninive et sur sa destruction, plus soudaine que celle de Babylone, quoique Ninive surpassât cette dernière en faste et en importance. Ce qui nous remplit dâadmiration pour les Ãcritures, câest que tous les documents bibliques au sujet de la ruine de Ninive sont prophétiques. Nahum y occupe la première place.
versets 1-13
Câest arrêté
«Celui qui brise est monté contre toi: garde la forteresse, surveille le chemin, fortifie tes reins, affermis beaucoup ta puissance» (v. 1).
Après sâêtre adressé à Juda pour lâencourager et le consoler, lâÃternel se tourne subitement vers le Méchant, vers lâAssyrien roi de Ninive et lâinterpelle. Ces interpellations inopinées sont, comme nous lâavons vu dans lâAvant-propos, un des traits extérieurs, caractéristiques de notre prophète. Ici nous entrons en plein dans la scène historique.
Les mots «Celui qui brise est monté contre toi» contrastent étrangement avec la parole de Michée: «Celui qui fait la brèche est monté devant eux» (Michée 2:13). Là le Berger faisait la brèche pour briser les obstacles et délivrer ses brebis; ici, le Vengeur monte pour briser à jamais la puissance hostile dont le joug pesait si lourdement sur Juda, et la retrancher entièrement. Donc le jugement des nations est aussi certain que la délivrance du peuple de Dieu.
Les instruments que lâÃternel emploie pour détruire Ninive sont appelés «ses hommes forts» (v. 3; Ãs. 13:3). Ce ne sont pas les mêmes hommes forts que lâÃternel fait descendre avec lui en Joël 3:11, quand il sâassied pour juger toutes les nations et qui ont pour antitypes les hommes forts de David (2 Sam. 23:8-39). Ici Babylone, associée aux Mèdes, est lâinstrument dont Dieu se sert pour anéantir Ninive, comme il se servira plus tard des Mèdes et des Perses pour anéantir Babylone. Toutes ces puissances qui croient agir indépendamment et pour elles-mêmes sont des instruments inconscients et aveugles en la main de lâÃternel pour accomplir ses desseins. Ce principe est important à retenir dans le jour actuel. Dieu élève aujourdâhui une nation; il lâabaissera demain. Aujourdâhui elle lui sert de verge; demain il suscitera une verge nouvelle qui brisera, puis écrasera la première. Lâorgueil de lâAssyrien est abaissé par lâorgueil de Babylone, par les hommes forts de lâÃternel; lâorgueil de Babylone sera écrasé à son tour. Au temps de Nahum, Babylone, fief des rois dâAssyrie, sâétait déjà révoltée à diverses reprises contre le joug de Ninive et avait dû maintes fois subir de sanglantes représailles. Maintenant le cadran marquait lâheure où lâÃternel, quoique lent à la colère, allait laisser libre cours à cette dernière. Retranchant la domination à Israël infidèle, Dieu avait décidé de la confier à Babylone dont il voulait faire la «tête dâor» des empires gentils. Il fallait donc que les prétentions de lâAssyrien à obtenir cette suprématie fussent anéanties, sans parler de lâiniquité de Ninive qui était arrivée à son comble. Malgré ses ambitions, Assur nâavait jamais obtenu lâempire universel. Ce terme ne veut pas dire que lâunivers soit soumis à un tel empire, et ne fait pas même allusion à lâétendue de son territoire; il signifie plutôt quâune domination universelle ne rencontre plus de nation qui ne lui soit pas soumise et quâelle a pour vassaux les rois de ces nations. Il en fut ainsi de Babylone et des autres empires qui lui succédèrent. Il en sera de même du dernier, de lâempire romain, ressuscité à la fin des temps sous la forme de la Bête et des dix rois, de cette confédération qui provoquera lâadmiration du monde entier.
Quâil est ironique cet appel au roi de Ninive: «Garde la forteresse, surveille le chemin, fortifie tes reins, affermis beaucoup ta puissance!» As-tu pris toutes tes précautions? Surveille tout toi-même, forme tes réserves; que rien ne manque; que nulle part ta prévoyance ne soit en défaut! Mes hommes forts pourront-ils quelque chose contre une organisation aussi savante? Mais tu oublies une chose: «LâÃternel a ramené la gloire de Jacob comme la gloire dâIsraël». Ce passage a été traduit de diverses manières, mais je ne doute pas que nous ne devions adopter cette version comme correspondant à lâinterprétation spirituelle et dépassant le sens historique même dans un tableau aussi essentiellement historique que celui-ci. Au moment où «celui qui brise est monté», la gloire de Jacob (de lâensemble du peuple représenté par Juda) et la gloire dâIsraël (nom donné fréquemment aux dix tribus) ont été ramenées. Rien de pareil nâavait eu lieu, si ce nâest partiellement et très incomplètement sous Josias; lâÃternel avait tiré pour un moment Juda de son abaissement profond, quoique le caractère du peuple ne fût nullement changé (Hab. 1:1), mais déjà la ruine avait repris son cours sous les successeurs de ce roi pieux. Il nâen sera pas de même à la fin; la gloire de lâancien peuple de Dieu sera remise en lumière et alors lâAssyrien, Gog, sera détruit pour toujours. Ainsi le Résidu sera restauré, car, est-il dit, «ceux qui dépouillent» les avaient dépouillés et avaient gâté leurs sarments. Lors de la destruction de Ninive, cet état nâavait point changé, et aujourdâhui même Israël est aussi abaissé quâalors. Il est comme un tronc sans rameaux, et toutes les nations le dépouillent. Tout changera lorsque la gloire du Messie quâil avait méprisé apparaîtra et sera reconnue de lui, et quâen parlant de Christ, il pourra dire: «Ma gloire» (Ps. 3:4; Jér. 2:11). On voit ici quâIsraël, tombé par son péché sous les coups de lâAssyrien, sera ramené par la chute de son ennemi, celle de Ninive nâétant que lâavant-coureur des terribles jugements de la fin, car la restauration est inséparable du jugement.
Aux v. 3, 4 nous avons une description magnifique de ces hommes forts de lâÃternel, câest-à -dire de lâarmée des Mèdes et des Chaldéens: «Le bouclier de ses hommes forts est teint en rouge, les hommes vaillants sont vêtus dâécarlate, lâacier fait étinceler les chars, au jour où il se prépare, et les lances de cyprès sont brandies. Les chars sâélancent avec furie dans les rues, ils se précipitent sur les places; leur apparence est comme des torches, ils courent comme des éclairs». Il sâagit là des rues et des places de Ninive et non pas des villes dâAssyrie comme le veulent certains commentateurs. Ninive est toujours en vue en premier lieu dans Nahum.
«Il pense à ses vaillants hommes: ils trébuchent dans leur marche, ils se hâtent vers la muraille, et lâabri est préparé. Les portes des fleuves sont ouvertes, et le palais sâeffondre» (v. 5, 6). LâAssyrien (toujours la même manière abrupte dâintroduire les personnages) pense à opposer ses «vaillants hommes» aux «hommes forts» de lâÃternel. En vain! Il faut que la volonté de Dieu sâaccomplisse. Ces vaillants hommes se hâtent, sortant peut-être de quelque orgie; ils trébuchent dans leur ivresse (cf. 1:10) pour gagner les abris confiés à la défense, quand déjà une partie de la cité est envahie. «Les portes des fleuves sont ouvertes.» Les fleuves qui défendaient la ville et lui constituaient une barrière inattaquable servent maintenant de porte dâentrée aux assaillants1. Plus tard, ne différant quâen un point de ceci, le sort de Babylone se décidera par le détournement de lâEuphrate, dont le lit mis à sec servira de porte dâentrée à lâennemi pour sâemparer de la grande cité. Le palais magnifique, orné et merveilleusement agrandi par Sankhérib, sâeffondre et nâest plus quâune ruine.
1 Cette interprétation me paraît beaucoup plus simple que celle dâautres commentateurs.
Telle est la sentence prononcée. «Câest arrêté» pour nây plus revenir. Ninive, semblable à une reine dépouillée de ses vêtements, sera exposée aux outrages et emmenée captive avec ses servantes. La partie féminine de la ville devient la proie éplorée du vainqueur. Toute cette scène est annoncée comme ayant déjà eu lieu, tant lâarrêt est irrévocable.
«Dès le jour où elle exista, Ninive a été comme une mare (ou plutôt un étang, un réservoir «Berekah») dâeau» (v. 8)1. Entourée de fleuves et de canaux, elle était dès le jour de son existence une cité inexpugnable, aussi bien que prospère, fournissant abondamment par ses fleuves de quoi alimenter les peuples. Elle avait augmenté le nombre de ses marchands plus que les étoiles des cieux (3:15). à grand peine entretenait-on à Jérusalem les étangs et les réservoirs; ceux de Ninive, fournis par la nature, la rendaient inabordable... «Mais ils fuient...» à quoi servent leurs défenses quand ils sont saisis de panique? Câest la déroute... «Arrêtez! Arrêtez!» Rien nây peut; pas un ne se retourne pour faire face à lâennemi. Alors câest le pillage; les envahisseurs sâemparent des immenses richesses accumulées. Ninive est pillée, vidée, dévastée. Une angoisse indicible sâempare de tous ses habitants.
1 Voir 1 Rois 22:38; 2 Rois 18:17; 20:20; Néh. 2:14; 3:15, 16; Cant. 7:4; Ãsaïe 7:3; 22:9, 11; 36:2; 2 Sam. 2:13; 4:12; Eccl. 2:6.
Quel tableau graphique de ce désastre! On croit assister à cette scène terrible, à cet effondrement! Lâhistoire nous dira que pendant trois ans Ninive fut assiégée, puis prise. La chose est possible, mais ce que Dieu nous montre ici, câest le jugement subit et final amené par les instruments préparés par Dieu pour cette destruction.
Lâorgueil si connu de lâAssyrien est écrasé du coup. Quand Dieu prononce le terrible: «Câest arrêté», qui pourrait résister, ne fût-ce quâun instant? Le sort que lâAssyrien infligeait aux nations, ses attaques brusquées, la terreur quâil répandait autour de lui, quand «tous les visages pâlissent» à son approche (Joël 2:6), tout cela lui est infligé maintenant: «Le cÅur se fond, et les genoux sont tremblants, et une poignante douleur est dans tous les reins, et tous les visages pâlissent» (v. 10). Nous le voyons ici, atteint par le sort même quâil avait infligé à la grande Thèbes dâÃgypte (chap. 3).
(v. 11 - 13.) â «Où est le repaire des lions, et le lieu où se repaissaient les lionceaux, où se promenaient le lion, la lionne, et le petit du lion, sans que personne les effrayât? Le lion déchirait suffisamment pour ses petits, et étranglait pour ses lionnes, et remplissait de proie ses antres, et de bêtes déchirées ses repaires. Voici, jâen veux à toi, dit lâÃternel des armées; et je réduirai tes chars en fumée; et lâépée dévorera tes lionceaux, et je retrancherai de la terre ta proie; et la voix de tes messagers ne sâentendra plus.»
Lâimage du lion était familière aux monarques assyriens et leurs monuments en témoignent. Dès Nimrod, la chasse aux lions était lâorgueil et le passe-temps des rois dâAssyrie. La force, lâimpétuosité, la cruauté de cet animal qui dévore, que rien nâeffraye, qui étrangle et déchire pour se satisfaire lui, sa lionne et ses lionceaux, sa soif de puissance et le butin dont il remplit ses antres, tout cela caractérisait lâAssyrien. Il suffit que lâÃternel des armées se lève pour sâopposer à celui auquel jamais homme nâavait pu résister; aussitôt tout lâattirail de guerre avec lequel il sâélançait pour conquérir le monde est réduit en fumée. Lâépée de Dieu anéantit sa progéniture par laquelle il aurait pu espérer reconquérir le pouvoir1. Son royaume anéanti, ceux dont il faisait sa proie et qui se révoltaient constamment contre lui, se soumettent à lâempire nouveau suscité de Dieu et lâère des carnages est close, sans que pour cela la paix soit jamais rétablie sur la terre. Elle ne le sera que lorsquâil sera dit: «Paix sur la terre», à lâapparition du Seigneur dans son règne. «La voix de tes messagers ne sâentendra plus.» Ah! comme elle avait été entendue autrefois cette voix menaçante que les messagers du roi venaient transmettre à Ãzéchias et à Jérusalem, et qui osait sâélever jusquâau trône même de Dieu! (Ãsaïe 36:37). Dans un temps futur on nâentendra plus que les voix joyeuses des messagers de bonnes nouvelles qui annoncent la paix! (1:15).
1 Le dernier rejeton des rois dâAssyrie, Assur-edil-ilane, périt dans le sac de Ninive.
Les histoires profanes nous ont à peine conservé une ou deux remarques au sujet de la grandeur de Ninive; les anciens monuments assyriens découverts depuis le milieu du siècle passé, nous en disent bien davantage et nous initient au luxe sans précédent, et à lâétonnante prospérité de cette immense cité. Mais aucun document ne nous parle de sa chute et ne nous décrit son désastre. La Bible seule nous renseigne clairement et divinement sur les origines de Ninive et sur sa destruction, plus soudaine que celle de Babylone, quoique Ninive surpassât cette dernière en faste et en importance. Ce qui nous remplit dâadmiration pour les Ãcritures, câest que tous les documents bibliques au sujet de la ruine de Ninive sont prophétiques. Nahum y occupe la première place.